L'ambassadeur du Maroc à l'ONU, Omar Hilale, a affirmé jeudi, au siège des Nations Unies à New York, "l'obligation universelle" de s'opposer à toute violence antisémite, islamophobe ou christianophobe, ou visant les minorités religieuses, soulignant cependant qu'un tel combat demeurera "stérile" sans la reconnaissance de "l'indissociabilité de l'être humain et sa foi" car, on ne peut "promouvoir la liberté de religion et tolérer le blasphème des Prophètes". S'"opposer à toute violence antisémite, islamophobe ou christianophobe, ou visant les minorités religieuses, est une obligation universelle. Cependant, ce combat restera stérile tant que l'on ne reconnaîtra pas que l'être humain et sa foi sont indissociables. Sinon, comment expliquer le devoir de défendre l'Homme contre ces agressions abjectes tout en permettant l'irrespect de sa religion? Comment prétendre promouvoir le droit à la liberté de religion et tolérer le blasphème des Prophètes ? L'Homme et sa foi ne font qu'un", a-t-il déclaré lors d'une réunion de l'Assemblée Générale de l'ONU consacrée à l'antisémite. "L'intolérance religieuse, les stéréotypes négatifs et la stigmatisation des personnes sur la base de leurs religions ou leurs croyance sont devenus un fléau planétaire depuis le siècle dernier et s'est même exacerbée ces dernières années", a regretté l'ambassadeur pour qui l'antisémitisme, l'islamophobie, la christianophobie et la répression des minorités religieuses sont banalisés au quotidien, alimentés par le popularisme, la marginalisation, la crise économique et financière et le terrorisme obscurantiste. La "violence et le terrorisme quels qu'en soient les auteurs, les motivations et où qu'ils se produisent, sont condamnables. Dans ce contexte, nous rejetons toute violence ou agression antisémite où qu'elle se produise et quels qu'en soient les responsables", a-t-il martelé devant l'assistance composée notamment de ministres et d'ambassadeurs des 193 Etats membres des Nations Unies. "L'antisémitisme et la discrimination fondée sur la race ou la religion ne sauraient être tolérés au nom d'aucune religion. Toutes les religions révélées sont unanimes dans leur interdiction et leur aversion pour la violence et la négation de l'autre en raison de sa foi", a-t-il dit, insistant que l'Islam est une religion de paix, de tolérance et de concorde. " Notre Coran le proclame haut et fort : quiconque tuerait une personne non coupable d'un meurtre ou d'une corruption sur la terre, c'est comme s'il avait tué tous les hommes'. (Verset 32 de la Sourat Al Maidah -La Table Servie). De même que la religion chrétienne consacre le même interdit dans la Bible qui dit: "Vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens: Tu ne tueras point "(Bible en Matthieu 5.21). Le Judaïsme rejoint les deux autres religions dans leur ferme opposition à toute violence en son nom. Le 6ème commandement de la Torah ordonne sans ambiguïté: "Tu ne tueras pas", a-t-il souligné. Ainsi, a poursuivi M. Hilale, "aucune religion révélée n'appelle ni ne tolère la violence, le terrorisme ou la discrimination en son nom. Car la vie humaine est sacralisée dans tous les Livres révélés". Pour sa part, "l'Islam a toujours honni, de façon catégorique, toutes les formes de haine et d'intolérance religieuse". En effet, "notre Saint Coran stipule que : Dites : Nous croyons en Dieu, et à la révélation que le Seigneur a faite à Abraham, à Ismael, à Isaac, à Jacob, et aux Tribus, et à celle qu'Il a confiée à Moïse et à Jésus, et à tous les Prophètes, nous ne faisons pas de différence ente eux et nous nous inclinons devant Dieu dans l'allégeance et la soumission'.(Verset 136 de la Sourat Al Baqarah -La Vache-). Partant de cette "croyance dans le message universel de l'ensemble des prophètes, tout acte antisémite est un acte condamnable et devrait être combattu avec détermination. Bien plus, nous devons considérer toute agression antisémite comme une agression contre les autres religions du Livre. Toute violence antisémite est une violence assimilable à un acte islamophobe. Toute stigmatisation à l'égard d'une personne de confession juive devrait être considérée comme un acte anti-chrétien. Toute violence contre une religion est une violence contre tous les croyants, car nous sommes tous les descendants d'Abraham", a indiqué l'ambassadeur. C'est pourquoi, a-t-il dit, "les actes abominables commis dans l'épicerie Casher à Paris, au Nigéria par Boko Haram, en Syrie et en Irak par Daesh ou au Sahel et au Maghreb par Al-Qaida ne sauraient être liés, justifiés ou commis au nom de l'Islam". En revanche, "l'acte héroïque du malien Lassana Bathily qui a sauvé des vies juives dans cette épicerie Casher, représente ce que l'Islam a de plus noble: l'amour, la compassion, le respect et la défense de la vie et de la foi de l'autre". D'où l'impératif d'éviter tout l'amalgame entre une quelconque religion et le terrorisme, que l'on retrouve souvent dans les médias et parfois même dans les discours politiques, a-t-il insisté. Et de rappeler à l'assistance que la "profondeur des relations et de l'interdépendance entre le Judaïsme et l'Islam, l'enracinement et l'héritage commun de la tradition judéo-musulmane au Maroc sont des éléments fondateurs de l'identité culturelle plurielle du Maroc". En effet, a-t-il poursuivi, "c'est au Maroc que les juifs persécutés pendant l'Inquisition en Espagne, en 1492, ont trouvé refuge, protection et intégration". Aux "heures les plus sombres de la Deuxième Guerre mondiale, alors que l'Europe assistait impuissante et silencieuse à la déportation de millions d'hommes, de femmes et d'enfants en raison de leur religion juive, le Roi du Maroc a été le premier à s'élever contre ce crime contre l'humanité. L'histoire du 20ème siècle retiendra que Feu Sa Majesté Mohammed V avait eu le courage de dire non, avec force, au Régime de Vichy, en s'opposant à l'antisémitisme abject incarné dans le projet de déportation des citoyens marocains de confession juive vers les camps de concentration en Europe". Cette "opposition à la barbarie nazie procédait de la tradition séculaire de la Monarchie du Maroc, garante de la protection de tous ses citoyens, indépendamment de leur religion, musulmane, juive ou chrétienne. Cette tradition s'est perpétuée après l'indépendance du Maroc en 1956 et continue de constituer un des principes fondamentaux de son identité nationale", a déclaré le Représentant permanent. La Constitution marocaine de 2011 a confirmé dans son Préambule que l'unité nationale du Maroc est "forgée par la convergence de ses composantes arabo-islamique, amazighe et saharo-hassanie, s'est nourrie et enrichie de ses affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen", a rappelé l'ambassadeur. Pressentant déjà la montée de la violence antisémite à travers le monde et les dangers rampants de l'intolérance, de l'obscurantisme et du terrorisme, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a alerté la communauté internationale, en juin 2007, en ces termes: Le monde est aux prises avec le vacillement, voire la disparition des repères et des référentiels, marqué par la dépréciation et la perversion des valeurs religieuses et humaines et par le réveil des démons du fanatisme, de l'extrémisme, de la violence et du terrorisme, conjugué à la propagation des idées mystificatrices sur un prétendu choc de civilisations. Dans ce monde tourmenté, il est du devoir et de la responsabilité de toutes les puissances internationales, des intellectuels éclairés et des responsables des médias, de faire face aux dangers qui pèsent sur la paix, la sécurité et la stabilité régionale et internationale . Pour l'ambassadeur, le XXIème siècle devrait être celui de la coexistence de toutes les religions, de la tolérance, du respect, de la compréhension mutuelle, du dialogue interconfessionnel et interculturel et de l'éducation aux droits de l'Homme, afin de bannir à jamais la haine religieuse et toute agression contre les religions. Cette responsabilité n'incombe pas uniquement aux dirigeants politiques mais également aux chefs religieux, aux acteurs associatifs, aux medias, aux universitaires et aux enseignants ainsi qu'aux parents et aux familles. Car les enfants naissent sans haine. Ils devraient être éduqués de manière à les immuniser contre le virus de l'intolérance et du mépris. Et d'informer l'assistance que le Maroc projette d'organiser, conjointement avec l'ONU, en mars prochain dans la ville de Fès, un Forum sur le rôle des leaders religieux dans la prévention de l'incitation pouvant mener à des crimes d'atrocité. Ce forum s'appuiera sur le Plan d'action de Rabat sur l'interdiction de la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence . Initié par le Haut Commissariat aux Droits de l'Homme et élaboré par d'éminents experts en la matière, ce Plan d'Action, a-t-il conclu, "constitue un document de référence dans le domaine de la lutte contre l'incitation à la haine et à la violence, notamment religieuse".