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Pour résoudre le dilemme du rééquilibrage budgétaire, l'essentiel est d'agir en temps opportun Ce que prône Christine Lagarde, Directrice générale du Fonds monétaire international, face au net regain d'incertitude
Dans les pays avancés, il est indéniablement nécessaire de rétablir la viabilité des finances publiques au moyen de plans d'assainissement crédibles A en juger par un commentaire de Christine Lagarde, Directrice générale du Fonds monétaire international, publié dans le Financial Times, « les turbulences qui agitent actuellement les marchés, en particulier le net regain d'incertitude, ont mis à mal la confiance dans toute l'économie mondiale et amené de nombreux observateurs à conclure que tous les moyens d'action ont été épuisés. Or cette vision des choses est erronée et pourrait conduire à la paralysie. Après l'éclatement de la crise à la fin de 2008, les responsables mondiaux ont uni leurs efforts dans un but commun. Leurs actions nous ont ainsi épargné une répétition de la Grande dépression des années 30, en soutenant la croissance, en s'attaquant à la sclérose des artères financières, en rejetant le protectionnisme et en fournissant des ressources au Fonds monétaire international. Le moment est venu de raviver cet esprit, non seulement pour conjurer tout risque de rechute, mais aussi pour mettre l'économie mondiale sur la voie d'une croissance robuste, soutenue et équilibrée. La situation d'aujourd'hui n'est pas la même qu'en 2008. À l'époque, l'incertitude était engendrée par la fragilité des établissements financiers. Aujourd'hui, elle tient aux doutes que suscite la santé financière des États et aux interactions pernicieuses que cela provoque avec le secteur bancaire. À l'époque, les autorités ont réagi à juste titre par un assouplissement sans précédent de la politique monétaire, une aide directe au secteur financier et une certaine dose de relance budgétaire. Aujourd'hui, les marges de manœuvre des autorités monétaires sont moins larges, il faudra de nouveau s'attaquer aux problèmes du secteur bancaire et la crise a laissé derrière elle des dettes publiques – qui ont augmenté en moyenne d'environ 30 points de produit intérieur brut dans les pays avancés. On le voit, il n'y a pas de réponse évidente. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes désarmés. Dans les pays avancés, il est indéniablement nécessaire de rétablir la viabilité des finances publiques au moyen de plans d'assainissement crédibles. En même temps, nous savons qu'un coup de frein trop brutal ne ferait que nuire à la reprise et aggraver la situation de l'emploi. L'ajustement budgétaire doit donc surmonter cet antagonisme en n'étant ni trop rapide, ni trop lent. Pour résoudre le dilemme du rééquilibrage budgétaire, l'essentiel est d'agir en temps opportun. Il faut poursuivre simultanément deux objectifs : assainissement à moyen terme et soutien à court terme de la croissance et de l'emploi. Cela peut paraître contradictoire, mais ces deux objectifs se renforcent mutuellement. Les décisions qui sont prises pour rééquilibrer à terme les finances publiques, en mettant en place les conditions d'une amélioration soutenue des comptes de l'État, créent à court terme un espace permettant de soutenir la croissance et l'emploi. De la même manière, pour être crédible, tout accord portant sur l'assainissement des finances publiques doit absolument s'accompagner à court terme de mesures de soutien à la croissance. Après tout, qui croira qu'un engagement de comprimer les dépenses résistera à une longue stagnation doublée d'un chômage élevé et d'un profond mécontentement social? Les marchés se laisseront-ils convaincre? Dans certains pays, ils semblent réclamer un ajustement budgétaire drastique. Et certains responsables ont décidé que telle était bien la voie à suivre. Mais dans de nombreux pays, ce serait faire fausse route que de se concentrer uniquement sur le court terme. N'oublions pas que les marchés peuvent être ambivalents : certes, ils n'aiment pas que la dette publique soit élevée, et ils applaudissent les mesures vigoureuses d'assainissement budgétaire, mais, comme on l'a vu la semaine dernière, ils aiment encore moins que la croissance soit faible ou négative. Naturellement, la place à donner aux mesures de court terme varie d'un pays à l'autre. Les pays fortement endettés soumis à la pression des marchés n'ont guère de latitude et doivent continuer à rééquilibrer leurs finances publiques. Mais dans d'autres pays, il est possible de ralentir le rythme de l'assainissement tout en soutenant la croissance. Les stratégies de réduction de la dette doivent s'appuyer sur des engagements concrets et effectifs, et non simplement sur des mots, mais il est possible de différer leur impact sur l'économie. Les pouvoirs publics peuvent ainsi agir là où des tensions se feront sentir demain, sans influer grandement sur la demande aujourd'hui – en procédant par exemple à la réforme des prestations sociales ou à la refonte de la fiscalité. En même temps, les mesures de court terme doivent à la fois accompagner la croissance et être économiques, c'est-à-dire ne pas remettre en cause la viabilité des finances publiques; les autorités peuvent ainsi soutenir la création d'emplois, accélérer la mise en œuvre des projets d'infrastructure déjà prévus et faciliter l'ajustement sur les marchés immobiliers. Les compressions de dépenses à elles seules ne suffiront pas – les recettes doivent aussi s'accroître et la priorité doit être donnée aux mesures qui influeront le moins sur la demande. Bien sûr, il y a bien plus à faire que simplement démêler l'écheveau du rééquilibrage budgétaire, ne serait-ce qu'appliquer la bonne politique monétaire – les taux d'intérêt doivent rester bas dans la plupart des pays avancés et les banques centrales des principales économies doivent se tenir prêtes à s'engager une fois encore en dehors des sentiers battus si le besoin s'en fait sentir. Il reste aussi essentiel de réparer le secteur financier : par la recapitalisation et la restructuration des banques viables et la fermeture de celles qui ne le sont pas – et en remédiant au manque de transparence qui imprègne les marchés financiers. Enfin, les réformes structurelles mettront du temps à produire leurs effets, mais les mesures visant à rehausser la productivité, la croissance et l'emploi doivent être engagées dès maintenant. Tout cela est-il faisable? L'idée que la conjoncture mondiale actuelle nous prive de tout moyen d'action est fausse. Comme en 2009, nous sommes parvenus à un point où les actions de tous les pays, chacun faisant ce qu'il est en mesure de faire, auront un effet global bien plus grand que les actions d'un petit nombre. Les priorités sont claires : des plans crédibles de rééquilibrage budgétaire à moyen terme, conjugués à la recherche énergique de toutes les mesures envisageables pour soutenir efficacement la croissance à court terme. Si la reprise mondiale fait long feu, personne n'échappera aux conséquences. Si les décideurs font preuve de détermination, agissent ensemble et dès maintenant conformément à ces priorités, alors la confiance pourra revenir et la reprise se poursuivre. »