Dans le cadre de ses missions consacrées, au titre de l'exercice 2012, aux dépenses des denier publics, la Cour des comptes de Tanger a procédé à l'examen de la gestion déléguée des services de collecte des déchets ménagers et assimilés, de nettoiement et d'exploitation de la décharge publique de la ville cette ville. Dans son rapport établi, à ce sujet,, cette institution rappelle que la commune urbaine de Tanger (Délégant) a, depuis janvier 2007, confié la gestion des services de collecte, d'évacuation, de nettoiement et de gestion de la décharge publique à la société «T», (Délégataire), pour une durée de sept ans au moyen du marché n°53/CUT/2006, ci-après dénommé Contrat, d'un montant initial global de 646.829.968,23 DH TTC, réparti à raison de 45.608.892,00 DH, pour le lot A (Gestion et exploitation de la décharge publique), 419.565.319,23DH, pour le lot B (Collecte et évacuation des déchets ménagers et assimilés), et 181.655.756,94 DH, pour le lot C (Nettoiement manuel et mécanique). Le coût prévisionnel unitaire moyen annuel des services de collecte et de mise en décharge avoisine 254,98 DH HT la tonne. Quant au coût prévisionnel unitaire moyen annuel pondéré du service de nettoiement, il s'élève à hauteur de 40.957,74 DH HT le jour. Les charges engagées par le Délégataire dans le cadre de la gestion déléguée ont augmenté à un rythme moyen annuel de 6,85%, en passant de 78,81 millions DH en 2007 à 102,73 millions DH en 2011. Elles se caractérisent par la dominance des charges de personnel, des charges d'amortissement des investissements mis en délégation, des frais divers de gestion, du coût de maîtrise, des charges de structure et des frais d'achat de carburant et lubrifiant. Le montant prévisionnel des investissements à mettre en place par le Délégataire tout au long de la durée du Contrat aux prix de l'année 2007 est de 90.652.476,60 DH, dont 13.616.421,60 concerne la reprise du matériel de l'ancien Délégataire. L'exploitation des trois services a donné lieu à un excédent net continu entre 2007 et 2011; il a culminé en 2008, avec 7,51 millions DH, s'est stabilisé en 2009 et 2010, puis a diminué au taux de 11,92 %. Le contrôle de la gestion déléguée susvisée a permis à la C.C. de relever plusieurs observations. Elle a ainsi noté que le délégant a conclu le contrat sans évaluation de l'ancienne gestion déléguée en vue d'en dégager les manquements à prendre en considération dans la conclusion de l'actuelle délégation et dans l'établissement du décompte de règlement. Hormis le fait que le nouveau contrat ne prévoit pas la reprise des employés de l'actuel Délégataire, les clauses relatives aux services de collecte, d'évacuation et de nettoiement sont pratiquement similaires à celles du contrat précédent. En plus de sa non-conformité avec les bonnes pratiques communément admises, qui prônent l'intégration de la dimension évaluative dans le management public, cette pratique enfreint la réglementation relative aux marchés publics qui prescrit l'évaluation et l'audit des marchés dépassant le seuil de 5 millions DH. La CC de Tanger a, de même, relevé l'absence d'études déterminant la consistance des prestations contractuelles et non actualisation des données de base du contrat Les quantités pluriannuelles des déchets sont déterminées dans l'article 7 du Contrat, sur la base d'une estimation de la population urbaine de Tanger, 710.800 habitants, et de la quantité des déchets produits par habitant et par jour en 2007, à raison de 0.75 kg/jour par habitant. De ce fait, Les quantités des déchets des années 2008-2013 ont été fixées sur la base de celles de 2007 ajustées par un taux de croissance bi-annuelle uniforme de +3% et un facteur de saisonnalité de +15% relatif à la période estivale. D'autre part, il a été constaté que le taux de projection de la production et le taux de saisonnalité n'obéissent à aucune base vérifiable. Leur détermination n'a fait l'objet d'aucun recensement réel des habitants, ni d'étude de l'évolution démographique spécifique à la ville de Tanger. Aussi, elle ne se réfère à aucune source officielle, tel que le Haut Commissariat au Plan. Absence d'un cadre stratégique de gestion des déchets L'application du taux d'accroissement moyen annuel intercensitaire de la population à la population légale de la ville de Tanger, recensée lors du dernier recensement général de la population et l'habitat de 2004, révèle que le Contrat sous-estime l'effectif des générateurs des déchets ménagers pour environ 168.282 habitants, soit l'équivalent de 46.131 tonnes de déchets (6.590 tonnes/jour). La production prévisionnelle des déchets n'a pas été actualisée en 2008 sur la base des statistiques extraites du pont bascule, et ce,contrairement aux stipulations de l'article 7 précité. Bien que la ville de Tanger fût l'objet d'une expérience pilote à travers le programme « PGPE3/GTZ », associant le département ministériel chargé de l'environnement et l'Agence allemande de coopération «GTZ», désignée par le ministère de l'Intérieur pour assurer des prestations d'assistance technique pour le compte du délégant, et qu'elle ait bénéficié d'un soutien technique et financier considérables, elle accuse des retards considérables par rapport à d'autres villes du Royaume en ce qui concerne la gestion de la chaîne des déchets. Le Délégant ne dispose pas de stratégie formalisée et validée. En fait, et contrairement à plusieurs provinces et préfectures du Royaume, la préfecture de rattachement ne dispose toujours pas d'un plan directeur préfectoral de gestion des déchets ménagers et assimilés, qui devait en principe encadrer le plan communal, prévu aux articles 16 et 17 de la loi n°28.00 relative à la gestion des déchets et à leur élimination. Ce plan devait être établi au plus tard vers fin 2011, comme prévu à l'article 10 de la même loi. De plus, le Délégant n'assure pas la gestion de toutes les composantes du service communal de gestion des déchets, tels que délimités à l'article 16 de la loi n°28.00 susvisée, notamment le tri sélectif, le traitement et la valorisation des déchets recyclables. Assurée au jour le jour, la gestion des déchets est réduite à son strict minimum. Elle consiste à collecter en vrac tous les déchets produits et les déverser à l'état brut dans la décharge publique.