En réponse, mercredi, à une question orale à la Chambre des Représentants, M. Aziz Akhannouch, ministre de l'Agriculture et de la Pêche maritime, a qualifié, une fois de plus, les résultats obtenus dans le cadre des négociations entre le Maroc et l'Union européenne (UE) sur le secteur agricole de positifs. Assurément, cette appréciation émanerait du fait que les termes des protocoles agricoles ayant déjà fait l'objet de signature par les deux parties, tiennent compte d'un certain nombre de considérations. D'une part, ils garantissent une certaine protection pour les produits marocains dits sensibles en tenant compte de la particularité de certaines filières qui demeurent encore fragiles. L'on retiendra à ce titre le cas des viandes et des céréales. Lesquels produits ne feront l'objet, à l'import, d'aucun processus de libéralisation. Et d'autre part, ces mêmes protocoles prévoient une révision à la hausse de quotas à l'export sur plusieurs produits qualifiés par la partie marocaine de stratégiques et à haute valeur ajoutée dont la tomate, l'olive et les agrumes… Ce qui fait qu'au département de l'Agriculture, l'on qualifie le nouvel accord de globalement équilibré et rapidement avantageux pour le Maroc, d'autant plus que ses termes donnent à ce dernier largement le temps qu'il faut pour mieux opérer une transition progressive dans le cadre du « Plan Maroc Vert » et du Plan Halieutis. Même son de cloche du côté de Bruxelles. La Commission Européenne avait bel et bien qualifié d'»étape importante» le procès-verbal signé entre le Maroc et l'Union Européenne clôturant les négociations sur la révision des concessions sur les produits agricoles, les produits agricoles transformés, les poissons et les produits de la pêche. A en juger par la lecture que fait Bruxelles des termes de cet accord, il s'agit d'un accord qui « prévoit le renforcement de la position des exportateurs européens sur le marché marocain, notamment dans le secteur des produits agricoles transformés. Un secteur au sein duquel une libéralisation totale est progressivement prévue dans les 10 ans à venir, à l'exception des pâtes alimentaires, produit pour lequel une limitation quantitative est prévue ». Parallèlement et dans le secteur des produits agricoles, cette fois, l'accord permettra « la libéralisation immédiate de 45% de la valeur des exportations du commerce de l'UE et 70 % en 10 ans. Les secteurs des fruits et légumes, conserves alimentaires, des produits laitiers, des oléagineux bénéficieront pleinement d'une libéralisation totale. Le secteur de la pêche sera également libéralisé pour les produits de l'UE (91% au bout de 5 ans et dans sa totalité dans les 10 ans) ». Aussi faut-il retenir que les deux parties ont également convenu d'ouvrir des négociations sur la protection des indications géographiques, en plus de l'aspect afférent aux dispositions sur le respect des obligations internationales en ce qui concerne les aspects tant sanitaires que phytosanitaires. Il est à retenir aussi qu'avant l'entrée en vigueur de cet accord conclu le 17 décembre dernier, ses termes doivent être, préalablement, soumis aux institutions d'approbation des deux parties. Un processus qui risquerait de prendre un certain temps. En attendant, les spéculations vont bon train quant au délai d'approbation. Cette approbation se fera-t-elle ou ne se fera-t-elle pas dans les mois à venir ? D'autant plus que du 1er janvier au 30 juin 2010, c'est l'Espagne qui prend la tête de l'Union Européenne. Et de ce fait, elle sera la première à tester le nouveau dispositif des présidences tournantes sous les règles du Traité de Lisbonne. Déjà, le Conseil Agriculture de l'Union Européenne, tenu le 18 courant sous la présidence de Mme Elena Espinosa, ministre espagnole de l'Environnement, du Milieu rural et marin, s'est beaucoup intéressé à la manière de mieux concevoir l'amélioration du fonctionnement de la chaîne agro-alimentaire européenne en vue de contrôler l'évolution des prix et de veiller à une répartition plus équitable de la plus-value qu'à autre chose. Et en matière de politique agricole et de pêche, les priorités de la présidence espagnole, tels que présentés lors de ce Conseil, concernent essentiellement la relance du débat sur le devenir des aides de la Politique Agricole Commune (PAC) après 2013, date à laquelle devrait prendre fin l'actuel budget communautaire. D'ailleurs, la présidence espagnole compte bien relancer le débat sur ce sujet entre les vingt-sept lors de la réunion informelle des ministres de l'Agriculture prévue fin mai prochain. Ceci étant, tout porte à croire que les nouveaux protocoles agricoles contenus dans le nouvel accord sur l'agriculture liant le Maroc à l'Union Européenne ne figurent pas parmi les priorités de l'actuelle présidence Espagnole de l'Union Européenne. Ce qui ferait qu'ils ne seront pas soumis pour approbation au cours du semestre prochain. Est-ce à dire que la ratification de cet accord ne se fera pas sous la présidence espagnole de l'Union Européenne ? A en juger par des propos attribués à Mme Elena Espinosa à l'issue du Conseil des ministres de l'Agriculture de l'UE du 18 janvier, «l'accord sur les échanges agricoles conclu entre le Maroc et l'UE ne sera pas approuvé par les Etats membres de l'Union sous l'actuelle présidence espagnole de l'UE» et qu'une telle approbation «ne figure pas sur l'agenda des différents Conseils agricoles qui auront lieu durant les six mois de présidence espagnole de l'UE». Il semblerait que c'est une histoire d'agenda et/ou de calendrier. Mais ce qui est sûr c'est que pour la ministre espagnole de l'Environnement, du Milieu rural et marin, la première phase de l'accord entre le Maroc et l'UE, qualifiée de technique, est déjà achevée alors que celle à caractère beaucoup «plus politique» exige l'approbation par le Conseil des ministres de l'Union Européenne et l'aval du Parlement européen. En somme, pour Mme Espinosa, cette seconde phase ne se fera pas sous la présidence espagnole. Par ailleurs, il convient aussi de rappeler que le programme de la présidence espagnole de l'Union Européenne a été présenté le 18 courant à Rabat par les Ambassadeurs d'Espagne et de l'Union Européenne au ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, M. Taïb Fassi Fihri, qui a exprimé le souhait que le Traité de Lisbonne puisse permettre à l'Union Européenne «d'adopter une vision davantage stratégique à l'égard de son voisinage immédiat et plus particulièrement à l'égard de ses partenaires les plus allants et les plus engagés». A cet égard et à en juger par un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération, « les deux parties se sont engagées à explorer au mieux les nouveaux outils et les mécanismes prévus par le Traité de Lisbonne en vue d'accélérer la mise en oeuvre du statut avancé qui avait ouvert, depuis octobre 2008, une perspective nouvelle au partenariat entre le Maroc et l'Union Européenne. » Les deux parties ont souligné aussi que « la mise en oeuvre efficiente et méthodique de ce statut avancé prépare le partenariat Maroc-UE à la conclusion, à moyen terme, d'un nouveau lien contractuel qui succédera à l'actuel accord d'association et qui prendra la forme d'un partenariat privilégié, à la hauteur des avancées et des ambitions du Maroc et de l'Union Européenne, précise-t-on de même source.