La Chambre des représentants a approuvé mardi soir (mercredi matin à Paris) un accord entériné la veille par le Sénat, qui permet aux Etats-Unis d'éviter les 600 milliards de dollars de hausses d'impôts et de baisses des dépenses publiques du ‘mur budgétaire'. Son adoption est une victoire d'envergure pour Barack Obama, qui a été réélu en novembre après avoir promis de s'attaquer au déficit budgétaire en relevant les impôts sur les plus hauts revenus. Le camp républicain a quant à lui été contraint de donner son aval à un alourdissement de la fiscalité contraire à son credo. L'accord a en outre démontré que la Maison blanche était en mesure, pour le moment au moins, de sortir de l'impasse politique pour préserver une activité économique qui se remet à peine de sa plus grave crise depuis la grande dépression de 1929. La bataille budgétaire qui faisait rage depuis plusieurs mois n'a épargné ni les contribuables, ni les entreprises ni les marchés financiers. A l'annonce du vote de la Chambre des représentants, les Bourses asiatiques ont atteint des niveaux sans précédent depuis cinq mois et les Bourses européennes leur ont emboîté le pas en ouvrant en forte hausse mercredi matin. Wall Street devrait à son tour ouvrir en hausse sensible, après avoir déjà monté lundi dans l'espoir d'un compromis. L'accord permet certes d'écarter le spectre des 600 milliards de dollars de coupes budgétaires et de hausses d'impôts qui risquaient d'entrer automatiquement en vigueur, mais laisse entière la question du plafond de la dette, qui devrait donner lieu à une nouvelle passe d'armes dans les mois qui viennent. Le président, qui devrait rapidement ratifier le texte, a salué le compromis mais a souhaité que les négociations sur le sujet soient «un peu moins dramatiques». La Chambre des représentants, où les républicains sont majoritaires, s'est prononcée par 257 voix (contre 167) en faveur de cet accord qui prévoit notamment de réserver la hausse de l'impôt sur le revenu aux ménages qui gagnent plus de 450.000 dollars par an. Il élargit l'assurance chômage de longue durée à deux millions de personnes pendant une année, tandis que la réduction de 109 milliards de dollars du budget de la défense et de projets de politique intérieure, qui devait prendre effet mardi, est repoussée de deux mois. Alors que les Américains réveillonnaient, le Sénat, majoritairement démocrate, s'était prononcé par 89 voix contre huit dans la nuit de lundi à mardi, deux heures après la limite fixée pour l'entrée en vigueur des mesures regroupées sous le terme de ‘mur budgétaire'. Le lendemain à minuit, lorsqu'ils sont arrivés au Capitole, les députés républicains ont tenté d'amender l'accord, en proposant 330 milliards de dollars de coupes budgétaires supplémentaires, ce qui aurait donné lieu à un nouvel affrontement avec le Sénat. Pendant quelques heures, le mur budgétaire a de nouveau semblé inévitable, mais les élus conservateurs ont fini par jeter l'éponge après avoir fait le décompte de leurs voix. «Nous avons obtenu que les impôts n'augmentent pas pour 99% de nos compatriotes», s'est félicité David Dreier, élu républicain de Californie, faisant contre mauvaise fortune bon coeur. La crise a souligné la précarité de la situation de John Boehner, président de la Chambre, qui briguera un nouveau mandat jeudi, à l'ouverture de la nouvelle législature. Le chef de file des députés républicains a voté en faveur de l'accord mais ses troupes l'ont majoritairement rejeté, tout comme ses principaux lieutenants. John Boehner n'est pas parvenu à rassembler son camp pour contraindre Barack Obama à un «grand marchandage» sur la réforme de la fiscalité et la limitation de prestations sociales que le vieillissement de la population va alourdir considérablement dans les années qui viennent. Selon le Congressional Budget Office (CBO), organisme parlementaire équivalent à la Cour des comptes, l'accord, comparé aux mesures prévues par le mur budgétaire, va accroître le déficit budgétaire de près de 4.000 milliards de dollars (3.000 milliards d'euros) sur dix ans. Il permettra toutefois de réaliser une économie de 650 milliards sur la même période par rapport à la situation de lundi, d'après le Comité pour un budget fédéral responsable, organisme indépendant qui prônait une approche plus agressive du déficit.