Le placement des enfants dans les centres de sauvegarde de l'enfance n'est pas conforme aux standards de la Convention internationale relative aux droits de l'Enfant (CDE), ni aux principes régissant la justice des mineurs, relève un rapport du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH). Selon ce rapport, présenté lundi lors d'une conférence de presse et ayant pour thème «Enfants dans les centres de sauvegarde : une enfance en danger...pour une politique de protection intégrée de l'enfant», l'analyse de la situation des enfants placés, basée sur les résultats de visites et entretiens réalisés par le CNDH du 15 au 29 novembre 2012 dans 17 centres, révèle qu'en matière de justice des mineurs, le placement en institution et la privation de liberté constituent souvent le premier recours. Les centres de sauvegarde de l'enfance (CSE) abritent des enfants dont les profils, les âges et les situations sont très variés, ce qui fait que les enfants en situation difficile (les enfants abandonnés et les enfants de la rue) partagent les mêmes espaces avec les enfants en conflit avec la loi, déplore le CNDH, notant que ce mélange ne permet pas une prise en charge adaptée et pose le problème de la protection des enfants vulnérables, notamment ceux âgés de moins 12 ans et les enfants en situation de handicap. Le rapport signale, par ailleurs, des disparités notables en termes de taux d'occupation entre les CSE, certains étant très faiblement occupés alors que d'autres sont surchargés, ce qui est notamment le cas pour les structures d'accueil dédiées aux filles qui ne sont qu'au nombre de cinq. A cela s'ajoute l'éloignement de plusieurs centres des lieux de résidence des enfants, ce qui rend difficiles le suivi judiciaire et le maintien des liens familiaux. Les centres en question ne sont pas régis par des normes conformes aux standards internationaux en matière d'accueil et de prise en charge des enfants, fait observer le rapport, ajoutant que les droits des enfants placés ne sont pas pleinement garantis, notamment les droits à la santé, à l'intégrité physique, à la protection contre toutes les formes de violence, d'abus et d'exploitation, à une rééducation appropriée et le droit d'être entendus, protégés et assistés légalement tout au long du processus judiciaire. D'autre part, le rapport fait état d'»importants acquis» engrangés en matière de justice des mineurs, notamment la mise en conformité des lois nationales avec les dispositions de la CDE, grâce aux réformes législatives initiées, en particulier celle du Code pénal et du Code de procédure pénale. Le CNDH salue, à cet égard, l'élévation de l'âge de la majorité pénale à 18 ans et la création du poste de juge d'application des peines spécialisé dans la justice des mineurs, estimant que ces réformes législatives constituent une véritable innovation en matière de protection des enfants en situation difficile. L'application effective des lois souffre, cependant, de nombreux dysfonctionnements dus au manque de moyens, de capacités et de supervision, ce qui entraîne fréquemment le recours au placement des enfants en institution, relève la même source, ajoutant que cette mesure, souvent injustifiée, peut parfois aller à l'encontre de l'intérêt supérieur de l'enfant. Au niveau institutionnel, le rapport note que, bien que les CSE soient placés sous la tutelle du ministère de la Jeunesse et des Sports, le ministère de la Justice et des Libertés joue un rôle de toute première importance dans la protection judiciaire des enfants en contact avec la loi et dans la prise de décision concernant leur placement. Tout en mettant l'accent sur l'apport considérable du secteur associatif en matière de protection et de prise en charge des enfants en contact avec la loi, le document fait observer que ce secteur fait face à de nombreuses difficultés, notamment en ce qui concerne la mise à disposition de ressources humaines et matérielles durables. En guise de conclusion, le CNDH estime que l'absence de politique globale de justice pour mineurs, les faibles capacités institutionnelles, le manque de clarification des rôles et des responsabilités ainsi que l'insuffisance de coordination entre les intervenants, ne concourent pas à une protection et à une prise en charge conformes à la législation et aux droits des enfants. Etant donné la situation préoccupante d'un grand nombre d'enfants placés en CSE, et afin de faire en sorte que ce placement respecte les dispositions de la convention internationale relative aux droits des enfants, le CNDH recommande, dans ce rapport, de finaliser rapidement les enquêtes familiales en attente, afin de permettre aux juges de revoir la décision de placement de certains enfants et d'examiner la possibilité de les réintégrer dans leurs familles. Il préconise, de même, l'organisation d'un colloque national sur les centres de sauvegarde de l'enfance, réunissant toutes les parties prenantes, afin d'élaborer une politique publique globale et intégrée pour la protection des droits des enfants.