Avec une population où les personnes de moins de 40 ans représentent plus de 62 % et celles de moins de 30 ans plus de 54 %, le Maroc bénéficie de l'aubaine d'une transition démographique particulièrement avancée. C'est ce que souligne, en tout cas, le Haut Commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi Alami, dans le préambule du rapport national sur la réalisation par le Maroc des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) et les perspectives des Objectifs du Développement Durable (ODD), dont le contenu est basé sur les plus récentes données du Recensement Général de la Population et de l'Habitat de 2014, de l'Enquête Nationale sur les Revenus et Dépenses des Ménages de 2006-2007 et des enquêtes et travaux sur la pauvreté et les inégalités sociales réalisés par le HCP au cours des trois dernières années. Sous l'effet de la baisse de la mortalité et de la fécondité, la forte diminution du poids relatif de la population âgée de moins de 15 ans, passant de 31,2 % en 2004 à 28 % en 2014 pour atteindre 20,9 % prévu en 2030, est une des sources de cette aubaine, explique M. Lahlimi. L'autre source procède, toujours selon le Haut Commissaire au Plan, de l'accroissement continu, jusqu'en 2030, de la population active âgée de 15 à 59 ans qui, par ailleurs, s'accompagne d'une baisse des effectifs âgés de 15 à 29 ans qui en constituent la matrice de reproduction. Malgré l'amélioration progressive du niveau de formation de cette tranche d'âge, l'offre d'emplois est demeurée plus accessible à la main-d'œuvre de faible et de moyen niveau d'instruction, excluante pour les techniciens supérieurs et les ingénieurs des grandes écoles et pénalisante pour les formations générales et les diplômes de haut niveau. C'est ainsi qu'en 2013 le taux de chômage varie de 2,3 % pour les personnes n'ayant jamais été scolarisées à 18,2 % pour celles ayant eu une scolarité de dix à douze ans. Cette situation ne s'améliore relativement qu'au-delà d'une durée de scolarité de dix-sept à dix-neuf ans avec, cependant, un taux de chômage de l'ordre de 16 %. Un tel niveau de valorisation d'une population active en pleine force de l'âge est d'autant plus préoccupant que de son niveau de productivité dépend la prise en charge du coût d'un vieillissement croissant de la population. L'espérance de vie à la naissance passant de 47 ans en 1960 à près de 75 ans en 2010, l'effectif des personnes âgées de 60 ans et plus devrait passer de près de 3,3 millions en 2014 à 6 millions en 2030 et à 10 millions en 2050. En donnant aux personnes âgées de 60 ans et plus un poids croissant dans la structure de la population, le phénomène du vieillissement prend dans une société jeune et peu salariée la dimension croissante d'un défi de nature économique et sociétal. L'effectivité de l'aubaine potentielle portée par la transition démographique en dividende effectif au profit du développement économique et humain est, ainsi, largement liée à la capacité du pays à réformer le système d'enseignement et de formation pour en résorber les déficits quantitatifs perdurant, en améliorer l'efficience interne et en habiliter les bénéficiaires à s'adapter à une demande de plus en plus exigeante du marché du travail. Néanmoins, pour M. Lahlimi, la réforme de l'enseignement, quelque nécessaire et urgente qu'elle soit, demeurerait insuffisante sans une offre nationale créatrice d'une valeur ajoutée croissante et pourvoyeuse d'emplois de qualité en mesure de valoriser les compétences acquises par une main-d'œuvre mieux formée. Aussi doit-elle s'inscrire dans le processus amorcé de la nécessaire restructuration des sources sectorielles et technologiques d'une compétitivité plus forte et durable de son économie. Le Haut Commissaire au Plan tient à noter, dans le même sillage, que l'éducation est un facteur déterminant de l'amélioration des revenus des individus et de lutte contre les inégalités. Ce qui n'est, malheureusement pas le cas actuellement puisque qu'au plan de l'insertion professionnelle, le nombre d'années de scolarité a aujourd'hui tendance à s'accompagner d'une hausse du chômage et de sa durée, notamment parmi la main-d'œuvre diplômée. Dans les domaines scientifiques et techniques, le taux de chômage augmente jusqu'à la 9 e année d'études pour atteindre 24,6 %. Au-delà de ce niveau, le taux de chômage baisse à mesure que le nombre d'années d'études augmente pour s'établir à 10 % à plus de 16 années d'études. Ce paradoxe trouve, comme susmentionné, son origine structurelle dans la faible diversification des secteurs à forte valeur ajoutée et pourvoyeurs d'emplois de qualité et de bonne rémunération en mesure de valoriser les compétences acquises par les ressources humaines disponibles. Le Maroc est ainsi appelé à réussir la promotion projetée d'un système d'enseignement et de formation performant anticipant les besoins d'une économie en voie de restructuration et réalisant par un haut niveau de rendement interne et externe la nécessaire adaptation de l'offre et de la demande de l'emploi en tant que facteur de durabilité de la croissance, de productivité et de renforcement de la cohésion sociale, estime le Haut Commissaire au Plan.