Le Maroc célèbre ce dimanche le 78ème anniversaire de la bataille de Bougafer, lors de laquelle les tribus Ait Atta avaient infligé une cuisante défaite aux forces coloniales. Le 13 février 1933, les forces coloniales avaient mené leur première attaque contre les combattants des tribus Ait Atta, qui s'étaient repliés dans les montagnes de Bougafer. Profitant d'une position stratégique, difficile d'accès pour l'ennemi, les résistants se sont alors organisés pour assurer la défense et prendre d'assaut les positions des forces coloniales. En dépit de leurs armements sophistiqués, les forces coloniales avaient subi une cinglante défaite mémorable lors de cette opération. Commentant cet évènement historique, l'académicien français Henri Debordeau avait affirmé, à ce propos, que "les forces coloniales n'ont pas pu atteindre leur but car la résistance était non seulement acharnée mais encore hautement organisée". "Les combats étaient intenses et les forces coloniales avaient subi des pertes importantes", témoignait l'officier français, le capitaine Bournasel, peu de temps avant qu'il soit tué lors de la même bataille. Devant cette forte résistance, le courage et la ferme détermination dont ont fait montre les combattants marocains, les forces coloniales avaient été contraintes au repli. Dans cette attaque, l'armée française avait utilisé l'artillerie lourde et l'aviation pour bombarder les résistants marocains, dont le nombre ne dépassait pas 5.000 à Bougafer, femmes et enfants compris. Après d'intenses combats, les forces françaises ont réussi à encercler les combattants, leur interdisant ainsi toute communication avec l'extérieur mais, sans jamais parvenir à les faire plier. Parallèlement, et après la mort du capitaine Bournasel, les forces coloniales avaient poursuivi leur bombardement sans interruption de jour comme de nuit sur les pistes de ravitaillement des combattants, les abris utilisés, les rassemblements qui peuvent se former et les quelques points d'eau existant à l'intérieur du massif. La résistance est si acharnée que le général Huré, qui commande les troupes françaises au Maroc, décide de prendre, lui-même, en main le commandement de l'opération. "Aucune campagne coloniale, dans aucun pays, n'aurait pu briser une telle résistance de l'homme et du terrain", témoigne le romancier Henry Bordeaux. "Il fallait donc recourir à d'autres moyens pour réduire cet ennemi acharné dans son formidable bastion : le bombarder sans répit, jour et nuit, lui enlever les points d'eau, le resserrer dans son réduit et le contraindre à y demeurer avec son bétail mort, avec ses cadavres...". La bataille entre alors dans une nouvelle phase. L'artillerie coloniale commence à marteler la citadelle de jour et de nuit. Un déluge de feu se déchaîne sur elle de la terre et du ciel. Les résistants sont acculés mais ne cèdent pas. De toutes les guerres connues, la femme, en effet, n'a jamais joué un rôle aussi prééminent et admirable qu'à la guerre de Bougafer. Elle assurait les arrières, préparait les vivres et les munitions, soutenait et vivifiait la flamme des combattants et les encourageait par des youyous stridents que les échos des montagnes amplifiaient. Elles défiaient les mitrailleuses braquées sur les points d'eau en allant y remplir leurs cruches pour approvisionner les résistants. Beaucoup d'entre elles tombaient, mais d'autres arrivaient aussitôt pour prendre la relève. Après quarante deux jours d'enfer, les Français ont perdu 3.500 hommes dont 10 officiers. Les résistants, eux, ont perdu 1.300 combattants. Parmi les victimes, il y a beaucoup d'enfants, de femmes et de vieillards. Acculés, cernés, extenués par la faim et la soif, les résistants vont se rendre. Mais, malgré la situation difficile, voire intenable, la reddition ne se fera que par la négociation. Plusieurs cas de décès avaient été enregistrés chez les enfants et les vieillards, une situation qui n'avait pas pour autant pu infléchir le moral et le courage des résistants qui obligeaient l'armée coloniale à entrer en négociations avec le chef des combattants, Assou Ou Basslam, le 24 mars 1933. Un cessez-le feu a été ainsi décrété. Les résistants, qui ont accepté de déposer les armes, ont néanmoins posé leurs conditions, en exigeant notamment que les tribus Ait Atta soient administrées par l'un des leurs. Ce fut Assou Ou Basslam lui-même. L'honneur et la fierté des Aït Atta n'en sont que plus renforcés. A travers cet anniversaire, célébré chaque année par le peuple marocain en général et les populations de la province d'Ouarzazate en particulier, les tribus d'Ait Atta et avec elles la famille de la résistance veulent se remémorer de l'une des victoires marocaines sur les forces coloniales.