La dernière décision du ministère de l'Intérieur d'annuler l'utilisation de la carte de l'électeur et d'adopter la Carte d'identité nationale (CIN) comme unique document de vote, lors du scrutin du 4 septembre, constitue un pas important dans le chemin du renforcement de la transparence et de la sécurité de l'opération électorale. De plus, au lieu d'attendre la réception de la carte de l'électeur, les électeurs et les électrices inscrits sur les listes électorales peuvent désormais s'informer sur les bureaux de vote en envoyant un sms gratuit au numéro 2727, accompagné uniquement du numéro de la CIN, en appelant gratuitement le numéro vert 2727 ou en téléchargeant l'application MonBV sur les smartphones. Cette décision est de nature à relever le taux de participation à l'opération électorale, tant au milieu urbain que rural, et de traiter la problématique de l'abstention au vote qui se pose avec acuité, sous prétexte de non réception des cartes d'électeurs. Cette décision du ministère de l'Intérieur permettra également aux électeurs et électrices de s'informer sur les bureaux de vote qui leur sont consacrés en s'adressant aux bureaux de renseignements mis en place aux niveaux des préfectures, provinces et des autorités administratives locales proches de leur lieu de résidence. Ces nouvelles dispositions vont toutes dans le sens du traitement des dysfonctionnements constatés auparavant en ce qui concerne la distribution de la carte d'électeur ou sa non réception, soit pour cause d'erreurs dans la transcription des noms de électeurs en question, ou de l'utilisation desdites cartes lors d'opérations de corruption électorale dans l'objectif de soutenir des candidats au dépend d'autres. Garantir le critère de l'intégrité Dans ce sens, Abdelaziz Keraki, professeur à la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Souissi-Rabat, considère que cette décision arrive à point nommé pour plusieurs raisons, notamment garantir le critère de l'intégrité de l'opération électorale qui représente une nécessité stratégique, ajoutant que les élections constituent le mécanisme idéal au renforcement de la démocratie, ce qui exige l'abolition de toutes les imperfections qui, par le passé, altéraient le bon déroulement de l'opération électorale. ‘'A l'évidence, des déviations à dessein d'influencer l'opération de vote avaient lieu quand la carte d'électeur était encore d'usage'', a indiqué M. Keraki, ajoutant que l'adoption unique de la CIN ‘'est à même d'harmoniser l'opération électorale avec les autres mesures adoptées en parallèle, car cette démarche repose sur l'opération d'inscription aux listes électorales, et il est de l'ordre du logique d'adopter la CIN comme unique pièce de vote puisque ce sont les données qui y figurent qui sont prises en compte lors de l'inscription sur les listes électorales''. Consécration de la logique participative Cette démarche arrêtera dorénavant les discours remettant en cause l'intégrité de l'opération électorale, poursuit l'académicien, tout en relevant que l'annulation de l'utilisation de la carte d'électeur le jour du scrutin et l'adoption de la CIN avant que la sortie du texte de loi y afférant représente ‘'une demande pressant formulée par les différentes forces politiques au Maroc, ce qui constitue une consécration de la logique participative dans la gestion de l'opération électorale dans notre pays''. Le professeur de sciences politiques à l'Université Cadi Ayyad à Marrakech, Mohamed El Ghali, va dans le même sens en indiquant, dans une déclaration similaire, que l'adoption de la CIN pour voter lors du jour du scrutin, conformément à l'article 20 de la loi organique N 59/11 relative à l'élection des membres des conseils des collectivités territoriales, ‘'renforcera la transparence de l'opération électorale, et libérera les électeurs de quelques pratiques répandues auparavant et qui impactaient sur la compétitivité électorale''. La mise en application de l'article 20 précité ‘'est en mesure de renforcer la crédibilité de l'opération électorale, sachant que la CIN est un document individuel et qu'il échoit à son détenteur uniquement de l'utiliser pour voter le jour du scrutin, contrairement aux cartes des électeurs dont l'opération de distribution était entachée de plusieurs dysfonctionnements par le passé, ce qui influençait négativement l'intégrité des échéances électorales'', a-t-il dit. Toutefois, tempère l'académicien, l'adoption de la décision du vote par la CIN seule le jour du scrutin ne peut être mise en application sans l'inscription préalable sur les listes électorales, laquelle inscription constitue une phase préliminaire essentielle à l'organisation des prochaines échéances électorales, conformément aux dispositions de la constitution qui stipulent, notamment, que les institutions représentatives au niveau territorial sont élues à travers le vote des membres des conseils communaux, régionaux, préfectoraux et provinciaux. Non-adoption de l'inscription automatique Si l'adoption de cette décision a été l'une des demandes les plus pressantes formulées par les partis politiques nationaux à plusieurs occasions dans l'objectif de renforcer la transparence de l'opération électorale, le maintien de l'inscription sur les listes électorales comme condition sine qua none au vote est justifié par plusieurs considérations. A cet égard, le ministre de l'Intérieur Mohamed Hassad, qui répondait aux questions des membres de la commission de l'Intérieur, des collectivités territoriales, de l'habitat et de la politique de la ville, dans le cadre de la présentation du projet de loi relatif à la révision des listes électorales générales, avait indiqué qu'il était ‘'difficile d'adopter l'inscription automatique des citoyens sur les listes électorales sur la base du registre de la Carte d'identité nationale (CIN)''. Cette difficulté réside essentiellement dans le fait que ce registre compte les porteurs d'armes, qui n'ont pas le droit de vote, les personnes inaptes juridiquement comme les prisonniers, ainsi que les émigrés et les personnes qui ont changé de domicile ou celles qui sont décédées et qui n'ont pas été enregistrées comme tel. La non-adoption de l'inscription automatique des citoyens sur les listes électorales sur la base du registre de la CIN n'est en aucun cas liée aux craintes du recul du taux de participation, mais plutôt aux difficultés déjà citées, avait noté le ministre.