Deux ans après le début de la crise des gilets jaunes, la proposition de loi sur la « sécurité globale » est largement dénoncée en France. Visant à interdire la diffusion de vidéos ou photos de policiers dans l'exercice de leur fonction, cette proposition, jugée comme liberticide et portant atteinte aux droits fondamentaux divise la classe politique et indigne les citoyens, notamment les journalistes. Selon la presse française, la tournure des débats aurait même poussé le président de la République ainsi que son Premier ministre, à quitter le navire, laissant Gérald Darmanin seul face à ce dossier. Cette proposition de loi est censée « prohiber l'usage malveillant de l'image des policiers nationaux et militaires de la gendarmerie en intervention (article 24) ». La loi prévoit notamment une sanction d'un an de prison et de 45.000 euros d'amende, en cas de diffusion de « l'image du visage ou tout autre élément d'identification » d'un policier ou d'un gendarme en intervention, lorsque celle-ci a pour but de porter « atteinte à son intégrité physique ou psychique ». Pour beaucoup de Français qui n'avaient pas hésité à dénoncer l'état d'urgence ainsi que les mesures prises en son cadre, notamment l'application de tracking pour les cas Covid, il s'agit là d'un coup de massue. Ainsi, la députée de La France Insoumise (LFI), Mathilde Panot, n'a pas hésité à rejeter cette proposition, pointant du doigt à l'Assemblée nationale : « En pleine pandémie de coronavirus et en plein confinement de nos libertés, vous osez, après avoir arraché cinq mains, blessé à la tête 325 citoyens, condamné 3.000 citoyens, violenté des journalistes (...) nous présenter cette loi ». Après avoir fustigé les propos d'Emmanuel Macron où il demandait : « ne parlez pas de répression ou de violence policière, des mots inacceptables dans un état de droit », elle critique cette proposition qui ne permettra pas selon elle, en l'absence d'images, de prouver les violences policières. Elle dénonce également, comme beaucoup de Français, le recours aux drones pour la surveillance de l'espace public ainsi que les caméras à reconnaissance faciale : « nous serons scrutés à travers des drones et des caméras à reconnaissance faciale, citoyens souriez, vous serez tous surveillés, mais pas les policiers ». Une proposition donc très mal accueillie dans un contexte où beaucoup dénoncent des répressions et des comportements policiers jugés abusifs, et une impunité face aux agressions qu'auraient subies de nombreux journalistes dans l'exercice de leurs fonctions. Dernier exemple en date, la journaliste photographe Hannah Nelson a été placée en garde à vue lors d'une manifestation, ce qui a suscité une grande polémique au sein de la communauté des journalistes. Car selon cette proposition, si un journaliste ou un citoyen filme un policier, à son insu, la police, le gouvernement peut donc porter plainte contre lui. Cette loi intervient par ailleurs quelque temps après le mouvement des gilets jaunes, qui a donné naissance au « street reporting », c'est-à-dire des personnes qui, lors des manifestations, sortent leur portable ou une caméra pour filmer et diffuser sur les évènements sur les réseaux sociaux. Ainsi, si pour Darmanin, son rôle est de « protéger la vie personnelle des policiers et des gendarmes qui sans cesse se font menacer et agresser », les citoyens ne le voient pas du même oeil, constatant que certains policiers ont déjà commencé à appliquer cette loi, notamment lors de la dernière manifestation « anti-loi sur la sécurité globale » qui s'est terminée sous les gaz lacrymogènes et les canons à eau, rapporte le HuffingtonPost. Enfin, la défenseure des droits nommée par Emmanuel macron, ainsi que plusieurs organismes internationaux ont interpellé sur ce projet, estimant qu'il n'est pas nécessaire « à la protection des policiers et porte atteinte à la liberté d'expression et crée des obstacles au contrôle de leurs actions », avant de dénoncer une « atteinte à la démocratie ».