L'écrivain et psychiatre Rita El Khayat, une femme de feu, qui n'y va pas de main morte lorsqu'elle se penche sur la pénombre de l'âme des femmes, a publié un nouvel ouvrage sur la condition féminine mais ayant trait cette fois-ci à une thématique fort passionnante, la créativité artistique chez la femme arabe. Par Maria Laaroussi et Roukane El Ghissassi Intitulé "la femme artiste dans le monde arabe", cet ouvrage apetissant et d'une écriture acérée et ciselée, a été présenté mardi matin dans le cadre de la 5-ème édition du festival international du film de femmes de Salé qui a ouvert ses portes la veille. Cet écrit a requis de son auteure, médecin-psychiatre-psychanalyste de formation, un travail de titan. Alliant le profane et le sacré chez la femme, le nombre de sujets examinés dans ce livre paru aux éditions de Broca, vont de la femme qui écrit, en passant par celle qui chante et danse - en l'occurrence les cheikhats- à celle qui dessine et brode. Tout un éventail époustouflant de champs de la créativité féminine arabe que Rita El Khayat a enserré dans cet ouvrage, où règnent de très belles illustrations dignes des Beaux livres d'art, et où elle évoque sa prime enfance: "mon père quand j'étais petite m'interdisait de chanter et de danser. Vous avez toute latitude, vous les femmes, de le faire une fois au paradis", disait-il, a confié l'auteur sur un ton mi-amusé mi-sérieux. Passant outre ses interdits et ce statut de femme-objet, les femmes arabes ont su imposer leurs savoir-faire dans des domaines aussi variés que possible tout au long de l'histoire, et partant asseoir un travail rationnel et une créativité féconde et esthétique. Ces femmes devenant actives et entreprenantes, leur passé, leur présent, leur futur et même leurs amours leurs appartiennent aujourd'hui : " elles en sont maîtresses désormais", s'en réjouit Rita El Khayat. Leur culture, leurs us et coutumes, et traditions qu'elles n'ont pas occultés, mais qu'elles ont plutôt su faire fructifier, leur ont été d'un apport inestimable, pour créer et donner le meilleur d'elles mêmes dans divers champs de la créativité humaine, a-t-elle ajouté.
Ce livre, qui puise dans l'Egypte pharaonique, la Grèce et Rome, et qui devait être intitulé initialement "les femmes artistes arabes", a été changé et est devenu "la femme artiste dans le monde arabe. "Quoique castré et découpé, ce livre que je voudrai refaire intégralement, est à classer parmi les Œuvres orientalistes", a insisté l'écrivain. Réagissant, lors de cette présentation, aux idées largement galvaudées, "la jalousie et la compétitivité sont de mises entre les femmes" et "l'ennemi de la femme est la femme", Rita El Khayat n'a pas mâché ses mots en rétorquant "les femmes sont très conservatrices dans le monde arabe et développent ce que j'avais qualifié jadis de matriarcat de soubassement". Ses propos, qui peuvent déranger plus d'une, sont ceux d'une femme écrivain chercheuse qui ne parle pas en l'air. En effet, Rita El khayat a roulé sa bosse et ne lésine pas sur les moyens pour crier haut et fort ce qui ne va pas dans les sociétés arabes. S'exprimant en connaissance de cause, puisqu'elle a publié des ouvrages et articles sur les conditions féminines dans le monde arabo-islamique, cet auteur prolifique - 37 livres publiés dans les différentes catégories, essai, roman, la nouvelle, et la poésie - est non seulement anthropologue et spécialiste du monde arabe, mais est également professeur-universitaire et journaliste et femme de médias. Elle va présider, un jour, un festival de cinéma (3ème festival national du film de Meknès), elle va, un autre, être membre du jury du festival international du film de Marrakech (2008). Infatigable Rita El Khayat!