Le Maroc continue ses victoires : accueil du siège de l'Association des Clubs Africains face à l'échec du régime algérien    Ambassadeur de la Chine au Maroc : L'ouverture du vol direct entre Shanghai et Casablanca renforcera les liens culturels et humains entre les deux pays    Pressions algériennes sur Kaïs Saïed entravent les efforts de la Tunisie pour rompre ses relations avec le Polisario et rétablir les relations avec le Maroc    Istiqlal : Une vision audacieuse pour ériger la jeunesse en pilier du renouveau national    Lancement de la ligne aérienne entre Casablanca et Shanghai : une stratégie pour renforcer la coopération entre la Chine et l'Afrique    Ministre des Affaires étrangères d'Israël : Le Hamas ne pourra pas reprendre le contrôle de Gaza et les Etats-Unis soutiennent cette position    Les risques des routes dans la région du Sahel... Que faire après la disparition de 4 chauffeurs marocains dans une zone de forte tension ?    Ministre de l'Intérieur français : L'Algérie ne respecte pas le droit international et nous demandons la fin de l'accord franco-algérien de 1968    Dans un communiqué sur le naufrage d'une embarcation au large des côtes de Dakhla, le Pakistan reconnaît la marocanité du Sahara    LDC: Les FAR in, le Raja out !    Port de Tan-Tan : chute de 45% des débarquements de la pêche côtière et artisanale en 2024    L'Union des Comores célèbre le 5è anniversaire de l'ouverture de son consulat à Laâyoune    Arabie Saoudite : signature d'un accord pour développer des solutions numériques innovantes destinées aux pèlerins    Températures prévues pour le lundi 20 janvier 2025    Rêve d'une trêve durable    CCF: La RSB, mission accomplie avant le match de ce soir    Botola D2/J15: L'USYM s'offre le KACM et le poste de leader    Le cessez-le-feu à Gaza entre en vigueur après un retard de 3 heures    L'humeur : Hajib compte nous laisser tomber    MAGAZINE : Adil El Fadili, plomb âge    De la radio d'Hitler et Goebbels au numérique de Trump et Musk    Moscou et Téhéran signent un accord de partenariat stratégique    La famille marocaine Said décroche un méga-contrat de près de 2 milliards de DH par an à Nouakchott    Loudyi reçoit la ministre d'Etat chargée de la Défense nationale    Dominants et dominés    2025 sous le signe de l'optimisme et de l'attractivité des MRE    Balde victime d'insultes racistes à Getafe    Le PSG frappe fort en s'offrant Kvaratskhelia    La FIFA finance la construction d'un nouveau centre technique de football en Cote d'Ivoire    Anas Zniti rejoint le club émirati d'Al-Wasl    Promouvoir la petite et moyenne entreprise    Un enseignant marocain distingué aux Global Teacher Awards    Cap sur la formation continue des médecins spécialistes, résidents en radiologie et des techniciens    La main tendue aux jeunes    Oncorad investit 3,5 milliards de dirhams pour construire trente hôpitaux au Maroc d'ici 2028    Naufrage au large du Maroc : 21 Pakistanais secourus selon le dernier bilan officiel, opérations de rapatriement en cours    France : un réseau criminel accusé d'exploiter des Marocains sera jugé pendant deux jours à partir du 20 janvier    Un échange des plus fructueux    Une tragédie nationale en Azerbaïdjan et un tournant historique    Une exploration littéraire signée Charles de Mont Fort Mabicka    L'ARMCDH plaide pour une harmonisation avec la constitution des droits de l'Homme et libertés    Le Maroc, « un partenaire important » pour l'Allemagne et pour l'UE    Le temps qu'il fera ce dimanche 19 janvier 2025    Trois millions d'Espagnols ont visité le Maroc en 2024, en hausse de 16%    Les militants amazighs s'indignent du rattachement d'Id Yennayer au sionisme    Diaspo #372 : Mohamed Khoutoul, un parcours guidé par le savoir et le travail    Casablanca : L'Ambassadeur de Chine au Maroc inaugure les célébrations du Nouvel An chinois    Interview avec Leyna Kayz « Je travaille déjà sur un hymne pour encourager nos Lions lors de la CAN »    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



COMMEMORATION : Abdelhafid Kadiri, le dirigeant qui agissait en homme de pensée et pensait en homme d'action
Publié dans L'opinion le 29 - 12 - 2023

Le décès de Abdelhafid Kadiri, Sidi Hfid pour les intimes, ou encore Chrif Kadiri, survenu le 11 décembre 2023 à Rabat à l'âge de 96 ans, a engendré une grande tristesse et laissé un profond sentiment de frustration mêlé à beaucoup de nostalgie d'une époque où la parole et l'acte allaient de pair, où les hommes politiques, sincères et dévoués, agissaient en hommes de pensée et pensaient en hommes d'action. Abdelhafid Kadiri, le politique, l'intellectuel, le journaliste, le diplomate, le syndicaliste et l'homme de terrain, était de cette catégorie. Tous ceux qui l'ont côtoyé ou qui ont eu la chance et le privilège de servir à ses côtés, gardent de lui le souvenir d'un homme de principes doublé d'un militant patriote et d'un dirigeant politique clairvoyant et honnête, le tout dans l'étoffe d'un être humble, altruiste et à la fibre sociale très prononcée.
Pour les générations istiqlaliennes des années 60, 70 et 80 du siècle dernier, Sidi Hfid était tout simplement le maître et l'exemple. Le guide et l'arbitre. Particulièrement à Rabat, sa ville natale et d'appartenance et son fief politique et électoral où il fut élu député en 1977. Abdelhafid Kadiri était admiré, sollicité, profondément respecté, voire parfois craint, son charisme et sa réputation d'homme aux positions souvent tranchées y étaient pour beaucoup.
Issu d'une famille conservatrice adepte de la «Tariqa Kadiria» et imbue des valeurs religieuses, il montrait dès son jeune âge des signes d'intelligence, d'engagement et de sensibilité patriotique. Il eut le privilège d'être repéré et choisi pour intégrer le collège royal et suivre ainsi ses études sur le même banc de l'école que le prince Moulay El Hassan, futur roi Hassan II. Les deux collégiens furent liés d'amitié au point qu'il leur arrivait de quitter discrètement l'enceinte de Touarga pour rejoindre, en bons complices, les manifestations patriotiques que les nationalistes organisaient à Rabat contre la présence coloniale française.
Cette activité clandestine allait valoir au jeune Kadiri d'être pour un moment exclu du collège royal par les autorités du protectorat qui le soupçonnaient d'activisme nationaliste et d'influence sur le jeune prince. Il n'a dû sa réintégration au collège royal qu'à l'intervention personnelle du Sultan Mohammed Ben Youssef, avisé par l'un des enseignants patriotes. Cet épisode fut pour lui une introduction au monde de la résistance et du militantisme engagé et l'incita, alors qu'il était encore au collège royal, à intégrer les rangs du Parti de l'Istiqlal qui incarnait la lutte nationale pour l'indépendance du pays.
Après le baccalauréat, Abdelhafid Kadiri part en France préparer un diplôme d'ingénieur agronome avant de regagner le pays. Fort de son diplôme et solidement formé politiquement, il fut nommé secrétaire d'Etat chargé de l'Agriculture dans le gouvernement Ahmed Balafrej de 1958, avant d'être désigné par le roi Mohammed V à la tête du Bureau de Recherches et de Participations Minières (BRPM) en 1959, année marquée par la scission survenue au sein du Parti de l'Istiqlal et l'avènement de l'UNFP sous la houlette de Mehdi Benbarka.
De cette scission allaient naître des dissensions prononcées dans la sphère syndicale du fait de l'obédience Unfpéiste de l'Union Marocaine du Travail (UMT) dirigée par Mahjoub Benseddik et, surtout, du refus par de nombreux syndicalistes de continuer d'appartenir à la centrale syndicale désormais séparée de l'Istiqlal. Une décision historique allait alors être prise, dans laquelle Abdelhafid Kadiri s'était beaucoup investi, soit la création d'une autre centrale syndicale. L'Union Générale des Travailleurs du Maroc (UGTM) dont il fut un des fondateurs a pu voir le jour pour jouer, depuis, un rôle déterminant dans la défense et la promotion des droits des travailleurs dans le pays.
Membre du Comité exécutif de l'Istiqlal jusqu'à sa retraite politique, Abdelhafid Kadiri excellait dans de nombreux domaines, surtout là où il est question de libertés collectives et individuelles, de libertés politiques et syndicales, de la liberté de la presse et d'expression, des droits de l'Homme et de la défense des constantes de la nation.
Au moment où le pays était en prise avec les démons de la répression tous azimuts pendant les tristement célèbres "années de plomb" et que la liberté de la presse était particulièrement en souffrance, il assumera, entre 1974 et 1977, avec courage et beaucoup d'entrain, la délicate et sensible fonction de directeur d'un journal politique engagé : le quotidien « L'Opinion » créé 9 années auparavant. Ce fut une période lumineuse de l'Histoire de ce journal professionnel doublé de tribune militante partisane, où ses éditoriaux pointus, qui ne faisaient point dans la dentelle, réveillaient chaque matin les consciences.
Sa direction du journal fut marquée par la flexibilité dans l'exigence de la qualité professionnelle, avec une touche paternelle protectrice envers les équipes du journal. C'est d'ailleurs à cette époque et sous sa houlette que « L'Opinion » avait fait asseoir sa réputation de journal d'opinion doublé d'une tribune de défense des droits, des causes populaires et des valeurs nationales. C'est aussi sous sa direction que le journal a réussi le pari d'être en même temps un journal professionnel et le porte-parole d'un parti politique. Mariage plutôt réussi malgré l'incompatibilité supposée entre ces deux missions qui ne faisaient pas forcément bon ménage ailleurs. Le secret résidait dans la promotion de l'exercice d'un journalisme sobre dans son engagement et son professionnalisme, qui porte les valeurs de la nation, fait entendre la voix du peuple, sert la culture de la citoyenneté où le militantisme de la plume est marqué par une rigueur professionnelle garante de sérieux et de crédibilité.
Le souci de liberté de Abdelhafid Kadiri dépassait cependant le cadre du journal qu'il dirigeait pour s'étendre à l'ensemble de la presse nationale engagée qui souffrait à cette époque de nombreuses entraves logistiques liées notamment à la distribution, monopolisée alors par une entreprise datant de la période du protectorat. Là encore, en homme d'action, il n'hésitera pas à prendre part et à piloter avec Mohamed Abderrahmane Berrada la création en 1977 de la Société Arabo-africaine de distribution, d'édition et de presse (SAPRESS) dont le rôle n'était pas uniquement la distribution des journaux, mais aussi l'appui et le soutien à la presse engagée.
Une fois sa mission accomplie dans le domaine de la presse, le dirigeant istiqlalien passera le flambeau de la direction du journal au lendemain des législatives de 1977 qu'il remporta à Rabat-circonscription Yacoub El-Mansour. L'Istiqlal ayant décidé de quitter le banc de l'opposition et d'entrer au gouvernement Ahmed Osman par souci de servir la cause première du pays - le Maroc venait en effet de récupérer ses provinces du Sud par le biais de la Marche verte-, Abdelhafid Kadiri occupera le poste de ministre de la Jeunesse et des Sports, poste dans lequel il sera reconduit en 1979 sous le premier gouvernement Maâti Bouabid.
Les quatre années qu'il a passées à la tête de ce ministère sont à marquer d'une pierre blanche, tant au niveau du secteur de la jeunesse qui a connu un bond en avant remarquable dans le domaine associatif, celui des colonies de vacances et des maisons des jeunes, qu'à celui des sports qui a été réanimé dans différentes disciplines par un soutien conséquent accordé aux fédérations sportives et aux clubs. Les jeux méditerranéens de 1983 et leur succès retentissant sont à mettre en grande partie à l'actif de cet homme qui, bien qu'il ait été écarté de son poste en 1981, la planification et la préparation de ces jeux lui devaient beaucoup.
A ce stade de l'Histoire, le parcours de Abdelhafid Kadiri allait prendre un nouveau virage dicté par une tournure autant incompréhensible que malheureuse. Pourtant ami de Hassan II, il allait subitement tomber politiquement en disgrâce en 1981, non pas pour avoir commis une faute gravissime ou pour un quelconque manquement, mais uniquement pour avoir fait valoir un avis critique contre un acte jugé contraire au principe de la liberté d'expression et d'opinion, qui plus est décidé à l'encontre d'un chef de parti politique membre du mouvement national. Donc pour une cause noble.
Abdelhafid Kadiri avait, en effet, pris sur lui de défendre, en Conseil des ministres, la liberté d'opinion et d'expression du premier secrétaire de l'USFP, Abderrahim Bouabid, arrêté suite à son rejet public de l'acceptation par Hassan II de l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara marocain. Le dirigeant istiqlalien savait qu'en agissant de la sorte, il n'allait pas plaire, mais ce n'est pas tant cela qui l'importait. C'est surtout la délité aux principes et aux valeurs démocratiques qui comptait pour lui et qu'il faisait passer toujours en premier. Il ne pouvait tout simplement pas admettre que l'on puisse priver de liberté un homme politique pour s'être exprimé sur une question nationale. Et il ne pouvait pas non plus rester sans réagir à un tel fait.
Après son éviction du gouvernement qui n'était manifestement pas étrangère à sa position exprimée ouvertement devant le roi, il est resté zen. On pouvait certes déceler chez lui un brin de déception, voire un sentiment de manque de gratitude et surtout d'abandon politique au moment crucial, mais, de par sa culture et son éducation, il gardera tout pour lui et décide néanmoins de prendre ses distances avec la chose politique.
Nommé ensuite ambassadeur du Royaume à Madrid en 1985 et écarté ainsi de la scène intérieure pour un moment, il mettra à exécution, à la n de sa mission diplomatique, sa résolution antérieure de quitter définitivement la scène politique. Sans jamais commenter la décision de son éviction du gouvernement, ni de formuler le moindre reproche à quiconque, il décida de s'éclipser en silence "pour ne gêner personne". Jamais il ne échira malgré les tentatives répétées des cadres et militants qui n'avaient de cesse de frapper à sa porte à chaque occasion qui se présentait et à la veille de chaque congrès national du parti. A chaque fois, ils se voyaient reconduits avec beaucoup de diplomatie, de tact et de considération pour leurs initiatives et leur attachement à sa personne.
Ce leader charismatique dont la sagesse et le flegme forçaient le respect des adversaires politiques avant les alliés, aura profondément marqué toute une génération de militants politiques, de syndicalistes et de journalistes, par son engagement sans failles, ses qualités humaines, sa clairvoyance et sa loyauté envers son pays, son parti et ses militants.
Les istiqlaliens garderont toujours en mémoire son fort attachement aux idéaux de sa formation politique et la grande estime dont il bénéficiait de la part du leader Allal El Fassi qui allait par ailleurs rendre l'âme dans ses bras au palais présidentiel de Nicolae Ceausescu à Bucarest, en présence de l'ambassadeur du Maroc Maâti Jorio. Le Zaïm, à la tête d'une délégation istiqlalienne très réduite dont Abdelhafid Kadiri faisait partie, était venu plaider la question palestinienne et celle du Sahara marocain.
Que sa famille et ses proches trouvent ici l'expression de notre compassion et de nos sincères condoléances.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.