Le Maroc a fait des progrès considérables en matière d'extension de l'offre éducative, pour faire face au double défi du rattrapage et de la croissance démographique. Tel est le constat l'OCDE dressé dans son nouveau rapport intitulé : « Stratégie de développement du climat des affaires au Maroc », présenté récemment à Rabat lors d'une conférence de presse. Au lendemain de son indépendance, poursuit la même source, la population estimée à 11 millions de personnes (1960), était très faiblement instruite. Le taux d'analphabétisme était supérieur à 80 %, le taux de scolarisation au cycle primaire était de 17 % (1956-57) et le système scolaire accueillait 366 000 élèves (1955-56). En l'espace de 50 ans, malgré la croissance démographique, le Maroc a pu améliorer considérablement ses indicateurs en éducation. Avec une population qui a presque triplé, le taux d'analphabétisme a été divisé par deux, le taux de scolarité en première année du primaire approche les 100 % et le taux net de scolarisation au cycle primaire atteint 93.8 % (2008-09). Le système scolaire accueille plus de 6.5 millions d'élèves en 2009. De plus, les pouvoirs publics marocains ont récemment redoublés d'efforts pour diversifier l'éducation et la formation professionnelle initiale et continue et les budgets alloués à l'éducation sont très importants. Cependant, des défis persistent. En 2008, 44 % des marocains étaient encore analphabètes et ce taux était de 29.1 % chez les 15-24 ans (Banque mondiale). Un million et demi d'enfants sous obligation scolaire sont toujours en dehors de l'école. Chez les 19-24 ans, seuls 11.5 % sont étudiants. L'alphabétisation des femmes issues de milieux défavorisés fait défaut. L'enseignement secondaire et supérieur est insuffisamment orienté vers les besoins du marché du travail et de l'économie moderne. Il y a donc une inadéquation entre les besoins des entreprises et les qualifications des demandeurs d'emploi. Ces problèmes sont en partie liés aux caractéristiques du système d'éducation et de formation (SEF) marocain. La première caractéristique a trait à l'existence de deux systèmes parallèles qui se juxtaposent : l'enseignement public qui offre une gratuité totale et l'enseignement privé qui fonctionne sans subvention, principalement en milieu urbain. La seconde caractéristique, c'est que le contraste est important entre l'enseignement général et l'enseignement professionnel. Le SEF a été construit sur le principe implicite de la primauté de l'enseignement général par rapport à l'enseignement professionnel. Cependant, ce positionnement normatif commence à être remis en cause sous l'effet conjugué de la crise que traverse l'enseignement général et du développement important que connaît l'enseignement professionnel. Ceci est particulièrement vrai au niveau de l'enseignement supérieur, où les filières universitaires à accès ouvert constituent un second choix par rapport à des filières d'enseignement professionnel (de niveau technicien ou technicien spécialisé). La troisième caractéristique est le manque de continuité linguistique entre les différentes composantes du système d'éducation et de formation. Cela constitue un facteur objectif de détérioration de la qualité des apprentissages. Alors que l'enseignement scolaire général (primaire et secondaire) est dispensé en langue arabe, l'enseignement professionnel et dans les filières techniques et/ou sélectives de l'enseignement supérieur se fait en langue française. Ce déphasage linguistique finit par créer une situation d'incertitude linguistique où le passage par le SEF ne permet pas à la majorité des lauréats d'acquérir un niveau de maîtrise suffisant d'une langue écrite. Autre caractéristique soulevée : Le cycle de la scolarité obligatoire prévu dans les textes n'est pas effectif. Les difficultés persistent notamment en milieu rural, particulièrement pour les filles, mais également pour les catégories de population à besoins spécifiques. Une autre caractéristique mentionnée a trait au déficit en éducation de base qui concerne une proportion non négligeable de la population âgée de 15 ans et plus. L'analphabétisme, comme forme extrême de ce déficit, touche plus de 42 % de cette population, avec une plus forte prévalence chez les femmes, notamment en milieu rural10. L'OCDE cite également le marché du travail qui présente une configuration segmentée avec un fort contraste entre l'emploi dans le secteur formel et l'emploi dans le secteur informel, créant ainsi deux trajectoires opposées d'insertion professionnelle. De plus, la formation professionnelle n'est pas suffisamment orientée vers l'inclusion sociale. Le système d'éducation et de formation (SEF) marocain se caractérise aussi par un système d'éducation et de formation marocain qui ne produit pas toujours les ressources humaines de qualité suffisante pour satisfaire les demandes en main d'oeuvre des employeurs et investisseurs. Ce déficit est particulièrement saillant pour les profils entrepreneuriaux. Pire, en matière d'enseignement de formation professionnelle, il existe des institutions et initiatives, mais elles ne sont pas coordonnées, ne se renforcent pas mutuellement et sont insuffisamment adaptées aux besoins du marché et à l'environnement des affaires. Enfin, l'OCDE fait savoir que les principaux déséquilibres du SEF sont reflétés par les variables suivantes : secteur (privé/public), segment (général/professionnel), milieu de résidence (urbain/rural), genre (homme/femme), langue (arabe/français), âge (jeunes/adultes) et diplôme (diplômé/non diplômé). Recommandations Afin de favoriser le climat des affaires par le biais du développement du capital humain, le Maroc gagnerait à renforcer les efforts de coordination et de synergie entre les politiques d'éducation, de formation et d'emploi, et notamment améliorer le taux d'insertion professionnelle des diplômés. Il est appelé aussi à développer une offre diversifiée et de qualité en matière d'éducation en favorisant notamment l'apprentissage de compétences de gestion et l'instruction des adultes, et à renforcer l'apprentissage tout au long de la vie pour favoriser l'intégration sociale et permettre la valorisation des apprentissages. Objectif : permettre à la main d'oeuvre de s'adapter à un environnement changeant faisant appel à des technologies et des processus de production en évolution. Le Royaume est appelé également à élaborer et mettre en place une stratégie sur le développement des stages en entreprise. De manière plus générale, le Maroc doit s'attacher à généraliser l'enseignement de base de qualité et élever le niveau moyen d'instruction de la population. Cela passe d'une part par le développement de l'éducation de base des adultes, en donnant la priorité aux programmes d'alphabétisation fonctionnelle basique, et d'autre part, par la poursuite de l'effort d'extension de l'offre d'éducation et de formation initiale. Le Maroc doit s'attacher aussi, entre autres, à renforcer l'équité de l'accès à une éducation de qualité pour garantir la cohésion sociale, en trouvant un nouvel équilibre entre les modes de financement de l'enseignement public et de l'enseignement privé.