Jamais de mémoire de jdidi, une rencontre culturelle autour d'un quelconque auteur n'a pu drainer un public aussi nombreux, comme ce 22 février dernier. Et pour cause, l'invité n'était autre que l'écrivain originaire des terres doukkalis : Chouaib DOUIB. Une rencontre qui nous a permis de mieux découvrir « Brin de Paille », le Gavroche mazaganais haut en couleurs dans « Mirages ». Elle a permis à Chouaib DOUIB de nous faire pleinement sentir la douleur et les souffrances de son héros, à apprécier son courage lorsqu'il subira passivement les affres des adultes, sans jamais céder, ou quand il parviendra parfois à réussir la gageure de tourner ce calvaire en épopée. On aurait dit l'auteur en train de nous conter sa propre enfance. Les aventures et les intrigues aux issues problématiques et incertaines se succédaient dans les ruelles d'un Mazagan d'antan. Douib, pardon Brin de paille, se bat, certes désarmé, mais sans faire la moindre concession à ses détracteurs…ses bourreaux. L'auteur nous a rendu témoins de la victoire finale du gavroche : celle du bien sur le mal. Il a réussi à nous faire vivre à travers son récit, comment le cri de rage dans « Mirages », va se transformer en mélodie harmonieuse, en ode tonifiante incitant à l'amour et rejetant au loin la haine. Il semble s'être servi de Brin de paille comme un cinéaste se sert de son caméra, pour nous faire découvrir le Mazagan de son enfance : le jardin Spinny, les sables d'or de la plage de Deauville, la cité portugaise, le marché central, la place El Hansali (centre-ville), le port, le Théâtre, l'hôpital civil, le quartier mythique d'El Klaâ et de tous les monuments qu'il chérit…Bref un tour d'horizon à la découverte de ce joyau : El Jadida. Ce sont là autant de schèmes qu'il agite en tant que Mazaganais : la mémoire du Deauville marocain de Lyautey. Le panache et la candeur de Gavroche, le puritanisme de Brin de Paille et…d'un Chouaib (louveteau) DOUIB en personnage fascinant, qui avec une euphorie exaltée, a tendance à sourire de tout. Tel un Edmond Amran El Maleh, un Abderrahmane Mounif…Chouaib Douib, et pour des raisons qui lui sont personnelles, n'a jugé bon de publier son premier livre qu'après sa retraite. Cet ancien cadre dans l'armée de réserve, qui après avoir exercé plusieurs fonctions, opta pour l'enseignement en tant que conseiller pédagogique et formateur de cadres. Parmi ses publications, citons « la rencontre », dont il est co-auteur. Un livre paru en 2008. Traduit et enseigné par les portugais. Il a également écrit « Mirages » en 2009 et prochainement, la scène culturelle verra la parution de son ouvrage « Saga Douib ou le crépuscule d'une princesse ». Jean-Louis Morel écrivain et fabuliste français et dont les origines sont mazaganaises, dit de l'écriture de Douib , qu'elle est « chère payée » et qu'elle « tient le lecteur aux tripes ». Et s'il est vrai que de tout temps, El Jadida a été une cité féconde en littérature et qu'à chaque rencontre culturelle elle semble surprendre et par la plus agréable des manières, «Mirages » de Douib est un nouveau-né parmi la littérature maghrébine. Un livre qui, une fois ses toutes premières pages consommées, ne lâche plus son lecteur, avant qu'il ne s'arrête à son terme. Le style dans « Mirages » est ramassé et l'écriture compacte. Le verbe tel un article créateur, domine l'événement et le décrit esthétiquement. Tel un scaphandrier, il fouille dans les tréfonds abyssaux de l'auteur, pour nous remonter en surface une réalité douloureuse, parfois effrayante. Une réalité traduite par des images et décrite par des exemples d'adultes noyés dans le désarroi et le doute. « Mirages » est un ouvrage où la joie défie l'amertume. C'est le livre d'une certaine injustice sociale, celle des enfants sans réelle protection, face au monde sans pitié des adultes et de… la joute inégale. Au-delà de « Mirages » il y a bien un auteur réel à rencontrer et un écrivain à découvrir.