Le mercredi prochain, 12 décembre, le tramway de Casablanca ne roulera pas à vide comme il le fait depuis des semaines à titre d'essai afin d'acclimater les Casablancais avec cette nouvelle machine de transport de masse. Il y aura bel et bien cette fois-ci des voyageurs à l'intérieur et une animation réelle dans les stations. Et puis, le tramway sera bien gardé contre les actes de vandalisme ou autres, car tout a été prévu pour les services de sécurité en vertu d'une convention avec la Sûreté nationale. Les écumeurs patentés de bus n'ont qu'à se tenir tranquilles. Casa Transport, promoteur du projet, aura tenu donc ses promesses quant au respect du délai de mise en service à partir de la journée du 12/12/2012, surprenante date qui sonne comme un anniversaire... Ici et là, il y a certes encore quelques travaux de finition toujours en cours. Jusqu'à jeudi vendredi, on mettait la dernière main à l'aménagement des agences commerciales du tramway où l'on vendra des cartes d'abonnement et autres services (renseignements et orientation). Des agences qui devaient normalement ouvrir depuis longtemps pour permettre d'informer et de préparer les usagers intéressés par ce mode de transport nouveau qui fonctionne par tickets électroniques. L'Etat et la Commune, grâce à une participation de 550 millions de dirhams, supportent une part du déficit de la gestion du tramway dont les travaux auraient coûté 5.900 millions de dirhams pour l'aménagement et l'équipement. En effet, cette participation publique permet, comme cela a été annoncé dernièrement, de fixer, pendant les cinq années à venir (2013-2017) que dure le contrat d'exploitation, le prix du trajet à 6 DH, l'abonnement de la semaine à 60 DH, l'abonnement mensuel à 250 Dh et l'abonnement mensuel pour élèves et étudiants à 150 Dh. Les fonctionnaires auront droit à une réduction de 30%. D'ici à l'horizon 2020, tout devrait être entrepris pour que le déplacement par transport en commun à Casablanca passe de 13% actuellement à 20% afin, dit-on, de diminuer l'utilisation de la voiture particulière au centre de la ville à laquelle on impute l'aggravation de l'engorgement de la circulation. Un cauchemar quotidien exacerbé pendant deux ans par les travaux du tramway. Pour ce problème épineux, les Casablancais ne verront pas de ci tôt le bout du tunnel avec la fin des travaux et la mise en service du tramway, du fait que cela est dû aussi aux poids lourds qui livrent des marchandises sans obéir à un horaire requis, à la saturation extrême de la circulation face à l'étroitesse des voies dégradées, au problème de stationnement dont souffre la ville depuis des décennies avec carences en parking etc. Un plan de circulation global devrait être mis en œuvre en 2013 pour prendre en compte tous ces paramètres. Une nouvelle ère néanmoins s'annonce pour le transport de masse à Dar Beida avec un projet qui promettra d'atteindre 250.000 voyageurs par jour en commençant d'abord par 170.000 voyageurs la première année, dans une ville qui compte plus de 4 millions d'habitants. D'emblée, Casa Transport annonce que ça ne sera pas la baguette magique pour les problèmes de transport et de circulation dans la métropole. On pense déjà à une autre ligne pour desservir le sud de la ville à partir du centre par boulevard Zerektouni. Et puis, il faudrait que les bus et les taxis se mettent à niveau pour relever le défi, ce qui n'est pas encore le cas à la veille de la mise en service du tramway. Comme on le sait, les usagers seront transportés sur une ligne de tramway de 31 kms traversant en une heure la ville d'Est en Ouest, de Sidi Moumen à Ain Diab et au quartier des Facultés à bord de 37 rames, chacune d'une longueur de 60 mètres, d'une capacité de 600 voyageurs dont 156 places assises et équipées de 12 portes de chaque côté. Le tramway aura une régularité de passage de dix minutes dans chacune des 48 stations que compte le trajet de 31 kms lequel sera effectué en 60 minutes avec une vitesse moyenne de 18 km/h. Casa Transport offre dans son site http://www.casatramway.ma depuis le lancement des travaux plus de détails sur les différents volets du projet. Casa-Tram est la société créée par le Consortium maroco-français constitué de la Régie autonome de transport de Paris (RATP) (40%), la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) (40%) et le holding Transinvest (20%). Il est adjudicateur du service d'exploitation et de maintenance du tramway en vertu d'un contrat avec Casa Transport, laquelle percevra directement les recettes journalières et payera Casa-Tram au kilomètre. La mise en service du tramway génèrera pas moins de quatre mille emplois directs dont deux mille directs. Pour les observateurs de l'évolution du transport de masse à Casablanca, le Tramway, au vu du développement effréné de la métropole du Maroc, est un projet tardif, depuis le temps que des réflexions sont tenues sur la nécessité d'un métro pour lequel des études avaient été menées. Les réflexions pour un transport de masse plus efficace et structurant avaient débuté après les événements de 1981, les émeutes du pain intervenues au milieu de la période de sécheresse la plus longue (1979 - 1984) avec l'accentuation de l'exode rural et la densification de l'habitat précaire sur la périphérie au sud de la ville, avant de se déplacer vers le sud-est ce qui allait devenir Sidi Moumen derrière l'ancienne décharge de Tit Mellil abandonnée vers 1986. Au lieu de métro ou tramway, une expérience de sociétés privées de transport par bus est lancée en 1985 aux côtés de la RATC en permanente difficulté et qui jouissait auparavant du monopole. Une décennie plus tard, c'est le début de la fin de l'expérience avec des transporteurs privés en faillite et incapables de renouveler leur parc fait de bus tas de ferrailles extrêmement polluants, au même titre que la RATC qui finit par céder la place à Mdina Bus à partir de 2004 et où aujourd'hui à peu près les mêmes actionnaires de Casa Tram siègent soit à la RATP, ou la CDG et Transinvest. Mais malgré la réalité du retard que nul ne peut nier, le projet du tramway constitue un véritable tournant pour une ville qui, depuis toujours, n'a eu qu'un seul mode de transport prépondérant qui est l'autobus. Le tramway est appelé à s'ériger en complémentarité avec le réseau de Mdina Bus. Encore faut-il que cette dernière se mette à niveau. Ce n'est pas encore le cas sur le terrain où le matériel roulant s'est dégradé dans bien des lignes. Jusqu'à présent, aucune information ou formation ne sont données au personnel à propos du partenariat entre Mdina Bus et Casa-Tram. Pour l'instant, il s'agit pour les voyageurs de s'acclimater avec les modalités modernes de transport basées sur des techniques de billetterie informatisés. Il est dit que le tramway est 15 fois moins polluant que la voiture. Il doit l'être encore davantage par rapport aux bus. Dans le passé, les axes importants de la ville étaient signalés par les lignes des bus comme pointant les directions de sa croissance tentaculaire. C'était le trolleybus au début qui signalait les premiers axes dès les années trente du siècle dernier pour la ligne 1 Place Nations Unies-Roches Noires, ligne 4 qui va de Place Verdun vers Derb Soltane par Route Médiouna (actuellement boulevard Mohammed VI) et Derb elKabir par la suite, ligne 8 vers Bourgogne. Il y eut par la suite l'axe place Maréchal – Maarif par la ligne 7. Fin des années soixante, les trolleybus sont supprimés. L'axe Oulad Ziane vers le sud de la ville prendra de l'importance. Desservi par la ligne 10 qui va vers Ben Msik, il s'imposera pendant longtemps comme une des grandes lignes avant d'être, pour ainsi dire, détrônée par des lignes qui s'imposent vers l'Est du côté d'Ain Sebaa et Bernoussi comme 33, 23 et vers l'Ouest (Hay Hassani et Oulfa et aujourd'hui Rahma) comme les lignes 19 et 35. Par rapport à ces lignes traditionnelles, le tracé de la ligne du Tramway est une innovation dans la mesure où il va d'une périphérie à une autre (de Anassi et Sidi Moumen à Hay Hassani et abords de Lissassfa) en passant par le vieux centre par l'intersection-jonction qu'est la place des Nations Unies entre la ville européenne et l'ancienne médina. Le vieux centre qui avait toujours détenu la majorité des terminus des lignes devient pour le tramway une gare, certes importante, mais de passage.