En pleine séance des questions à la Chambre des conseillers, retransmise en direct à la télévision, le chef de l'exécutif n'a pas hésité à savonner son ministre de l'éducation, Rachid Belmokhtar pour avoir adressé une circulaire aux directeurs des académies de l'éducation et de la formation (AREF) leur demandant d'introduire dès la rentrée prochaine, l'enseignement des mathématiques et des sciences physiques en français pour les deux dernières années de l'enseignement secondaire qualifiant. Une décision du ministre de l'éducation qui lui a valu les foudres de toutes les associations de défense de la langue arabe qui y voit une marche en arrière pour venir à bout de la politique d'arabisation lancée depuis des décennies dans le pays. Bref, à défaut de pouvoir continuer le projet en arabisant l'enseignement supérieur, déjà réussi dans plusieurs pays arabes, on a préféré revenir sur l'arabisation de l'enseignement scientifique au secondaire. Mais au-delà des positions des uns et des autres, ce qui a surpris tous les observateurs, c'est la posture du chef du gouvernement. Comment comprendre cet aveu difficilement concevable de ne pas être au courant de cette décision. Et quid de la cohérence gouvernementale. S'il est vrai que le statut des langues (officielle, nationale, étrangère, d'enseignement...) est une affaire purement politique, demandant un débat et un consensus national et non une simple procédure administratif par circulaire interposée, la réaction du chef de l'exécutif en public, humiliant l'un de ses ministres, est une posture aux conséquences graves. On se demande vraiment à quoi sert le conseil de gouvernement, sinon à aplanir ces difficultés et à donner une certaine cohérence à l'action gouvernemental. La question politique pour le moment, c'est quelle sera la réaction du ministre de l'éducation ? Pour le moment aucune décision de revenir sur la décision. La circulaire de l'introduction du français au qualifiant est, jusqu'à maintenant, toujours en cours d'exécution. Elle n'a pas été annulée. Et tout le monde se pose la même question. Et si le chef de l'exécutif n'a voulu que se dédouaner de cette décision dans son show, laissant au technocrate le choix de continuer dans sa voie ? Une posture qui nous rappelle les prises de décision concernant le bac international. A l'époque et contre toute attente, les responsables du chef du gouvernement se sont succédés pour dénoncer « une recolonisation linguistique » On s'est permis de stigmatiser de façon sournoise un projet élaboré et conçu sous la tutelle avec l'approbation du chef du gouvernement au moment de sa mise à exécution. La décision d'instaurer le BIMOF (Bac International Marocain Option Français) visait, selon tous les observateurs, à long terme, la remise en cause de la politique d'arabisation à laquelle on impute, à tort, tous les échecs du système éducatif marocain. Que s'est-il passé depuis ? Et bien la Bac international a été généralisé dans toutes les délégations. Aucune voix ne dénonce actuellement ce projet. L'enseignement des matières scientifiques en français dans le lycée, lancé actuellement, n'est qu'un chainon dans ce processus hélas...