Le secteur du transport urbain à Rabat peine toujours à se mettre sur les rails, depuis la fin de la gestion du secteur par la Régie autonome de transport urbain et l'entrée en service de sociétés locales privées qui se trouvent dans l'incapacité de satisfaire la demande d'une région aussi vaste que celle de Rabat-Salé-Témara. Par Abdelmajid Chehboun En effet, la société Staréo, qui assurait la gestion du réseau d'autobus à Rabat, se trouve en état de faillite, les solutions avancées ne peuvent résoudre le problème du transport et restent en deçà des aspirations de la population des deux rives de Rabat-Salé. La gestion du secteur, les dysfonctionnements et non respect des clauses du cahier de charge tant au niveau de la qualité du service ou de la mise en application des programmes, sont autant d'éléments pointés du doigt par les usagers qui se sont rabattus sur le transport clandestin, un phénomène qui nuit à l'image de la capitale du Royaume. Staréo, société affiliée à Veolia Environnement, qui avait conclu en février 2009 un contrat d'une durée de 15 ans pour la gestion du secteur du transport urbain à Rabat, Salé Skhirat et Témara, s'était engagée à mettre en circulation près de 550 nouveaux bus, haut de gamme, en vue d'assurer le transport dans cette région. Mais, plusieurs élus de la ville de Rabat avaient, à maintes reprises, déploré son non respect des clauses du cahier de charges, dont le non renouvellement du parc autobus et le non règlement des problèmes du personnel. Délicate situation de Staréo Le vice-président du conseil de la ville de Rabat, Brahim Joummani, a indiqué que la situation actuelle du secteur du transport urbain est fort préoccupante et que seule la justice pourra trancher dans la prochaine étape, à cause des pertes financières de Staréo qui ont précipité sa faillite. L'échec de cette société, a-t-il confié à la MAP, est essentiellement à l'origine de sa négligence de son personnel, dont elle a licencié un grand nombre et gardé certains en contrepartie de salaires modestes. En vertu du contrat conclu entre la société et les services de la wilaya et du ministère de l'intérieur, Staréo s'est engagée à mettre en Œuvre un important programme d'investissement en matière d'achat de bus et de réalisations d'infrastructures, sans pour autant honorer ces engagements, a-t-il dit, précisant qu'elle a dépensé des montants colossaux au profit d'une minorité venue d'autres secteurs, et qui a bénéficié de salaires et d'indemnités énormes. Ces dépenses énormes, a-t-il expliqué, ne peuvent être supportées par un secteur aussi sensible qui exige plutôt la préservation de l'équilibre en matière de gestion. Au lieu de rénover son parc désuet, a-t-il insisté, la société a importé des véhicules d'occasion de l'étranger et continué à mettre en circulation ceux déjà existants, ce qui traduit, selon lui, l'absence d'un réel effort d'investissement. Pour justifier son échec, la société faisait état de concurrence déloyale de la part des taxis et des transporteurs clandestins, dans une tentative de désorienter l'opinion publique et de fuir ses responsabilités, a fait savoir M. Joummani. L'étude menée par l'entreprise a confirmé son échec dès le début, étant donné que le dossier de la gestion du transport public est du ressort de la commune, a rappelé le vice-président déplorant l'absence d'une véritable prise en compte de la réalité qui aurait exigé le règlement des questions juridiques. M. Joummani a ajouté que le Ministère de l'intérieur avait proposé aux communes de mettre en place une entreprise chargée de la gestion du transport public, en fonction du jugement qui sera prononcé par la justice et en prenant en compte la situation difficile que vit l'entreprise Staréo qui a du déposer un dossier de liquidation judiciaire. Staréo vit une situation financière critique qui mènera inéluctablement à sa faillite, étant donné qu'elle accuse des pertes mensuelles de 20 à 25 millions de Dirhams, et que cette situation risque d'empirer dans les conditions actuelles. L'autorité délégataire du transport public dans les villes de Rabat, Salé, Skhirat et Témara avait décidé, lors d'une réunion tenue le 13 avril dernier, de créer une société pour la gestion de ce secteur, en raison de la situation financière de Staréo qui n'était plus capable de continuer la gestion du transport public. Pour sa part, le secrétaire général de l'union locale fédérale de la Fédération démocratique du travail qui compte l'ensemble des employés de Staréo, M. Mohamed Bendaoud, a estimé que la situation actuelle du transport public à Rabat résulte de l'incapacité de cette entreprise de gérer ce secteur, se disant déçu du rendement de cette entreprise depuis la signature de la convention de délégation en 2009. Il reproche à l'entreprise qu'elle ait employé des personnes qui n'ont pas de compétences en matière de transport public et les violations des droits fondamentaux des employés, soulignant que même si Staréo a repris près de 3.200 ex-employés de 11 sociétés de transport urbain, elle n'en a pas moins refusé de payer les arriérés dus par leurs anciens employeurs, ce qui a poussé ces employés à enchainer les mouvements de protestation, bloquant ainsi la circulation dans la capitale et causant des désagréments énormes à la population. Pour ce dirigeant syndical, la liquidation judiciaire de l'entreprise doit prévoir des garanties pour la préservation des acquis des employés au regard des dettes considérables que Staréo doit aux banques. Par ailleurs, M. Bendaoud a déploré l'état chaotique du secteur du transport depuis 1986, relevant les salaires pharaoniques perçus par les cadres de Staréo qui, a-t-il affirmé, n'ont aucune expérience dans le domaine et connaissent mal les caractéristiques de la capitale outre le recours à des véhicules en piteux état. Concernant la proposition de créer une nouvelle entreprise locale, M. Bendaoud est d'avis que la priorité doit être accordée aux employés et aux intérêts de près de 3.600 agents, appelant à une évaluation complète de l'expérience de Staréo et à l'amélioration de la flotte.