A partir de jeudi dernier, 1er mars 2012, la zone de libre-échange entre le Maroc et l'Union Européenne est devenue effective au terme d'un processus de démantèlement tarifaire progressif qui s'est étalé sur 12 ans, à partir de l'entrée en vigueur de l'accord d'association entre les deux parties le 1er mars 2000. Ainsi, à partir de jeudi dernier, les produits industriels en provenance de l'U.E. sont totalement exonérés des droits d'importation (DI) fixés jusque-là à un maximum de 3 % sur la valeur déclarée. Ces produits demeurent toutefois soumis à la TVA à l'importation, au taux de 20 % la taxe intérieure de consommation et à la taxe parafiscale à l'importation qui est de 0,25 % sur leur valeur. Les produits européens représentent 57 % de la valeur des importations du Maroc. La suppression des droits d'importation devrait se traduire par une baisse des opérations de dédouanement et bénéficiera, en premier lieu, aux produits utilisés dans l'industrie : matières plastiques et articles en cette matière, pâtes de bois, matières fibreuses cellulosiques, caoutchouc et ouvrages en cette matière, aluminium et articles en aluminium, cuivre et articles en cuivre. La suppression des DI est également profitable au consommateur sur lequel elle sera répercutée par les produits tels que les chaussures, articles de coiffure, produits céramiques, appareils d'éclairage électriques, articles de coutellerie, couverts de tables, articles en cuir, de sellerie, sacs à main, textiles, tapis, revêtement de sol, tissus, vêtements, instruments d'optique, de photographie. Appareils médico-chirurgicaux, produits de l'édition, de la presse et des industries graphiques sont également concernés. Les DI seront également supprimés sur les voitures de tourisme, les véhicules terrestres, tracteurs et cycles. La réforme tarifaire entreprise par le Maroc depuis 2009 en vue de réduire les écarts avec les droits d'importation sur les produits en provenance des pays autres que l'UE, et dont l'objectif est, entre autres, de parer à la fraude sur l'origine des produits importés, se traduire, elle aussi, par des baisses sur les droits d'importation de ces produits. Sont concernés les produits similaires à ceux fabriqués au Maroc avec des droits qui passent à 25 % (40 % en 2008 et 35 % en 2009 et 2010), les ouvrages en cuir, les vêtements, les réfrigérateurs, les véhicules industriels, les pneumatiques, la céramique, les ouvrages en acier et en fonte… Les demi-produits ainsi que les voitures de tourisme sont soumis au taux de 17,5 %. Les importateurs de voitures autres que celles en provenance d'Europe se sont groupés au sein du GIVET (Groupement de Véhicules pour l'Equité Tarifaire). Ce groupement a fait réaliser une étude d'impact du démantèlement tarifaire et sollicité des pouvoirs publics, en 2009, de reconsidérer le processus de démantèlement douanier pour les véhicules non européens « dans un sens équitable et profitable au citoyen marocain ». Le GIVET affirme que l'analyse du marché de l'automobile au Maroc « permet de révéler un niveau de croissance important du secteur durant les trois dernières années. Les perspectives de développement du secteur sur la période 2009-2012 s'avèrent très prometteuses avec un parc de 3 millions de véhicules en 2012. L'évolution récente des volumes de ventes des marques non européennes atteste d'un réel potentiel sur le marché national ». Ce marché reste cependant dominé par des marques européennes et cette situation est « vouée à se consolider avec la deuxième phase du démantèlement des droits d'importation sur les véhicules européens». En effet, avance le GIVET, les droits de douanes sur les véhicules en provenance de l'UE atteindront 0 % à l'horizon 2012. En revanche, les droits d'importation sur les véhicules non-européens demeurent élevés, atteignant 17,5% d'ici 2012. Et ce, malgré les efforts positifs des pouvoirs publics qui ont donné une visibilité appréciable via le nouveau processus de démantèlement des droits d'importation pour les importateurs de véhicules d'origine non-européenne dans la Loi de finances 2009. Le GIVET juge que ce démantèlement tarifaire inéquitable sera un véritable obstacle à la baisse des prix de véhicules et entravera la concurrence et la compétitivité entre les différents opérateurs du secteur. L'étude engagée par ce groupement a permis d'établir deux scénarii, à savoir que: 1- le processus de démantèlement actuel permet de rendre compte d'un désavantage net pour plus de la moitié des opérateurs du marché. 2- le scénario le plus consensuel révèle qu'un différentiel de 10 points au niveau des droits d'importation entre les importateurs de véhicules d'origine européenne et les importateurs de véhicules non européens. A partir des conclusions de l'étude d'impact, le GIVET a mis en avant un objectif qui s'articule autour de deux propositions: 1. Réduire le différentiel à l'immédiat des tarifs douaniers entre les véhicules importés d'Europe et hors Europe à 10 points, ce qui représente l'équivalent des droits d'importation appliqués par les Européens vis-à-vis des véhicules d'origine non européenne. 2. Maintenir ce différentiel de 10 points entre les tarifs douaniers des véhicules européens et ceux d'origine non européenne, tout au long du processus de démantèlement appliqué dans le cadre de l'accord de Libre Echange entre la Maroc et l'UE dans le secteur de l'automobile. Les concessionnaires des voitures d'origine européenne sont plutôt satisfaits de ce que d'aucuns appellent la manne procurée au secteur par la suppression des droits de douane sur les voitures importées de l'Union Européenne. Selon certaines estimations, 24 000 voitures importées montées ont été immatriculées au Maroc en 2009. Sur la base d'un prix moyen de 150 000 dh l'unité importée, le gain est estimé à 6000 dh par véhicule, soit une manne de 144 millions de dirhams et son équivalent de manque à gagner pour les caisses de l'Etat. Le consommateur va-t-il bénéficier réellement de la baisse des prix à l'importation des véhicules en provenance de l'U.E. ? Seulement dans le cas où les concessionnaires auront intérêt à répercuter la baisse des prix sur celui-ci, c'est-à-dire lorsque la concurrence et la nécessité de booster les ventes leur imposeraient cette répercussion des baisses. Sur certains segments où la concurrence est rude avec les véhicules asiatiques, le concessionnaire aura intérêt à répercuter la baisse des prix sur le consommateur. Cette baisse pourrait aussi être répercutée partiellement. C'est le scénario le plus probable en raison de la concurrence et de la situation sur le marché.