Les élections en Afrique sont souvent perçues comme une malédiction qui s'abat sur la région puisque porteuses de violences qui écornent peu ou prou la légitimité du verdict des urnes, mais le Sénégal manie l'outil à bon escient et en fait un atout majeur pour forger l'image d'une démocratie stable. Sur tout le continent, le pays de la Téranga, comme ses habitants se plaisent à le surnommer, demeure presque le seul Etat où l'élection des responsables politiques n'a jamais souffert de putsch ou de changement brutal de régime et le scrutin de juin s'inscrit dans cette logique vertueuse. Ce constat conforte l'idée des analystes et des diplomates en mission à Dakar qui sont d'avis que l'élection du 29 juin était bel et bien l'événement ayant le plus marqué l'année qui vient de s'achever. A n'en point douter, ce vote servait de baromètre pour jauger la popularité d'une équipe gouvernementale aux commandes depuis plus de deux ans, mais surtout de moyen pour ajuster les mécanismes, les stratégies et les tactiques dans un contexte politico-économique en perpétuelle évolution. Les observateurs de la scène politique sénégalaise insistent tant sur le timing de ce vote qui a un caractère local avec un enjeu national car il s'agit d'un test en prélude de l'élection présidentielle de 2017. A travers cette élection locale, le pays a réussi un rééquilibrage maîtrisé des forces en présence et un renforcement mesuré de l'édifice démocratique, estiment-ils. Pour tirer les conséquences qui s'imposent, des mesures ont été prises au lendemain de cette échéance avec un remaniement ministériel en profondeur, un changement dans la continuité. Au Sénégal, le vote de la base est déterminant pour définir les politiques publiques. Le pays qui compte environ 13 millions d'habitants, a fait le choix de mettre en place des institutions représentatives qui tiennent compte des paramètres sociologique, culturel et cultuel en harmonie avec les intérêts des populations. Les dernières élections ont donc permis l'émergence d'une élite de conseillers voués à la chose publique pour résoudre l'épineuse problématique du secteur informel et booster la croissance économique du pays où les collectivités locales jouent un rôle central dans la gestion du domaine foncier, les ressources naturelles, l'éducation, la jeunesse et la culture. Et encore, c'est dire qu'après ce rendez-vous électoral, le Sénégal est sorti plus fort avec des institutions représentatives efficaces, des atouts qui le positionne en bonne posture pour partager son expérience démocratique avec d'autres pays africains où les violences font quotidiennement des pertes en vies humaines. Selon un fin connaisseur du microcosme politique sénégalais, l'expérience démocratique du pays de la Téranga se distingue par un dosage équilibré des différents ingrédients culturels et un attachement assumé aux traditions. La scène politique du pays est marquée par le poids des confréries religieuses dont les décisions des Khalifes sont très respectées. D'autres événements ont jalonné l'année 2014 surtout la qualification du Onze national à la CAN 2015, l'organisation du XVè sommet de la francophonie et le Magal de Touba qui a drainé, du 11 au 12 décembre, des millions de fidèles mourides. L'année qui vient de s'achever reste aussi marquée par le débat sur la durée du mandat présidentiel pour le ramener de 7 à 5 ans, une vision portée par la volonté du pays d'avancer vers le progrès. Comme l'a si bien souligné un analyste, le Sénégal a le devoir de prouver qu'il n'a nullement usurpé sa solide et bonne réputation de terre de paix, d'autant plus qu'il est un ilot de démocratie dans une Afrique traversée par des courants contraires. Une façon de dire que le pays sème aujourd'hui patiemment la bonne graine pour s'assurer demain une récolte prometteuse.