Des jihadistes de Da'ech ont attaqué, lundi 23 février, deux villages chrétiens sous contrôle des forces kurdes, dans la région de Hassaké, à 200 km à l'est de Kobané, dans le nord-est de la Syrie, et ont enlevé 150 habitants. Des jihadistes de Da'ech ont enlevé plus de 150 chrétiens assyriens, notamment des femmes et des vieillards, dans des villages du nord-est de la Syrie, rapporte mardi le Conseil national des syriaques en Syrie. « Nous avons pu vérifier à partir de sources sur place qu'au moins 150 personnes ont été enlevées », a dit Bassam Ichak, président de cette organisation. Les combattants sont arrivés à bord de camions, faisant un nombre indéterminé de victimes et de personnes déplacées parmi la population civile, à prédominance chrétienne, de tradition syriaque. L'offensive menée sur ces villages se serait déroulée au petit matin. Plusieurs centaines de familles avaient pu fuir la zone à temps, pour échapper aux jihadistes. Mais les combattants de Da'ech se seraient emparés malgré tout de 90 otages. D'après le réseau d'entraide assyrien ADFA, les hommes auraient été séparés des femmes et des enfants et les combattants de Da'ech auraient proposé un échange de prisonniers aux combattants kurdes et les milices chrétiennes qui se battent à leurs côtés. Des dizaines de maisons ont été incendiées, ainsi que l'église de Tal Hermouz. Selon l'ONG « A demand for action » (ADFA) qui aide les populations assyro-chaldéennes, les femmes et les enfants ont été séparés des hommes, qui ont été emmenés dans les montagnes d'Abd al-Aziz. Les deux villes sont près de la ville de Tal Tamer, où d'intensifs affrontements ont récemment éclaté entre Da'ech et les combattants kurdes des Unités de protection du peuple (YPG). Des combats violents se poursuivent dans la zone. Les combats ont provoqué la fuite de plusieurs milliers de civils, qui se sont pour la plupart rendus vers le nord et vers les zones du Kurdistan syrien, qui se trouvent hors de portée des combattants jihadistes. Ce serait la première fois que Da'ech kidnappe un aussi important groupe de chrétiens en Syrie. En Irak voisin, l'organisation extrémiste a enlevé des milliers de soldats et membres de minorités, notamment des Yazidis. L'objectif de Da'ech serait d'étendre l'offensive aux villages alentour de la ville de Ras al-Ayn pour contrôler la frontière. La province d'Hassaké, riche en pétrole, est un verrou stratégique entre les territoires contrôlés par Da'ech en Syrie et en Irak. Cette province est divisée entre les forces kurdes et les jihadistes de Da'ech, avec une présence de l'armée loyaliste dans la ville éponyme. Quant aux chrétiens assyriens ou nestoriens, aussi très présents en Irak, il s'agit d'un courant du christianisme, condamné par le Concile d'Éphèse, en 431, en raison de divergences sur la nature du Christ. Dans la journée de mardi 24 février, L'Œuvre d'Orient, association française consacrée à l'aide aux chrétiens d'Orient, a fait part, par la voix de son directeur, Mgr Pascal Gollnisch, de son « angoisse » devant le kidnapping de chrétiens en Syrie par Da'ech, « après de durs combats ayant fait de nombreuses victimes ». Mgr Gollnisch appelle à porter dans la prière les hommes et les femmes touchés par ces événements. Le directeur de L'Œuvre d'Orient insiste sur « la responsabilité de la communauté internationale» et rappelle « l'urgence d'une neutralisation rapide de Da'ech en Syrie comme en Irak» « pour mettre fin à ce conflit qui a trop duré». Staffan De Mistura négocie un cessez-le-feu à Alep D'autre part, l'envoyé spécial de l'ONU pour la Syrie, Staffan De Mistura, est à Damas depuis lundi 23 février. De Mistura en est à sa quatrième visite dans ce pays. Depuis plusieurs mois, l'émissaire de l'ONU négocie un accord de cessez-le-feu qui prévoit l'arrêt des hostilités pendant un mois et demi dans certains quartiers d'Alep, deuxième plus grande ville de Syrie. Reste alors pour l'émissaire des Nations unies à convaincre le camp d'en face : l'opposition armée. Dans la foulée de sa visite syrienne, Staffan de Mistura se rendra à Istanbul pour rencontrer justement les représentants de l'opposition. En attendant sur le terrain les combats se poursuivent. A Alep, le régime a même lancé, la semaine dernière, une vaste offensive contre plusieurs villages et contre la partie est de la ville contrôlée par les rebelles. Les principales agences des Nations unies sont prêtes à entrer dans Alep «le jour même» où une trêve y sera décrétée pour apporter de l'aide à la population, a indiqué la directrice générale du Programme alimentaire mondial, Ertharin Cousin. «Nous avons échangé des mails tout le week-end avec l'Unicef, l'Organisation mondiale de la Santé, le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies (Ocha) ainsi qu'avec mes collègues du PAM au niveau régional et du pays pour préparer cette occasion, pour faire en sorte d'être prêts», a-t-elle expliqué. «Nous aurons une caravane de toutes les agences, avec nos partenaires (comme) le Croissant Rouge syrien, pour y entrer aussi vite que possible», a décrit Mme Cousin. L'ONU espère ensuite étendre cette trêve locale à d'autres zones et encourager ainsi un règlement politique du conflit qui a fait plus de 210.000 morts en quatre ans.