Dans pratiquement toutes les villes du Maroc, ces dernières semaines ont été marquées par un regain de tension, au niveau de la sécurité sur les chantiers du Bâtiment et des travaux publics (BTP). On risque d'avoir la faiblesse de Caione que nous serions à l'état de découvrir un fléau qui nargue les responsables depuis des années. Que d'actions énumérées. Que de stratégie annoncée. Pourtant la problématique de la sécurité sur les chantiers du BTP est toujours là. Nonobstant les promesses que la démarche est là à même de susciter, il n'en demeure pas moins qu'elle s'apparenterait à l'inextricable voire un réel danger de tous les jours qui menace, non seulement les ouvriers du chantier mais également les riverains et les citoyens de la rue. Et ce ne sont pas les exemples qui manquent en la circonstance. Le dernier triste incident survenu lundi dernier 23 avril 2018, à Casablanca au boulevard Lamaarif, à la rue Al Forat, à la suite de la chute d'une grue géante, et qui a fait un mort (le machiniste de la grue) et un autre ouvrier grièvement atteint, dont les deux jambes ont été amputées. Les statistiques officielles du ministère de l'emploi et des affaires sociales sont inquiétantes : 43.153 accidents mortels ont été enregistrés pour la période 2005-2014. Plus de 2000 morts sur les chantiers du BTP, selon les statistiques présentées lors du Salon Préventica qui s'est tenu du 11 au 14 avril 2017 à Casablanca. Sachant que ce secteur est gangréné par l'informel, il est tout à fait logique d'avancer sans tomber dans l'exagération, des chiffres plus élevés. En tout cas, une chose est sur, la sécurité sur les chantiers du bâtiment au Maroc inquiète sérieusement. Quelle en est la cause ? La Commission de sécurité de l'association professionnelle des cimentiers (APC), pointe elle du doigt le mauvais fonctionnement général de la santé et sécurité au travail (SST) qui reste la cause principale des accidents dans les chantiers. Cette réponse cache derrière elle une multitude de causes qui explique pourquoi le cri d'alarme est venu des professionnels du bâtiment eux-mêmes. Les raisons sont multiples mais on peut les limiter, de l'avis d'Anass Benchekroun, Expert architecte en BTP, à la méconnaissance des risques dans les chantiers. Le manque de contrôle réglementaire. Il y a aussi le manque de formation et le non application des règlements de sécurité. Même certains grands opérateurs de BTP qui disposent d'un certain savoir-faire en matière de SST ne l'appliquent pas. Pire, les professionnels en majorité optent pour des équipements de protection non conforme, donc de mauvaise qualité. Le cas aussi du montage de certains équipements lourds, tel que les grues. Or, pour que le système de SST soit efficace, toujours selon notre expert architecte, il est nécessaire voire obligatoire d'appliquer strictement le règlement en vigueur et de répandre les bonne pratique en matière de SST dans tous les chantiers du bâtiment et créer une culture de sécurité. Pourtant le cadre législatif marocain regorge de textes de lois. L'arsenal juridique existant offre un cadre réglementaire à même de limiter l'hémorragie, encore qu'il soit respecté et appliqué. Selon la loi 65-99 relative au code de travail et régissant tous les secteurs, l'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires afin de préserver la SST des travailleurs. Cette loi exige aussi l'information des salariés aux risques multiples et assurer leur couverture sociale et médicale contre les risques. En outre, l'article 93-08 de 2008 régit l'utilisation du matériel de premier secours dans les chantiers. Il exige aussi la nécessité de respecter les normes de sécurité, d'éclairage et d'hébergement dans les chantiers. Le secteur du BTP peut même s'enorgueillir d'avoir un texte de loi spécifique, il s'agit de l'arrêté 1952 qui régit l'usage du matériel utilisé dans les chantiers comme les passerelles et les échafaudages mécaniques reconnus. Encore faut-il mettre à niveau la législation marocaine relative au BTP en parfaite équation avec les acquis européens dans le secteur du BTP notamment les dispositions de la directive européenne 92/57/CEE du 24 juin 1992 concernant les prescriptions minimales de SST à mettre en œuvre sur les chantiers temporaire ou mobile conclu notre invité Anass Benchekroun, expert architecte en BTP qui affirme également que la chute de hauteur, la défaillance mécanique des engins et le non respect de formation des machinistes constitue la première cause IAT mortel. Mustapha CHABBAK