Qui aurait pu prédire que le régime Assad, père et fils, qui a régné en maître incontesté sur la Syrie durant 53 ans, allait s'effondrer en quelques jours comme un château de cartes ? Très peu de monde, tant le boucher de Damas, se prévalant de la protection russo-iranienne, semblait avoir consolidé son pouvoir une décennie après le déclenchement de la guerre civile. Bachar al-Assad cherchait même à regagner sa place parmi les pays arabes, appuyé en cela par son indéfectible allié algérien. Lorsqu'il participe au Sommet de la Ligue arabe en Arabie Saoudite en 2023, la diplomatie algérienne y voit un triomphe, satisfaite de voir un ennemi du Maroc intégrer cette organisation, traditionnellement favorable à l'intégrité territoriale du Royaume. Le Maroc, quant à lui, s'est opposé frontalement à cette réhabilitation. Même sous la pression des Saoudiens et des Emiratis, il ne s'est jamais résigné à normaliser ses relations avec ce régime, voyant en lui ce qu'il est vraiment : une dictature sanguinaire coupée de son peuple. On a tous en mémoire cette scène lors de la séance au Conseil de Sécurité de l'ONU en 2012, lorsque Saâd Eddine El Othmani, alors ministre des Affaires étrangères, a rappelé l'inhumanité du régime syrien. Ce à quoi le représentant de la dictature syrienne à l'ONU a répondu par un tombereau d'insultes envers le Maroc et ses symboles, dans une réthorique représentative de la bassesse d'un régime désormais relégué aux oubliettes de l'Histoire. Une Histoire qui a fini par donner raison au Maroc et tort à l'Algérie. Mais au-delà de cette vérité historique, c'est aujourd'hui tout le régime algérien qui est menacé. Difficile, en effet, de ne pas établir un parallèle entre le régime syrien déchu et celui encore en place à Alger. Les deux régimes tirent leur origine idéologique du socialisme arabe, dont les monarchies arabes étaient l'ennemi déclaré. Les deux se sont alliés à la Russie et à l'Iran, qui ont fini par lâcher Assad. Et surtout, les deux placent leur armée au centre du jeu politique, en faisant d'elle le ciment de leur nation. Cette armée, que le régime syrien déchu aimait présenter comme puissante et fidèle, s'est décomposée face à l'avancée des rebelles, les soldats ne voyant aucun intérêt à risquer leur vie pour un régime qu'ils méprisent et auquel ils ne croient plus. Le régime algérien finira-t-il par se rendre compte de ses errements historiques et revenir à la raison ? C'est tout ce qu'on lui souhaite.