Les relations entre le Maroc et l'Espagne ont ceci de particulier, elles ne sombrent jamais dans la monotonie. Alors que l'affaire des incidents au poste frontière de la ville occupée de Mellilia vient à peine de prendre fin, après que le ministre espagnol de l'Intérieur, M. Alfredo Perez Rubalcaba, ait rencontré son homologue marocain, Taieb Cherqaoui, pour arrondir les angles, voilà qu'un groupe de 14 activistes espagnols sympathisants des thèses séparatistes du Polisario essaye à nouveau de jeter de l'ombre sur les relations entre les deux pays voisins. Samedi dernier, de l'aveu même de ces 14 activistes membres d'une association de soutien au séparatisme polisarien, «SaharAcciones», cités par la presse espagnole, 11 d'entre eux se sont regroupés dans une avenue de Laâyoune, à 18h30 GMT, pour déployer des banderoles appelant au séparatisme. Ils se sont alors fait prendre à partie par des citoyens marocains outrés par un tel comportement provocateur de la part d'étrangers. Avant que les forces de l'ordre n'interviennent pour les soutirer à l'ire de la population et les emmener pour les interroger au commissariat, deux d'entre eux, Rocero Carmen et Roberto Mesa, ayant été conduit préalablement à l'hôpital pour quelques contusions sans gravité. Le lendemain, dimanche, les 14 activistes espagnols ont été reconduits au ferry se rendant aux Iles Canaries, qu'ils ont pris le soir à 22 heures pour Las Palmas, après avoir passé toute la journée à la Casa d'Espana, où ils ont reçu la visite de diplomates espagnoles. Mais à la lecture de la presse espagnole, qui s'est déchaînée dimanche à ce sujet, un certain Anselmo Fariñas, qui semble être le porte parole du groupe, a raconté aux journalistes de son pays une version des faits beaucoup plus «exotique». Ce monsieur prétend ainsi que ce sont des policiers en civils, «déguisés», qui se sont attaqués à lui et ses compères, quand ces derniers ont déployé leur banderoles et pancartes pour appeler au séparatisme des provinces du sud du Maroc. Seulement, ce monsieur a omis de dire comment est-ce qu'il avait reconnu en ces personnes des agents de la police marocaine en civil ? Portaient-ils des badges indiquant qu'ils étaient agents de police ou ce sont eux mêmes qui le lui ont dit ? Ou peut être est-ce que Anselmo Fariñas les avait déjà rencontré auparavant, alors qu'ils étaient en tenue. Bref, ledit Anselmo Fariñas et ses dix compagnons pro séparatistes n'ont pas du tout apprécié de se retrouver devant des citoyens marocains jaloux de l'intégrité territoriale de leur pays, alors qu'ils devaient s'imaginer que les habitants de Laâyoune n'attendaient que la venue de ses preux chevaliers ibériques venant mener croisades pour les «libérer». Mais comme le ridicule ne tue point, Anselmo Fariñas avait d'autres «révélations» à faire à la presse espagnole. Ainsi a-t-il déclaré que «nous avons été informés qu'ils (NDLR : les citoyens en colère qui ont expliqué manu militari aux sympathisants des séparatistes à quel point ils étaient attachés à leurs patrie) avaient agi sous les ordres du procureur général du Royaume du Maroc». Graves accusations. Mais quelle est donc cette source d'information crédible qui leur aurait révélé ce «scoop» ? Anselmo Fariñas et ses compagnons demandent à leurs compatriotes espagnols de les croire sur parole, sans avancer la moindre preuve de leurs graves accusations contre un haut responsable juridique d'un pays souverain. Mais la plus belle fable est indéniablement celle racontée par un certain Carmelo Ramirez, qui n'a rien trouvé de mieux que de prétendre que les agents de police «déguisés» en citoyens marocains ont «essayé de les forcer à embrasser un drapeau marocain» et que suite au refus des trois derniers activistes espagnols de se faire, ils ont été «arrêtés et emmenés au commissariat central de Laâyoune». Le réalisateur surréaliste espagnol, Luis Bunuel, n'aurait pas manqué d'apprécier une telle scène. Bref, un joli tissu de mensonges et d'histoires à dormir debout, que ces sympathisants du séparatisme polisarien ont dû inventer pour cacher leur déconvenue, ayant été pris à partie par ceux là même dont ils croyaient venir défendre la «liberté». Plus sérieusement, les ministres des Affaires étrangères des deux royaumes voisins, MM. Taieb Fassi Fihri et Miguel Angel Moratinos, ont discuté de cet incident qui ne saurait mettre à nouveau sous tension les relations entre les deux pays. L'Espagne est le premier client du Maroc, absorbant 22% de ses exportations, et son deuxième fournisseur, à hauteur de 14% de ses importations. Le volume des échanges commerciaux entre les deux pays dépasse les 5 milliards d'euros, soit quelques 25% du volume des échanges entre le Maroc et l'UE. C'est également un sérieux appui au sein de l'Union Européenne, à laquelle le Maroc est attaché par un statut privilégié, et un partenaire de choix dans le cadre de l'Union pour la Méditerranée en devenir. Les deux pays, qui occupent chacun une position stratégique similaire sur son continent, constituent, de ce fait, un véritable pont entre les deux rives de la Méditerranée. Et c'est à l'ouest du détroit de Gibraltar que s'étale devant les deux pays le vaste océan Atlantique qui donne sur les Amériques. Autant d'opportunités de promotion des intérêts communs des deux royaumes voisins ne sauraient être gâchés par un groupuscule de gauchistes en mal de sensations fortes, qui n'avait de toute manière, que faire à manifester à Laâyoune pour une cause dont il ne sait pas grand-chose. Si ces activistes espagnols avaient vraiment à cœur l'intérêt des habitants du Sahara, ils auraient plutôt cherché à savoir ce qui se passe dans les camps de la honte de Tindouf, où sont séquestrés des dizaines de milliers de citoyens marocains. N'importe quel observateur un tant soi peu objectif verrait bien que c'est à partir des campements de la honte que les sahraouis fuient dernièrement par dizaines vers leur mère patrie et non l'inverse. Et c'est donc dans ces camps qu'il faudrait aller militer pour les droits de l'homme, si ces activistes espagnols arrivaient à obtenir de leurs amis séparatistes un droit de visite non surveillée. En tout cas, les relations entre les deux royaumes voisins du Maroc et d'Espagne ne sauraient être prises en otages par des groupuscules pseudo révolutionnaires gauchisants qui cherchent par tous les moyens à se faire remarquer. En tout cas, surtout pas au moment où le mirage séparatiste polisarien est entrain de s'estomper, pour laisser apparaître la triste réalité, celle d'une bande de criminels qui traficote avec les terroristes de l'AQMI, le plus sanguinaire mouvement jihadiste qui sévit actuellement dans la région du Sahel et qui vient à peine de libérer deux travailleurs humanitaires espagnols, avec le soutien discret du Maroc.