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L'intégration, un investissement dans la sécurité et la résolution de conflits
Maghreb : C'est « l'heure de passer à l'action », constate la BAD Avantages: Economies d'échelle, accès aux marchés et gains d'efficacité et de productivité
Publié dans L'opinion le 17 - 07 - 2013

Plus de deux ans après le début du printemps arabe, l'Afrique du Nord reste confrontée au défi de transformer la transition politique en gains décisifs dans les domaines sociaux et économiques. En plus des difficultés que rencontre la région, le développement dans les pays voisins n'a pas été favorable. Au Sud, elle a subi les effets néfastes des insurrections armées et des conflits dans les pays du Sahel. Au Nord, l'Europe reste confrontée à la pire crise économique depuis des décennies. Bien que les développements dans la région diffèrent, les dernières années ont démontrées combien les pays de l'Afrique du Nord sont interdépendants et liés aux pays voisins, au nord comme au sud.
Dans le chapitre intitulé « L'intégration économique du Maghreb : l'heure de passer à l'action » qui figure dans son nouveau rapport « Le Groupe de la Banque africaine de développement en Afrique du Nord », cette institution considère que la transition politique vers une meilleure gouvernance et des sociétés plus participative en Afrique du Nord s'inscrira dans la durée. L'objectif prioritaire de la Banque Africaine de Développement est de répondre aux demandes d'un développement économique et social plus inclusif en appuyant les efforts des pays de la région. Dans un contexte où les turbulences externes et internes sont courantes, la résilience est la pierre angulaire dans la construction d'une plate-forme solide pour une croissance inclusive et une meilleure protection des personnes vulnérables. Ainsi, cette année, le thème principal du rapport annuel de l'Afrique Nord est la résilience - dans les stratégies nationales de développement, dans la sécurité alimentaire mais aussi dans la construction d'une intégration régionale plus solide.
Dans le chapitre consacré à l'intégration économique du Maghreb, la BAD « suggère que la situation post-révolutionnaire actuelle représente une opportunité historique pour les pays d'Afrique du Nord de réajuster leurs relations commerciales et financières et accélérer les efforts d'intégration économique aussi bien à l'échelle régionale que mondiale. Ce chapitre examine également les gains potentiels, les défis et les contraintes de l'intégration régionale. La mise en place des conditions nécessaires pour l'émergence de chaînes d'approvisionnement et de réseaux de production au niveau régional, conformément aux recommandations du rapport, permettra de libérer le potentiel économique de la région, de diversifier les exportations et de créer davantage d'emplois ».
La BAD examine l'état de l'intégration économique des pays du Maghreb dans le monde, le monde Arabe et au sein même du Maghreb. Il met l'accent sur le commerce des biens et services, sur l'intégration des infrastructures transfrontalières et évoque les avantages possibles et les obstacles majeurs à une plus large intégration.
L'objectif principal est de permettre aux décideurs dans les pays du Maghreb et à leurs partenaires de développement de multiplier les efforts envers une intégration rapide au Maghreb et au-delà de la région.
Le Maghreb : Un quart
de la population du monde
arabe,un sixième de son PIB
et moins de la moitié de celui
des Pays Bas
La sous-région du Maghreb représente environ un quart de la population du monde Arabe (89 millions d'habitants) et un sixième de son produit intérieur brut (378 milliards USD, soit légèrement moins de la moitié du PIB des Pays Bas) en 2011. La sous-région comprend cinq pays : l'Algérie, la Libye, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie. L'Algérie et le Maroc sont démographiquement les plus grands pays, représentant plus des trois quarts des habitants et du PIB de la région.
Les pays du Maghreb varient énormément en termes de ressources. Alors que l'Algérie et la Libye sont riches en ressources naturelles, les trois autres pays qui ne le sont pas autant disposent d'une main d'oeuvre abondante. Les principales ressources naturelles de la sous-région sont le pétrole, les minéraux métalliques et non métalliques et les produits de la pêche. Dans le cadre des ressources énergétiques renouvelables, le Maghreb pourrait être une source importante d'énergie solaire. Bien que la zone soit géographiquement assez étendue (plus de 70 % de la surface des Etats Unis), une forte proportion de la surface de la sous-région est désertique et par conséquent impropre a l'agriculture ; seuls le Maroc et la Tunisie jouissent de surfaces relativement importantes de terres arables et cultivées.
Comme dans le reste du monde Arabe, les pays du Maghreb sont confrontés à des défis majeurs de développement. Ces défis sont : une population jeune et en pleine expansion, un taux élevé de chômage des jeunes, une forte vulnérabilité aux chocs des prix et au changement climatique, une faible gouvernance et des secteurs publics inefficaces. La sous-région connaît actuellement des changements politiques significatifs à la suite du Printemps Arabe qui a déclenché une vague de protestations dans la région, exprimant les frustrations populaires à l'égard du manque d'emplois et de la mauvaise gouvernance. Les gouvernements de la sous-région sont sensibles à ces volontés de réformes et mettent en oeuvre des mesures visant à stimuler la création d'emplois, à rendre la croissance économique plus inclusive et à favoriser la participation populaire dans le processus du développement. Le Printemps Arabe impose la nécessité de dynamiser et intensifier immédiatement les efforts d'intégration régionale. A cet égard, le soutien de la communauté internationale est primordial, tel que ce fut énoncé dans l'Initiative de Deauville
Ce partenariat appelle les pays partenaires (Egypte, Jordanie, Libye, Maroc et Tunisie) à formuler des programmes des réformes économiques et de gouvernance qui permettraient d'améliorer la compétitivité nationale et promouvoir le commerce et l'IDE. En retour, les partenaires de Deauville (qui comprennent, en plus des Pays du G8, le Koweït, le Qatar, l'Arabie saoudite, la Turquie, les Émirats arabes unis, et les neuf institutions financières internationales et régionales) se sont engagés à soutenir les pays partenaires à atteindre leurs objectifs de transformation économique et politique à travers trois piliers stratégiques: la gouvernance, les finances et le commerce.
Opportunités et défis
de l'intégration économique
Il a été démontré dans la littérature économique et les études empiriques qu'en termes globaux, les avantages de l'intégration dans l'économie mondiale sont supérieurs à leurs coûts. La coopération régionale et l'intégration dans l'économie mondiale peuvent être considérées comme complémentaires, sachant que la coopération et l'intégration régionales ouvrent la voie à une plus large coopération mondiale de marchés et qu'en retour l'intégration avec des marchés plus importants hors-région contribue à élever les normes et créer des incitations en vue d'une plus grande intégration régionale.
L'intégration économique régionale peut engendrer un marché positif, assurer une plus grande efficacité et améliorer le bien-être à long terme. Tout d'abord, l'extension des marchés domestiques offre des opportunités
pour de plus grandes économies d'échelle et pour l'accès aux marchés, et peut ainsi conduire à des gains d'efficacité et de productivité. En second lieu, l'ouverture des marchés sur une base préférentielle peut aider les entreprises exportatrices à mieux connaître les conditions des marchés étrangers et à s'y adapter. En troisième lieu, l'intégration économique régionale peut contribuer à ancrer les réformes souhaitables, conduire à la bonne gouvernance et accélérer la transformation institutionnelle dans des secteurs tels que les procédures douanières, les règles et règlements et les normes de qualité des produits. En quatrième lieu, elle peut aider les petites économies à résoudre les problèmes structurels inhérents tels que les structures peu diversifiées, les frais généraux excessifs et la haute vulnérabilité aux chocs. Enfin, l'intégration régionale pourrait être perçue comme un investissement dans la sécurité et la résolution de conflits. Toutefois, l'intégration économique régionale implique que les pays membres auraient à renoncer à certains droits comme l'élaboration de normes et politiques propres ; ce que les dirigeants politiques dans les pays de la région pourraient avoir du mal à accepter. Si elle est mal gérée, l'intégration régionale peut favoriser l'inefficacité en détournant le commerce, renforçant le protectionnisme et décourageant l'intégration dans l'économie mondiale. Les coûts et les avantages de l'intégration économique ne sont pas les mêmes pour tous les pays arabes ; ce qui explique pourquoi les priorités de l'intégration économique dans la région sont variables. Pour renforcer l'intégration économique il ne s'agit pas seulement d'éliminer les barrières tarifaires et non tarifaires. Il s'agit d'intégrer et d'améliorer le transport, les infrastructures et la logistique commerciale, d'harmoniser les dispositions institutionnelles et les pratiques, et d'améliorer les politiques et règlements ‘behind the border' susceptibles de ralentir l'activité économique (tels que les politiques du taux de change, les réglementations financières et les principes de concurrence).
Les expériences de diverses régions du monde démontrent que l'évolution de l'intégration économique est directement liée à la volonté politique de soutenir les efforts d'intégration économique, à la réalisation de « victoires rapides » (« early successes ») et à la sensibilisation aux avantages de l'intégration économique. Les efforts d'intégration ont souvent réussi suite à un développement de réseaux nationaux de fournisseurs. C'est le cas de l'industrie automobile en Europe de l'Est et des secteurs de l'électronique, des ressources naturelles et de la pétrochimie de l'Asie orientale. Ces réseaux ont largement contribué à la réussite économique de ces régions. De tels réseaux transfrontaliers de production sont en mesure de tirer avantage des écarts de salaires et de ressources naturelles entre les pays, des distances réduites de transport et des économies d'échelle engendrées par la spécialisation.
Ces réseaux de production sont en évolution constante entre divers pays jouant divers rôles dans les chaînes de valeur, au fur et à mesure que les compétences et capacités nationales évoluent. En Asie par exemple, au fur et à mesure que les économies se sont intégrées par le biais du commerce, des flux financiers et de l'investissement direct, le commerce interrégional a évolué d'une façon telle que l'Asie entreprend autant d'échanges inter-continent que l'Europe et l'Amérique du Nord. Les retombées économiques de l'intégration de l'ASEAN (l'Association des Nations de l'Asie du Sud Est) qui avait démarré en 1967 et qui a progressivement évolué aussi bien en termes de pays que d'activités commerciales, ont été substantielles. La croissance commerciale de l'ASEAN a rapproché les pays riches des pays pauvres, a créé des réseaux régionaux de production puissants et une économie régionale dynamique. Cette collaboration transfrontalière comprend l'échange de matières premières et de pièces et composantes industrielles, la circulation de main d'oeuvre qualifiée et les investissements directs étrangers (IDE). Certaines études suggèrent que le commerce dans le monde Arabe et la sous-région du Maghreb est inférieur à son potentiel.
L'étude suggère que les gains globaux de la libéralisation du commerce des biens (y compris le retrait des mesures non tarifaires) pourraient atteindre au moins 350 $ US millions et devancent les gains de productivité comme conducteur principal. L'estimation est basée sur une simulation et comprend l'Egypte parmi les pays d'Afrique du Nord.
Les modèles de gravité utilisés pour estimer le potentiel commercial inter-pays en fonction du volume économique, de la distance géographique et d'autres caractéristiques nationales, concluent de façon systématique que le commerce dans la région MENA est inférieur à son potentiel. Les estimations continuent d'indiquer que les exportations représentent moins de 50% du potentiel et peuvent être de 75% inférieures au potentiel (Behar et Freund 2011; Diop et al. (2011). Un autre indice de l'évolution limitée de l'intégration économique est la faiblesse des flux d'IDE, notamment avant 2000. Les entrées nettes d'IDE dans le monde Arabe entre 1985 et 1999 ont stagnées, période durant laquelle les flux d'IDE comme pourcentage du PIB ont sextuplé dans la plupart des autres régions. Depuis 2000, les flux d'IDE ont considérablement augmenté à la suite du boom pétrolier du Golfe et des efforts pour améliorer l'environnement des affaires et accélérer les réformes structurelles et institutionnelles (Gourdon 2010).
Le régionalisme, forme la plus populaire du libéralisme commercial
Par ailleurs, il est de plus en plus affirmé qu'une intégration régionale effective au Maghreb et plus généralement dans le monde Arabe présente de potentiels avantages économiques intéressants. Une étude de la Banque Mondiale (Brenton et al. 2006) indique que le PIB par habitant en Algérie, au Maroc et en Tunisie devrait presque doubler entre 2005 et 2015 si une intégration régionale significative avait lieu. Casero et Seshan (2006) présentent une estimation des répercussions possibles des différents scénarios de l'intégration régionale au Maghreb sur la croissance globale du PIB sur une période de 10 ans (2005-2015). Leurs conclusions indiquent que les pays constitutifs de l'Union du Maghreb Arabe (UMA) tireraient des avantages économiques importants d'une intégration plus profonde et significative entre eux et avec l'UE. Une étude plus récente de la Banque Africaine de Développement (Santi, Ben Romdhane et Shaw 2012) indique que le manque d'intégration parmi les pays d'Afrique du Nord pourrait leur coûter jusqu'à 2 à 3 % du PIB. Une autre étude réalisée par la BAD (2012) indique que la Tunisie pourrait tirer de grands avantages de l'intégration avec la Libye à condition qu'un programme de réforme économique profonde, comprenant l'élimination des restrictions non commerciales, les investissements dans les infrastructures et la création d'une union douanière, soit établi. Enfin, Freund et Ornelas (2010) démontrent que la création, et non le détournement, d'échanges commerciaux est la norme dans
les accords régionaux de commerce. L'étude suggère que le régionalisme est devenu la forme la plus populaire du libéralisme commercial réciproque et devrait donc être intégré au multilatéralisme.
Impact des Accords Commerciaux Préférentiels (ACP)
Plusieurs accords bilatéraux et multilatéraux impliquent des pays du Maghreb. Les cinq pays du Maghreb sont à la fois membres de la Ligue des Etats Arabes, qui a toujours dirigé les efforts d'intégration dans la région, et membres fondateurs de l'UMA. La zone panarabe de libre échange (PAFTA), dont l'accord fut signé en 1997, comprend tous les pays de la zone à l'exception de la Mauritanie. Le Maroc et la Tunisie sont pays fondateurs de l'Accord de 2004 d'Agadir pour l'établissement d'une zone de libre échange. La Mauritanie a adhéré à la Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (CEN–SAD) en 2009, après s'être retirée de la Communauté Economique des Etats d'Afrique Occidentale (CEDAO) en 2001.
Trois pays du Maghreb ont signé des accords d'association avec l'UE (la Tunisie en 1995, le Maroc en 1996 et l'Algérie en 2002) et le Maroc a signé un accord de libre échange avec les Etats Unis en 2006. La Mauritanie, le Maroc et la Tunisie sont membres de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC).
Identifier l'impact des ACP est difficile étant donné le nombre de facteurs qui influencent le commerce et le flux d'investissement et qui, en pratique, échappent à tout contrôle. Cette section est donc destinée à aborder avec prudence et à percevoir comme une tentative de fournir des estimations qui ne sont en aucun cas définitives, sur la base d'un nombre de techniques qualitatives et quantitatives.
Plusieurs des accords interrégionaux entre les pays du Maghreb n'ont pas encore réalisé leurs promesses. Par exemple, l'UMA n'a pas encore réussi à créer l'union douanière d'Afrique du Nord ou le marché commun économique, envisagés lors de sa création. Loin de s'intensifier, le commerce entre les pays du Maghreb reste faible malgré les efforts de réforme. Par rapport à d'autres sous-régions dans le monde Arabe, le Maghreb reste à la traîne. En 2008- 2010, les exportations dans la région MENA n'ont représenté que 4,1 % du total des exportations du Maghreb, par rapport à 12 % au Mashreq (c'est-à-dire l'Iraq, la Jordanie, Le Liban et la Syrie), 6,2 % au Conseil de Coopération du Golfe (CCG) et 7 % dans le monde Arabe dans son ensemble.
La région Arabe a toutefois bénéficié des effets du PAFTA, qui a contribué à éliminer les droits de douane sur le commerce interrégional et encouragé les améliorations des procédures de dédouanement (voir Hoekma et Zarrouk 2006)57. Alors que l'équivalent tarifaire uniforme moyen de tous les tarifs (ad valorem et spécifique) imposé aux pays en dehors de PAFTA pour l'ensemble de la région MENA est passé d'environ 15% en 2002 à moins de 5 % en 2008-2009 au coeur de la crise économique mondiale (la région MENA est celle où les droits de douane ont le plus baissé durant la crise, notamment sur les produits manufacturés), il est resté élevé à environ 15 % pour les pays du Maghreb (Chauffour 2011).
De nombreux facteurs indiquent que les accords d'association avec l'UE et de libre échange avec les Etats Unis ont engendré une augmentation de la croissance commerciale de façon générale, mais caractérisée par des importations excédant les exportations (Rouis et Tabor, à paraître). Freund et Portugal-Perez (à paraître) utilisent un modèle de gravité pour évaluer l'impact des ACP de la région MENA sur les flux commerciaux en provenance et à destination des pays de MENA.
Leurs conclusions suggèrent que les préférences commerciales accordées aux pays MENA par les Etats Unis, l'UE et la Turquie n'ont pas d'effet supplémentaire sur les exportations par rapport aux ACP de façon générale. Toutefois il faut souligner que PAFTA et Agadir ont pour effet d'accroître les exportations de leurs membres – même s'il convient de préciser que cette expansion part d'une base très faible. Par ailleurs, au sein de PAFTA et Agadir, les résultats du modèle de gravité indiquent que les pays les mieux préparés à une concurrence régionale ont tendance à bénéficier des meilleurs gains de l'exportation grâce a leur participation aux ACP régionaux.
Les analyses d'impact des accords commerciaux préférentiels ne devraient pas se limiter à la seule performance commerciale mais inclure les avantages intéressants liés à ces accords. Les ACP sont recherchés pour divers motifs, au-delà de celui d'accès aux marchés. Les ACP les plus approfondis s'étendent aux règles et mesures relatives aux politiques de réglementations des frontières et au-delà, telles que la politique d'investissement, les marchés publiques et la propriété intellectuelle. D'après une étude de la Banque Mondiale (Chauffour et Kleimann, à paraître) qui a examiné 13 études de cas de divers pays du monde (y compris Egypte, Jordanie et Maroc de la région MENA), la mise en oeuvre des ACP pose un nombre de problèmes principalement liés à la capacité institutionnelle des pays et à leur politique économique. L'une des principales conclusions de l'étude est la nécessité de considérer les ACP comme des ‘instruments vivants' soumis à des ajustements continus, et de prévoir des mécanismes institutionnels de rétroaction.
Leçons tirées des autres blocs régionaux de commerce
Dans les pays de l'ASEAN, l'intégration était initialement une réponse à la crainte que l'Asie du Sud Est ne soit dépassée sur les marchés mondiaux par le rôle mondial croissant de la Chine. Elle s'est rapidement transformée en régionalisme ouvert lorsque les pays de la sous-région ont tenu à obtenir l'adhésion à l'OMC et à bénéficier de préférences dans les marchés mondiaux. Au fil des années, les flux de commerce et d'investissement ont évolué, rapprochant les pays riches et les pays pauvres de l'ASEAN et créant des réseaux régionaux solides de production. Cette évolution a engendré une économie régionale dynamique caractérisée par une collaboration transfrontalière avec des livraisons de matières premières et des échanges régionaux de pièces et composantes manufacturées, ainsi que des investissements et main d'oeuvre étrangers. Les gains de l'intégration d'ASEAN ont été significatifs, comme l'atteste l'augmentation de sept fois du rapport total commerce-PIB (de 20 % dans les années 1960 à une moyenne de 140 % au milieu des années 2000), dépassant de loin l'UE en tant que région la plus axée sur le commerce. Le commerce dans les pays de l'ASEAN est passé de 4 % du PIB à 35 % pendant la même période.
Le processus d'adhésion des pays d'Europe Centrale et de l'Europe de l'Est à l'UE permet également de tirer plusieurs leçons (voir, par exemple, Kaminski 2001). Tout d'abord, l'expansion du commerce extérieur et l'augmentation des flux d'IDE a été motivé en partie par l'aspect politique de cette intégration: le statut d'associé à l'UE a garanti aux pays entrants un accès préférentiel à la région et a doté les réformes de plus de crédibilité. En second lieu, il est possible d'expliquer les différences de résultats en termes de commerce et d'IDE entre les économies de transition par l'engagement et la profondeur des réformes
effectuées, notamment en ce qui concerne les institutions de commerce extérieur, les politiques et le climat des affaires. En troisième lieu, les pays qui ont attiré plus d'IDE l'ont fait en changeant le schéma de leurs exportations à l'UE, démontrant des niveaux plus avancés de production avec des entreprises qui intègrent des réseaux mondiaux de production et de marketing. En quatrième lieu, les pays qui ont réduit leur écart de revenu avec l'UE l'ont fait en mettant en place des politiques visant à accroitre les investissements, appuyer le développement du capital humain et promouvoir le cadre juridique, réglementaire et politique nécessaire au fonctionnement des mécanismes de marché. Enfin, les facteurs «behind the border» jouent un rôle important dans la détermination des flux commerciaux bilatéraux.


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