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France / présidentielle
Hollande à l'assaut du monde de la finance, Sarkozy vise le candidat socialiste
Publié dans L'opinion le 24 - 01 - 2012

Candidat autoproclamé de la justice, de l'égalité et de la jeunesse, chantre du «rêve français», François Hollande a fait dimanche de l'argent-roi le principal adversaire du quinquennat à venir, s'il est élu président le 6 mai prochain. Tandis-que Nicolas Sarkozy a multiplié le même jour à Cayenne les attaques contre le candidat socialiste à l'élection présidentielle qui prononçait au même moment au Bourget, à 7.000 km de là, son premier grand discours de campagne.
La lutte contre le monde de la finance a constitué le fil rouge du premier grand discours de campagne du candidat socialiste, qui a mis le cap à gauche, levé un peu de voile sur sa personnalité et mis en garde contre l'extrême droite.
«Je suis venu vous parler de la France», a-t-il déclaré au début d'un discours de près d'une heure et demie qui s'est terminé par une Marseillaise entonnée par une salle surchauffée.
En tout, quelque 20.000 personnes, dont les ténors socialistes et quelques «people» comme Yannick Noah, qui a chanté sur scène avant son discours, sont venus écouter le député de Corrèze en ce moment-clé de sa campagne.
Sans citer une seule fois son probable futur adversaire, Nicolas Sarkozy, François Hollande a fait de l'argent, et dans une moindre mesure de l'extrême droite, ses principales cibles.
«Je vais vous dire un secret : j'aime les gens, quand d'autres sont fascinés par l'argent», a-t-il déclaré dans ce discours dont ses proches assurent qu'il a été écrit de sa main.
Au bon souvenir d'Epinay
«Mon véritable adversaire, il n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature. Il ne sera jamais élu et pourtant il gouverne : cet adversaire, c'est le monde de la finance», a-t-il ajouté.
Des propos qui rappellent ceux du seul président socialiste de la Ve République, François Mitterrand, qui, lors du Congrès d'unification des socialistes à Epinay en juin 1971, avait prôné la rupture avec «toutes les puissances de l'argent, l'argent qui corrompt, l'argent qui achète, l'argent qui écrase, l'argent qui tue, l'argent qui ruine, l'argent qui pourrit jusqu'à la conscience des hommes».
Dans la crise, François Hollande s'est posé en «optimiste de la volonté». «Je ne promettrai que ce que je suis capable de tenir», a-t-il toutefois prévenu, prônant un discours de «vérité» cher à Pierre Mendès France, dont il s'est revendiqué.
«Je ne perdrai pas un seul instant du mandat qui me sera confié», a-t-il ajouté, rappelant que ses premières mesures de président viseraient le monde bancaire et la fiscalité.
«Dix ans de droite auront coûté aussi cher que tous les gouvernements réunis de la Ve République», a-t-il fait observer, fustigeant le quinquennat de la «dégradation».
Dans un discours résolument ancré à gauche, François Hollande a fustigé cette «finance qui a pris le contrôle de l'économie, de la société et même de nos vies», cette «emprise qui est devenue un empire» et «s'est affranchie de toute règle».
Le candidat PS, invité du 20 heures de TF1, a martelé qu'il voulait «vaincre la finance» expliquant ne «pas admettre» que les banques aujourd'hui «spéculent contre les Etats». Il a aussi promis, s'il est élu, une loi pour mettre fin aux stock-options «sauf pour les entreprises qui naissent».
«Comment peut-on accepter qu'il y ait autant de disparités entre les uns et les autres? Que ceux qui s'enrichissent en dormant laissent les autres, ceux qui travaillent, être dans la peine, être dans l'inquiétude?», a-t-il également déclaré.
François Hollande, qui devait s'en tenir à quelques idées générales, a multiplié les propositions précises avec des accents qui n'étaient pas sans rappeler les 110 propositions d'un autre candidat socialiste. En 1981 déjà, François Mitterrand promettait de protéger le franc «contre les manoeuvres spéculatives». Il ne manque plus désormais que le chiffrage de son programme présidentiel, promis pour jeudi.
Sur le fond, le candidat du PS a largement repris dimanche à son compte pour se l'approprier le projet économique de son parti, présenté en avril et qui portait la marque de Martine Aubry.
Une mesure aura valeur de symbole: le vote d'une loi sur la séparation des activités de crédit et spéculatives des banques dès les premiers mois de son mandat s'il est élu.
Les banques françaises seront également bannies des paradis fiscaux tandis que les «produits financiers toxiques» seront «purement et simplement interdits».
François Hollande a également promis une «véritable» taxe sur les transactions financières tout comme il a appelé à la création d'une «agence publique de notation» européenne.
Un pas tout de même en direction des marchés financiers pour les rassurer sans doute quand il a affirmé que «les disciplines sont nécessaires» et que les engagements de désendettement «devront être pris et respectés» tandis que ne sera «redistribué que ce que nous aurons créé».
Hollande dans le viseur de Sarkozy
A 7.000 km de là, et en même temps que lez discours du Bourget, Nicolas Sarkozy a multiplié à Cayenne les attaques contre le candidat socialiste à l'élection présidentielle, François Hollande.
Le chef de l'Etat, qui briguera probablement un second mandat, adressait ses vœux à la France d'Outre-mer et a paru, tout au long de son discours, ne pas envisager d'autre issue que sa réélection, bien que les sondages le donnent battu.
Sans jamais nommer François Hollande, il a invité les Français d'Outre-mer, qui représentent environ 4% de l'électorat, à ne pas faire confiance à un homme qui «dirait toujours oui, parce que ça cacherait quelque chose».
Il a qualifié d'»un peu folklorique» la visite d'une demi-journée effectuée lundi dernier par le candidat du PS à Cayenne.
Nicolas Sarkozy a défendu sa conception d'un «développement endogène» des départements et territoires d'Outre-mer (Dom-Tom), dans laquelle le dirigeant socialiste, qui prône un «développement solidaire», voit un désengagement de l'Etat.
Lors de sa récente tournée aux Antilles, François Hollande avait estimé que le mot «endogène» faisait penser à «indigène» - un jeu de mot dénoncé par le chef de l'Etat - «Il ne faut pas plaisanter avec ça», a-t-il dit.
Nicolas Sarkozy a également opposé sa vision d'un système d'incitation fiscale pour stimuler l'économie, auquel il dit ne pas vouloir toucher, à la conception, prêtée à la gauche, d'une politique de subventions directes.
Plus généralement, il a accusé la gauche d'ambiguïté envers les indépendantistes des Dom-Tom.
«J'appartiens à une famille politique qui n'a jamais considéré qu'il fallait accompagner les Outre-mer vers l'indépendance. Je n'ai jamais été l'allié d'un parti indépendantiste et je ne le serai jamais», a-t-il dit.
Le chef de l'Etat a longuement défendu sa politique envers les Dom-Tom mais s'est aussi attaché à «tracer des perspectives pour l'année qui vient», comme si la défaite, le 6 mai, était pour lui exclue. Un message qu'il s'est d'ailleurs efforcé de distiller tout au long de sa visite de deux jours en Guyane.
«Je suis là et je reviendrai encore», a-t-il ainsi déclaré samedi matin à des Amérindiens du Haut-Maroni.
«La Guyane, j'y viens très souvent et j'ai bien l'intention de continuer», a renchéri le soir, devant des gendarmes et des militaires, Nicolas Sarkozy, qui est venu six fois dans ce Dom en tant que ministre de l'Intérieur et chef de l'Etat.
Et d'annoncer dimanche qu'il irait dans l'Océan indien et à La Réunion «au premier semestre de cette année», sans préciser si ce serait pendant la campagne ou après l'élection.


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