Après des responsables français et américains, c'est au tour d'un haut responsable chinois de se rendre en Afrique. En effet, le Premier ministre chinois, Li Keqiang, effectue en ce moment sa première tournée en Afrique depuis sa prise de fonctions en 2013. Une visite dans quatre pays d'Afrique (Ethiopie, Nigeria, Angola, Kenya) qui promet de donner un coup de pouce aux échanges culturels que promeut l'Institut Confucius dans la coopération Chine-Afrique, dit-on. Mais elle n'est pas que symbolique. Quatre pays en une semaine, la tournée de M. Li transmet trois nouveaux signaux sur le renforcement de la coopération sino-africaine. Le premier est relatif à l'idée du « développement inclusif », notion qui met l'accent sur le développement « vert et équilibré », évoquée à maintes reprises par M. Li dans son discours prononcé le 8 mai au Forum économique mondial sur l'Afrique, dans la capitale nigériane, Abuja. Dans ce cadre, la Chine s'engage à assurer la prise de responsabilité sociale de ses entreprises opérant en Afrique, renforcera la lutte contre le trafic de l'ivoire, et financera la protection de la diversité biologique du continent africain par un don de dix millions de dollars. Le second, quant à lui, concerne l'approfondissement de la coopération dans le domaine des infrastructures, l'un des fleurons de la coopération sino-africaine de ces dix dernières années. Ainsi, la Chine, en présentant le plan « trois réseaux » à Abuja, est prête à fournir de l'aide à l'Afrique dans le développement des réseaux de chemin de fer à grande vitesse, de routes express et de l'aviation régionale. Ce qui devrait contribuer à la réalisation du rêve d'unification de toute l'Afrique, ainsi qu'à l'amélioration des conditions de transport en faveur des millions d'habitants africains. Dans ce cadre, la Chine a signé à Nairobi un accord d'un montant de 3,8 milliards USD (2,8 milliards d'euros) pour la construction d'un axe ferroviaire devant relier le port kényan de Mombasa à Nairobi, et ensuite au reste de l'Afrique de l'Est, dont les travaux de construction vont démarrer en octobre prochain pour relier la plus grande ville économique de l'Afrique de l'Est avec Kampala, Kigali, Bujumbura et Juba. Aux termes de l'accord passé, en en présence du président kényan Uhuru Kenyatta, du président Paul Kagame du Rwanda, du président du Soudan du Sud -en guerre- Salva Kiir, du président de Tanzanie Jakaya Kikwete et de celui d'Ouganda Yoweri Museveni , la Exim Bank de Chine va prendre en charge à hauteur de 90 % le coût des travaux destinés à remplacer cet axe ferroviaire - datant de la période coloniale anglaise et d'une distance de 609,3 km - et le Kenya prendra en charge les 10 % restants. Enfin, le troisième signal de la Chine consiste en l'élargissement de l'aide pour l'Afrique, en consacrant plus de la moitié de son aide étrangère à ce continent, en augmentant ses prêts aux pays africains de dix milliards de dollars pour porter à 30 milliards le montant total promis, et en fournissant en cinq ans des formations à quelque deux mille techniciens et gestionnaires dans le domaine de l'agriculture. A rappeler, qu'en 2013, le commerce entre les deux parties a atteint 210,3 milliards de dollars, alors que ce chiffre n'était que de 250 millions de dollars en 1965. Parallèlement, les investissements directs chinois en Afrique ont dépassé les 25 milliards de dollars en 2013, et plus de 2.500 entreprises chinoises se sont installées sur le continent dans divers secteurs, créant au passage des dizaines de milliers d'emplois pour les habitants locaux. C'est dire, que les exploits précédents ont jeté une base solide dans la coopération sino-africaine, et les trois signaux transmis lors de la visite du Premier ministre chinois devraient élever ce partenariat à un niveau supérieur. Et ce, au profit de l'Afrique et de la Chine toutes deux à la fois. Mais c'est aussi un gage fort de la conquête du continent, par une économie chinoise florissante, longtemps considéré comme chasse gardée de l'Occident. La Chine s'est réveillée a-t-on tendance à dire. Non ?