Le ministre allemand de la Santé a annoncé mercredi que le nombre de nouveaux cas d'infection par la bactérie E. coli était en diminution significative mais a dit s'attendre à d'autres décès. Daniel Bahr a en outre défendu l'attitude de son gouvernement face à cette épidémie, qui a fait 27 morts et a contaminé plus de 2.700 personnes dans douze pays. La bactérie incriminée produit des shigatoxines pouvant entraîner des diarrhées banales ou sanglantes qui peuvent évoluer vers une complication grave. Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) qui touche le sang, les reins et le système nerveux a été diagnostiqué chez environ un quart des malades. "L'épidémie de E. coli et de SHU en Allemagne est si grave que nous avons à réagir très vite pour donner nos consignes. Nous ne pouvons toujours pas revenir sur nos décisions", a dit Daniel Bahr, évoquant les recommandations de ne pas consommer en Allemagne de graines germées, de concombres, de tomates et de laitue. "Il va y avoir de nouveaux cas et malheureusement nous nous attendons à d'autres décès, mais le nombre de nouvelles infections se réduit de manière significative", a-t-il ajouté. Il a souligné que les autorités sanitaires et alimentaires allemandes, fédérales comme régionales, allaient entamer sur le champ une "évaluation" de leurs méthodes de coopération dans cette crise. L'Institut Robert Koch, qui supervise les questions sanitaires en Allemagne, a fait état mercredi de 318 nouveaux cas liés à l'E. coli et de trois nouveaux décès. Le ministre de la Santé a précisé qu'il ne pouvait pas pour l'instant affirmer que l'épidémie était passée mais les analyses des dernières données en date, a-t-il dit, offrent "des motifs raisonnables d'espoir". Le gouvernement allemand a été critiqué pour son incapacité à identifier la source de l'épidémie qui a touché principalement la région de Hambourg et a été imputée à tort à des concombres espagnols puis à des graines germées venant de Basse-Saxe. Le commissaire européen chargé de la Santé et de la Protection des consommateurs, John Dalli, s'est rendu à Berlin pour une réunion de crise avec des responsables allemands. Il a invité l'Allemagne à demander l'aide d'experts internationaux pour faire face à ce qui pourrait être la plus grave épidémie d'E. coli de tous les temps. "Nous devons tirer parti des expériences passées dans toute l'Europe et même au-delà", a déclaré John Dalli au journal Die Welt. "Je tiens à souligner combien il est important de coopérer étroitement et de partager les informations et l'expérience des spécialistes afin de mettre fin rapidement à cette épidémie." Les Etats-Unis et le Japon ont déjà connu des épidémies d'E. coli et c'est un laboratoire chinois qui est parvenu à identifier la nouvelle souche, particulièrement toxique. A l'issue de ses entretiens à Berlin, John Dalli s'est dit convaincu que les enquêtes menées par les autorités allemandes allaient dans la bonne direction. Il a approuvé les mises en garde concernant la consommation de certains légumes. A Paris, l'Institut français de veille sanitaire a fait état mercredi de 13 cas de diarrhée sanglante chez des personnes ayant séjourné ou résidant en Allemagne dans les quinze jours précédant leurs symptômes. Aucun cas de SHU n'a été signalé en France. Sur ces 13 cas, un cas d'E. coli a été confirmé, un autre est probable, quatre ont été exclus et les sept autres sont en cours d'analyse. La dossier de l'E. coli devrait dominer les débats du sommet Russie-Union européenne, jeudi et vendredi à Nijni-Novgorod, à 400 km au nord-est de Moscou. L'embargo décrété la semaine dernière par la Russie sur les légumes frais en provenance de l'UE a provoqué la colère de Bruxelles, qui juge que cette mesure n'est pas fondée scientifiquement et bafoue les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). "Nous n'allons pas empoisonner notre peuple pour préserver je ne sais quel esprit", a répliqué vendredi dernier le Premier ministre russe, Vladimir Poutine. Sous la pression de plusieurs pays, dont la France et l'Espagne, la Commission européenne a accru substantiellement son offre, présentée mardi, de créer un fonds de 150 millions d'euros et de compenser à hauteur de 30% de leurs pertes les producteurs de légumes affectés par la crise. Le fonds a été porté mercredi à 210 millions, avec 70% des pertes couvertes. Selon la Fédération européenne des produits frais Freshfel Europe, le manque à gagner hebdomadaire est de l'ordre de 80 millions d'euros aux Pays-Bas, 30 millions en France, 20 millions en Allemagne, quatre en Belgique et trois millions au Portugal, sans parler des 200 millions d'euros estimés par les agriculteurs espagnols.