La décision prise début janvier 2016 par les trois opérateurs Maroc Télécom, Méditel et Inwi, à savoir le blocage des services VoiP, tels que Viber, Skype, WhatsApp et Facebook, n'a pas fait tarder Oxford Business Group (OBG) à publier, le 27 février, un rapport en la matière. « Après d'autres pays de la région, dont l'Egypte, le Sultanat d'Oman et les Emirats arabes unis, c'est au tour du Maroc d'interdire les plates-formes over-the-top (OTT) afin d'aider les opérateurs à doper leurs recettes moyennes par abonné. Cette décision s'inscrit dans le cadre d'efforts communs déployés par les autorités réglementaires et le secteur privé dans le but d'améliorer les perspectives de croissance », souligne le cabinet d'intelligence économique basé à Londres, ajoutant que cette décision a laissé néanmoins de nombreux abonnés mécontents. Ce qui est tout à fait normal puisque leurs principaux moyens de communication sont les réseaux sociaux (Facebook, WhatsApp...). En effet, selon les chiffres de l'ANRT (Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications), 92.8 % des Marocains détiennent un compte Facebook, 56.7 % utilisent l'application WhatsApp, 44.1 % possèdent un compte Google+ et 25.1 % sont sur Twitter. Environ 42.1 % Marocains se servent d'Internet pour téléphoner et plus de la moitié d'entre eux utilisent des services de messagerie instantanée. Citant l'ANRT, OBG explique que les applications bloquées ne s'accompagnaient pas des licences nécessaires et « ne remplissaient pas toutes les conditions requises pour être en conformité avec la réglementation en vigueur ». Compte tenu des défis rencontrés par les opérateurs de téléphonie au cours des dernières années, les initiatives visant à encourager le recours aux services nationaux (et non aux plates-formes OTT et VoIP) sont justifiées. En effet, la forte popularité des médias sociaux et des applications mobiles a des retombées sur les recettes et les volumes d'appels. Le volume d'appels internationaux qui engendrent d'importants profits a particulièrement chuté, alors que les Marocains sont de plus en plus nombreux à utiliser Internet pour effectuer gratuitement des appels audio et vidéo. « A long terme, le secteur des télécommunications devra faire face à une concurrence accrue des acteurs internationaux qui ne sont pas assujettis au droit marocain », déclare à OBG Azdine El Mountassir Billah, le directeur général de l'ANRT. Des revenus à la baisse, des solutions envisageables Le cabinet d'intelligence économique fait savoir, par ailleurs, que le Maroc n'est pas le seul pays de la région à connaître une baisse des revenus; les opérateurs et les autorités réglementaires doivent instaurer un climat d'innovation et de collaboration s'ils veulent relancer la croissance. De façon générale, le secteur des télécommunications marocain se porte bien et jouit d'une demande en constante augmentation. En témoigne, entre autres, la hausse de près de 15% en 2015 du nombre d'abonnés aux services de téléphonie mobile post payés. Malgré cette hausse du nombre d'abonnés, les recettes moyennes par minute ont chuté de 16 % en glissement annuel pour s'établir à 0.27 dirhams et cette tendance à la baisse se poursuit. Le secteur subit aussi, selon le DG de l'ANRT, de profondes transformations à l'échelle mondiale. « Au Maroc, nous sommes particulièrement préoccupés par le recul des recettes des opérateurs nationaux en raison d'un manque de nouvelles sources de revenus liées aux données. Cependant, le développement de l'infrastructure Internet offre encore de nombreuses opportunités », martèle-t-il. Selon lui, la priorité doit désormais consister à attirer de nouvelles sources de revenus afin d'aider les opérateurs à compenser des marges toujours plus minces. Conformément aux prévisions de l'ANRT, si le secteur accorde la priorité à la monétisation des services de données et au partage de l'infrastructure, il est sur la bonne voie pour inverser la tendance baissière des dernières années et franchir ainsi la barre des 34 milliards de dirhams de recettes d'ici 2018. Cet objectif pourra être atteint à condition que les autorités réglementaires dotent l'ensemble de la population des services mobiles à large bande (avec un débit de 2 mb/seconde) à l'horizon 2022.