A chacun son sport favori. Celui du prince Moulay Hicham serait l'évasion fiscale, selon un article publié, le 4 avril, sur un blog du journal électronique français «Mediapart». Spécialisé dans le déballage au grand public des affaires de fraudes et d'évasion fiscales, en s'étant particulièrement illustré dans les affaires Woerth-Bettencourt, en 2010, et Cahuzac, en 2013, «Mediapart» révèle que le prince, dit «rouge», est l'un des gros clients d'un cabinet d'avocat genevois, le cabinet Python & Peter. Ce dernier se serait taillé une réputation de bon conseil pour ses riches clients sur l'art de gruger le fisc des pays où ils sont contribuables. «Sa plaquette promotionnelle le présente sous les meilleurs atours : Clarence Peter, avocat d'affaires genevois spécialiste du private equity a conseillé aussi bien des investisseurs que des entrepreneurs de start-up. Son expertise fine lui permet de tailler un costume juridique adapté aux sociétés en phase de démarrage», écrit «Mediapart». Et d'ajouter : «Le cabinet Python & Peter est connu pour gérer dans la plus grande discrétion les affaires d'arbitrage sensibles entre Etats voyous (Iran et Israël par exemple) et entre multinationales aux dents longues. Mais lorsqu'il est sollicité par des grosses fortunes étrangères, c'est dans un but bien précis. Celui d'échapper au régime fiscal de leurs pays de résidence». Il est, en effet, des détails auxquels on ne fait attention qu'après coup, alors qu'ils auraient dû susciter, depuis bien longtemps, maintes interrogations. Qui irait créer une fondation, qui a officiellement pour «but de favoriser la recherche en sciences sociales sur l'Afrique du nord et le Moyen-Orient», dans un paradis fiscal ? Le prince «rouge» a, lui, par l'entremise du cabinet en question, installé le siège social de sa Fondation Moulay Hicham, non pas dans une ville réputée pour ses institutions universitaires ou ses centres de recherches, mais à Vaduz, au Liechtenstein. C'est une minuscule principauté sise au cœur de l'Europe qui, jusqu'en 2009, figurait encore sur la liste noire des paradis fiscaux de l'OCDE. L'auteur de l'article, Benoît Alphand, ne se prive pas en commentaire et en petits secrets: «Rien n'est trop beau pour satisfaire aux caprices du prince qui, en piètre businessman, recherche avant tout des moyens de faire des affaires logées dans des paradis fiscaux. Un credo qu'il affectionne, celui de ne payer que peu d'impôts même lorsqu'il s'agit de transactions au Maroc. En litige familial sur un terrain de 93 hectares dans la région de Rabat, Moulay Hicham souhaitait en effet déclarer, au moment de la séparation du bien, une valeur approchant les prix du marché afin de minimiser la plus-value qu'il réalisera lors d'une éventuelle cession, soumise à un impôt de 20 à 30%...». Prêcher la démocratie et les Droits humains, c'est gratifiant auprès des élites politiques occidentales gauchisantes et autres révolutionnaires en costards signés. Mais tenter d'échapper aux impôts, ce n'est, en effet, pas très valorisant... On se demande d'ailleurs qui est cet illuminé qui a accolé ce surnom de prince «rouge» au fortuné cousin du roi. Que devraient alors en penser les générations de prolétaires qui ont milité et se sont sacrifiés pour mieux nourrir leurs familles ? Son surnom de «comtesse rouge», c'est armes à la main que l'aristocrate irlandaise, Constance Markievicz, l'a mérité, en défendant ses idées révolutionnaires et nationalistes lors de l'insurrection de Pâques, à Dublin, en 1916. C'est incessamment que devrait paraître un ouvrage du prince Moulay Hicham intitulé «Le journal d'un Prince banni». Si seulement il savait à quel point les fortunes bâties au Maroc, avant d'être «bannies» du territoire national par leurs détenteurs, ont la nostalgie de la mère patrie qui les a vues naître et grandir et des Marocains qui ont participé à leur édification. Le prince Moulay Hicham n'aurait, d'ailleurs, qu'à demander l'avis de ses amis 20 févrieristes à ce sujet. Les diplômés chômeurs, en particulier, vont énormément apprécier de savoir que des capitaux princiers marocains «nagent» dans des piscines, dans les Émirats Arabes Unis (sachant à quel point ce pays souffre cruellement de manque d'investissements), ou sont au «vert» à profiter de massages thaïlandais. L'appel par contre claironné par le prince Moulay Hicham dans un entretien publié récemment par le journal «Le Monde», c'est celui de «la mise à mort du Maghzen (...) qui empêche le développement économique». Or, ce développement économique a justement besoin de capitaux, ceux cachés dans les paradis fiscaux, entre autres. L'exception tombée du carrosse La profondeur de l'analyse du Prince diplômé des prestigieuses universités américaines de Princeton et Stanford, est perceptible dans la réponse donnée à une question de la journaliste du Monde sur la non-réalisation de sa prédiction de chute de toutes les monarchies arabes, sous le souffle du cyclone dit «printanier», qui a balayé nombre de régimes républicains du Monde arabe. «Il n'y a pas d'exception marocaine, il y a un avantage monarchique. C'est un système qui n'est pas entièrement fermé : il y a des vannes et des soupapes. Mais je pense que les soupapes ne sont pas assez grandes pour évacuer la pression. Le changement de génération, de classe moyenne, la récession en Europe, sont autant de nouveaux paramètres». En quoi ces paramètres sont-ils nouveaux ? Le changement de génération est un processus démographique qui s'étale sur le long terme. Son caractère de tendance lourde fait, par ailleurs, qu'il est aisé d'en prévoir les traits les plus marquants. L'expansion quantitative de la classe moyenne est, d'ailleurs, l'une de conséquences de l'actuelle phase démographique que traverse le Maroc, parallèlement aux profondes transformations économiques et socioculturelles. Quand à la crise en Europe, elle a commencé en 2008. Ce qui est réellement difficile à évacuer, à la lecture de l'entretien du prince Moulay Hicham publié par «Le Monde», c'est cette forte impression de déni des réalités. «Tout ce que j'ai dit pendant des années trouve maintenant une actualité brûlante». Comme le présage de la chute des monarchies arabes, par exemple ? «La vraie exception, ce n'est pas le Maroc. La vraie exception du monde arabe, c'est la Tunisie, et ça le reste» ! Le prince veut sûrement parler de l'exception tunisienne dans le Maghreb, par le nombre très élevé de terroristes jihadistes partis guerroyer en Syrie, d'où ils reviennent ces derniers temps par milliers, initiés à la bonne pratique démocratique de l'égorgement. Et celui, non moins important, des tunisiennes qui ont goûté aux vertus émancipatrices du «Jihad nikah»... Encore plus exceptionnel est d'ailleurs le projet des charmants démocrates tunisiens de «Anssar Achariâ» revenus du Levant, de fonder une organisation terroriste regroupant tous les sympathiques jihadistes égorgeurs et kamikazes du Maghreb, sous la férule du très droit-de l'hommiste Etat Islamique en Irak et au Levant. «Beaucoup diront : "Vous êtes tombé du carrosse et vous cherchez à revenir", précise, à juste titre d'ailleurs, le prince Moulay Hicham, au cours de l'entretien précité. Non ? Pourtant, juste après, il ne manque pas d'affirmer : «On ne sait pas de quoi est fait l'avenir. Si l'occasion se présentait, j'apporterais ma contribution...» «Le printemps arabe n'a pas dit son dernier mot» avait souligné auparavant le prince Moulay Hicham dans un article paru, en février, au «Monde diplomatique». Que doit-on en conclure ?