Le président intérimaire du Mali Dioncounda Traoré a de fait écarté le Premier ministre Cheick Modibo Diarra dans la gestion de la transition en réduisant ses attributions et en créant de nouveaux organes pour gérer la crise dans le nord du pays occupé par les islamistes, dans un discours dimanche. Dioncounda Traoré a annoncé la mise en place d'un Haut conseil d'Etat (HCE) dirigé par le président intérimaire, la formation d'un gouvernement d'union nationale avec des consultations qu'il va lui-même mener et d'une «commission aux négociations» avec les islamistes qui contrôlent depuis quatre mois le nord, dans ce discours retransmis sur la télévision publique malienne. Le HCE est destiné à «compléter l'architecture institutionnelle du pays». Il sera composé du président intérimaire qui sera assisté de deux vice-présidents dont l'un sera chargé des questions de défense et de sécurité et de la gestion de la crise dans le nord. L'autre vice-président va représenter les composantes des forces vives du Mali. Il a également annoncé un gouvernement d'union pour la formation duquel «les consultations seront menées par le président de la République lui-même» et non par le Premier ministre Diarra, en poste depuis le 17 avril et de plus en plus contesté par notamment un large front de partis politiques et syndicats qui lui reprochent de n'avoir «aucune stratégie» pour libérer le nord. Un gouvernement d'union nationale est une exigence des voisins ouest-africains qui avaient donné le 31 juillet comme délai pour le former. Il est reproché à M. Diarra, astrophyscien de renommée mondiale, qui a affirmé samedi soir qu'il ne démissionnerait pas, de n'avoir rien fait pour le mettre sur pied. Ce gouvernement d'union doit avoir la légitimité suffisante pour pouvoir lancer, avec le soutien de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), une contre-offensive dans le nord du pays occupé par les islamistes liés à Al-Qaïda au maghreb islamique (Aqmi). La Cédéao se tient prête à envoyer une force régionale pour aider l'armée malienne à reconquérir le Nord mais attend un mandat de l'ONU et une aide extérieure. Jusque là, le Conseil de sécurité s'est abstenu de donner un mandat à une telle force attendant plus de précisions sur ses contours et sa mission. M. Traoré a aussi évoqué la mise en place d'une «commission nationale aux négociations» chargée d'»engager des pourparlers de paix afin de rechercher par le dialogue des solutions négociées à la crise» dans le nord. Un conseil national de transition (CNT) «ayant une compétence consultative» et «regroupant les représentants des partis politiques présents ou non à l'Assemblée nationale» fait partie des organes annoncés par M. Traoré. Le président intérimaire malien est rentré vendredi soir à Bamako après une convalescence de deux mois à Paris à la suite d'une agression le 21 mai dans le capitale malienne par une foule hostile. Il a réaffirmé son «entière confiance aux services de sécurité et à l'armée malienne pour assurer la sécurité» malgré l'agression dont il a été victime et le coup d'Etat militaire du 22 mars contre le président Amadou Toumani Touré qui a précipité la chute du Nord aux mains des islamistes. Les militaires ont remis le pouvoir aux civils mais des hommes armés présumés proches de l'ex-junte militaire continuent de semer la terreur à Bamako. M. Traoré a outre indiqué que «ni le président, ni le Premier ministre, ni les ministres ne pourront se présenter à la prochaine élection présidentielle» au terme de la transition. «Le Mali ne s'effrondrera pas», a-t-il plusieurs fois martelé.