Dans le livre «Le Maghreb à travers les plantes»* de Jamal Bellakhdar, on peut lire: «Le cèdre est peut-être le symbole du Liban, mais pour voir la forêt de cèdre dans toute sa splendeur, il faut aller au Maroc ou en Algérie. C'est en effet dans les massif du Moyen Atlas, du Grand Atlas, du Rif, du Tazekka, du Djurdjura, de l'Ouarsenis, de la Kabylie et Aurès, entre 1400 et 2600 m d'altitude, que se rencontrent les plus belles cédraies du monde, là où les arbres peuvent atteindre 65 m de hauteur et occuper d'un seul tenant des milliers d'hectares (au total 132.000 ha au Maroc, 90.000 ha en Algérie). Dans ces belles forêts qui sont de véritables cathédrales, le promeneur se sent saisi d'un sentiment quasi religieux qui le pousse, malgré lui, à comparer la petitesse de son être au gigantisme de la nature, sa fragilité à l'impression de force tranquille qui émane de ces lieux, son angoisse existentielle à la sérénité du temps impassible qui s'écoule sans jamais s'arrêter»... En évoquant de vénérables cèdres, l'auteur cite des exemples de spécimens «aux troncs immenses atteignant 9 mètres de circonférence». Pourtant il y a des témoignages multiples sur la disparition au Moyen Atlas de cèdres géant au tronc beaucoup plus volumineux. Pendant tout le siècle passé, il y a eu un massacre énorme et systématique pour une forêt qui n'a cessé de reculer au fil des millénaires. Si on écoute les témoignages de la région de Khénifra on apprend qu'un massacre existe bel et bien profitant à beaucoup de monde dans l'impunité mais nullement aux habitants du lieu. Jamal Bellakhdar se fait écho des massacres de la forêt de cèdres marocaine, la plus grande au monde, qui est considéré patrimoine de l'humanité et qui a été grandement détruite surtout au cours du siècle passé. «Dans certaines montagnes reculées où la surveillante est défaillante en raison des difficultés d'accès, l'abattage clandestin des arbres a même transformé les forêts en cimetières dans lesquels les moignons de troncs restés, les branches pourrissant à terre et les souches décapitées laissent une impression de désolation aussi oppressante que la vue d'un champ de bataille après le massacre». Et puis, on apprend les bienfaits innombrables du cèdre, d'abord en servant grâce à son bois imputrescible pour des monuments historiques du 13ème siècle à Tlemcen, Biskra, Fès, Marrakech, «les plus belles portes des bâtiments religieux du Maghreb depuis les toutes premières dynasties, les vantaux des fenêtres, les lambris, les poutres, ... les plafonds délicatement ouvragés...» A ce propos, l'auteur conclut: «..tous ces ouvrages d'art, conçus pour traverser le temps sans dommages, n'ont pu parvenir jusqu'à nous que grâce aux qualités d'imputrescibilité et de résistance du bois de cèdre». D'autres bienfaits sont à relever comme l'huile essentielle du bois de cèdres et le goudron végétal. Le cèdre est, selon l'auteur, «le roi de la forêt, le gardien des derniers sanctuaires de la vie sauvage et le témoin silencieux du temps qui passe» * «Le Maghreb à travers les plantes» de Jamal Bellakhdar, éditions Le Fennec, Casablanca, (2003)