. D'Imilchil à Rome, où il vient d'être distingué meilleur "gardien de la biodiversité", aux côtés de trois autres méditerranéens, Hrou Aboucharif, fervent défenseur de l'environnement, a parcouru un long chemin et vécu de riches expériences. Par Mustapha Elouizi En sillonnant depuis son jeune âge les parcours et sentiers du haut Atlas oriental, Hrou Aboucharif ne s'était jamais mis en tête un jour de recevoir au "Parca de la Musica" de Rome une aussi prestigieuse distinction internationale et de côtoyer les meilleurs défenseurs de la biodiversité dans la méditerranée. "Les populations du monde doivent utiliser les ressources biologiques de manière durable, valoriser le savoir-faire local des paysans...et recourir au système d'agriculture solidaire", a-t-il déclaré lors de sa distinction, estimant que "ce prix n'est autre qu'une motivation pour aller de l'avant dans ses initiatives en faveur de la biodiversité". Son expérience empirique et son penchant pour la préservation de Dame Nature n'allaient pas rester dans cette phase spontanée et naturelle, puisqu'ils vont être enrichis ultérieurement par des études universitaires et par l'intégration en tant qu'ingénieur agronome à l'Office régionale de mise en valeur agricole du Tafilalet. Une équation qui lui permettait de joindre, dit-il, l'utile à l'agréable, ou de marier la passion de vivre pleinement et librement dans cette nature au savoir et savoir-faire local ancestral. Un avantage de taille qui fait toute la différence entre Hrou et les autres agents de développement qui foisonnent dans la région. Les populations, les acteurs associatifs, les agents d'autorité de Rich, Amellagou, Assoul, Outerbat, Aït Yahya, Tounfit, Anfgou et bien évidemment Imilchil le connaissent et le respectent. Ses coordonnées sont toujours la boussole de chercheurs en biodiversité ou de journalistes aussi bien marocains qu'étrangers, voulant réaliser des reportages dans cette région du pays. Hrou est incontournable dans ce terroir des Ait Hdiddou.
L'abnégation est sa devise. Rien ne l'arrête ainsi de parcourir, plus d'une fois par semaine, les 200 km reliant Errachidia, où il travaille, à Imilchil où il accompagne les projets de développement supervisés par son association "Adrar". Au fil d'inlassables efforts, il a pu impacter, par sa démarche et sa pédagogie d'implication et d'association, la vision des communautés de cette zone du royaume au développement. Fin connaisseur des parcours et pâturages, puisqu'il a déjà été berger lors de son enfance et lors des vacances scolaires, guide de randonnées pendant sa jeunesse, Hrou Aboucharif s'était facilement adapté aux nouveaux concepts de l'action associative qu'il met, d'ailleurs, en oeuvre de manière organisée depuis 1991. En groupe, Hrou épate souvent ses accompagnateurs à la faveur de son élan athlétique singulier, et les met à rude épreuve, en restant debout et dynamique, même après une longue et dure journée de marche. A quarante six ans, sa silhouette d'athlète est intacte. Au sein de son association, dont le local à Imilchil constitue une institution à part entière, Abouchrif est directeur de projets. Ses préférences méthodologiques pour les approches participative, d'intégration et du Genre, en matière de protection de l'environnement, sont soutenues d'une vision réaliste, dynamique et scientifique. Grâce à son intégration totale dans le milieu social (coutumes, traditions, langue...), sa forte expérience associative et son pré-requis scientifique, il arrive facilement à mobiliser les gens autour des projets initiés. Les femmes dynamiques dans plusieurs activités génératrices de revenus (AGR) dans la région ont totalement confiance en lui. Si tous les ingrédients étaient déjà réunis, le succès n'était possible que grâce à sa détermination, sa volonté et sa persévérance qui ont fait de lui cet agent de développement communautaire qu'il est maintenant. Il a ainsi mis en avant l'"Agdal", démarche de gestion traditionnelle des terrains de pâturage, qui permet de faire une rotation des parcours qui favorise la régénération naturelle des plantes pastorales, car la protection de la biodiversité passe par la sensibilisation, l'organisation de la population et la création d'autres richesses alternatives à même d'atténuer le faix que subit l'espace naturel, mais aussi par un courant de confiance entre le développeur et le développé. Né en 1964, Hrou Aboucharif est ingénieur agronome à l'Office régional de mise en valeur agricole du Tafilalet. Il est aussi directeur de projets à l'Association "Adrar".