François Hollande a si bien réussi sa percée qu'il est devenu aujourd'hui celui vers qui les socialistes seraient obligés de se retourner si la baudruche DSK se dégonfle au dernier moment. La plupart des éditorialistes doivent se triturer le clavier de regrets. Lorsque François Hollande s'était porté candidat aux primaires socialistes et donc à la présidentielle, il y a eu comme un hochement d'épaules généralisé : François Hollande à L'Elysée ? L'image contient une telle incongruité qu'elle faisait sourire, tant la candeur du candidat et l'image caricaturale qu'elle infusait dans les médias matchaient mal avec la majesté de la fonction et la solennité du décorum. C'est que malgré touts ses efforts, François Hollande éprouvait une difficulté manifeste à faire «sérieux». Son passage au poste de premier secrétaire du PS, servant en ami soumis le dominateur Lionel Jospin ou déroulant le tapis rouge à sa compagne Ségolène Royal pour les présidentielles de 2007, avaient fini par faire oublier la belle mécanique intellectuelle à l'ambition dévoreuse que cachait un corps menacé à l'époque par l'obésité. Le François Hollande d'aujourd'hui est méconnaissable. Non seulement la transformation visuelle force l'admiration parfois teintée de jalousie, mais l'homme est en train de venir incontournable dans la nouvelle équation socialiste dont les inconnus demeurent suspendus à la décision de Dominique Strass-Kahn, le favori dans les sondages. François Hollande vient de lever le voile sur ses propositions qui ne manquent pas de pertinence. François Hollande a si bien réussi sa percée qu'il est devenu aujourd'hui celui vers qui les socialistes seraient obligés de se retourner si la baudruche DSK se dégonfle au dernier moment. Cette situation enviable, François Hollande l'a gagnée à force de ténacité et de postures. Avant d'être celui qui se rêve en Barack Obama français avec des intonations à la Martin Luther King, empruntant le chemin d'un François Mitterrand, François Hollande avait adopté une stratégie qui lui garantit une permanente visibilité.Elle est composée de deux volets de communication bien distincts. Le premier est d'être le premier à pilonner, avec son verbe volontairement haché pour créer de l'effet, la gouvernance de Nicolas Sarkozy, le second est de profiter de toutes sortes d'actualités pour être dans la photo. Dernier exemple en date de cette politique: seul François Hollande s'est précipité récemment à l'hôtel Le Meurice pour y rencontrer le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et y affirmer son soutien à l'Etat palestinien indépendant dont la proclamation et la campagne de reconnaissance internationale culmineront en septembre prochain à l'ONU. Les critiques de François Hollande à Nicolas Sarkozy n'empêchent ni les ténors de la droite ni le président de la République de lui tresser des lauriers avec l'arrière-pensée de creuser le fossé et d'allumer davantage de feu au sein du PS. Nicolas Sarkozy ne rate aucune occasion de dire du bien de François Hollande ni de s'afficher avec lui. La photo ne manque d'ailleurs pas de sel. Nicolas Sarkozy valorise François Hollande au détriment de DSK et François Hollande se hisse symboliquement au niveau de la fonction présidentielle. La ligne de fracture entre Dominique Strauss-Kahn et François Hollande se situe à un niveau politique extrêmement délicat. Tandis que le premier, fort des sondages qui l'adulent, cherche une cooptation socialiste, ce qui explique le petit arrangement entre amis en cours de fabrication entre Martine Aubry et Laurent Fabius, le second tient au contraire à ce que la bataille des primaires soit menée jusqu'au bout, convaincu qu'au contact des militants la magie, DSK fonderait comme neige au soleil.