C'est une année économiquement bien difficile que la Jordanie va clore dans quelques jours. Les indicateurs des divers secteurs d'activité étant peu rassurants, après un quinquennat faste marqué par une croissance soutenue et une amélioration notable du niveau de vie des citoyens. Par Jamal CHIBLI Cette conjoncture difficile allait précipiter une série de rebondissements politiques au cours des dernières semaines de 2009, avec la dissolution du Parlement, la démission du gouvernement, la formation d'un autre cabinet et la convocation d'élections législatives anticipées, dans une tentative de renverser la vapeur face aux effets ravageurs de la crise économique mondiale, qui ont commencé à se faire ressentir dans le pays durant le deuxième semestre 2009. Les pouvoirs publics avaient dès le début pris au sérieux les signes de fléchissement économique, tout en se montrant rassurants sur la santé de l'économie locale, qui subissait le contrecoup du ralentissement mondial. La Bourse d'Amman a été la première à donner l'alerte, en descendant, durant l'été, très en deçà de la barre symbolique de 2.500 points, pour la première fois depuis deux ans. L'inquiétude s'était alors emparée du marché local, qui voyait toutes les places de la région accuser, par ricochet, les déboires du système financier mondial. Ensuite, le gouvernement a assisté, impassible, à une cascade de mauvaises nouvelles. Une aggravation sans précédent du déficit budgétaire, un endettement public à la limite du tolérable selon les normes internationales, une chute drastique des investissements étrangers directs et un net recul de l'aide extérieure, particulièrement arabe, qui était d'un grand recours pour renflouer le budget de l'Etat. Qui plus est, le gouvernement a dû faire face à une fronde populaire à cause de l'effritement du pouvoir d'achat et de la flambée des prix, qui a atteint des niveaux record pendant le Ramadan, mois de grande consommation. Pour arrêter cette spirale, le Roi Abdallah II a dû intervenir en septembre 2009, pour demander la mise en place d'un "plan global d'urgence" afin de stopper le renchérissement et garantir l'approvisionnement des marchés à des prix accessibles. + Un départ annoncé + Ne cédant pas à l'abattement face à la série de nouvelles négatives, le gouvernement Nader Dahabi, que d'aucuns donnaient partant à maintes reprises, est reparti à l'offensive pour remettre l'économie sur les rails. Une politique de rigueur budgétaire a été annoncée, avec à terme l'objectif de réduire les dépenses publiques et satisfaire une population gagnée par l'inquiétude . Après la santé de l'économie, un autre sujet de préoccupation, de santé publique celui-là, va compliquer la situation du gouvernement. La grippe A/H1N1, apparue dans le pays à la mi-juin, va prendre une proportion inquiétante, la rumeur aidant, à partir du début du mois de septembre, qui coïncidait avec la rentrée des classes. Les ministres de la Santé et de l'Education étaient obligés de passer sur la télévision officielle pour apaiser l'opinion. Encore une fois, l'action du gouvernement a été pointée du doigt pour son déficit de communication et d'action. +Le gouvernement Dahabi jette l'éponge+ Le 9 décembre, deux semaines après la décision du souverain hachémite de dissoudre la Chambre des représentants, le gouvernement Dahabi va jeter l'éponge, en dépit de la bonne volonté affichée de remédier aux problèmes structurels dont pâtit l'économie nationale, particulièrement sa dépendance des dons étrangers et la frénésie dépensière aussi bien des autorités que des citoyens. Cinq jours plus tard, un nouveau cabinet présidé par Samir Rifai va prêter serment devant le Roi Abdallah II. En plus des réformes économiques devenues impératives, le nouveau gouvernement doit se pencher sur le parachèvement du projet de décentralisation et l'organisation d'élections législatives anticipées, sur la base d'un nouveau code électoral. Celles-ci, qui devaient constitutionnellement se tenir 4 mois après la dissolution du Parlement, ont été reportées sine die suite à une recommandation du gouvernement démissionnaire, qui a jugé impossible leur tenue dans les délais impartis. En tournant le chapitre de l'année 2009, la Jordanie en aura tiré les enseignements nécessaires pour repartir sur des bases plus solides en s'armant de réalisme et de patience, en ne s'appuyant davantage sur ses propres moyens et en mettant en place un modèle économique en adéquation avec les potentialités réelles du pays. La voie semble toute tracée pour une approche pragmatique de gestion des réalités et des contraintes du pays.