La disparition de ce grand combattant constitue une perte inestimable pour la Nation arabo-islamique et pour tous ceux qui sont attachés aux principes et valeurs de l'unité, de la sécurité et de la paix entre les peuples M. Abbas El Fassi : L'intérêt que SM le Roi accorde aux militants du Mouvement national, dont les signataires du Manifeste de l'indépendance, montre que Sa Majesté est fortement imprégnée de l'esprit et des valeurs du Mouvement national au sein duquel le Souverain a été formé Une cérémonie a été organisée vendredi à Rabat, par le Parti de l'Istiqlal et la Fondation "Abou Bakr Kadiri pour la pensée et la culture" en hommage au Combattant Abou Bakr Kadiri, patriote sincère de la première heure qui a marqué de son empreinte plusieurs générations à la faveur d'un apport des plus riches dans l'Histoire du Maroc moderne. Cette cérémonie commémorant le quarantième jour de son décès a connu la présence notamment du chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, et de l'ambassadeur de Palestine à Rabat, Ahmed Sobh. A cette occasion, le Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal, M. Abbas El Fassi, a prononcé une allocution dans laquelle il a souligné que la disparition du défunt est une grande perte pour la nation arabo-islamique, relevant qu'il s'agit de l'un des pionniers du Mouvement national ayant consacré sa vie à la défense des causes du pays, se plaçant au premier rang des militants de par ses contributions intellectuelles indéniables. Il a également mis en exergue les apports du regretté disparu dans le domaine de l'éducation et de la formation, son militantisme en faveur de la question palestinienne et son action partisane de haute facture. Ci-après traduction de l'allocution de M. Abbas El Fassi : Mesdames et messieurs, Il m'est très agréable de remercier toutes celles et tous ceux qui, de l'intérieur du pays comme de l'étranger, ont bien voulu assister à cette grande cérémonie d'hommage. La présence massive ici de hauts commis de l'Etat, de dirigeants politiques, d'ouléma, de responsables syndicaux, de membres de la résistance et d'anciens combattants, de représentants d'organisations féminines et de jeunesse, d'acteurs associatifs et de représentants d'organismes et d'institutions arabes est la preuve de la fidélité et de la gratitude envers cette brave personnalité pour les efforts et les sacrifices consentis par ce grand combattant pour la liberté et l'indépendance de la patrie, la poursuite de l'édification du Maroc souverain et la défense des constantes de la Nation. J'ai l'honneur, à cette occasion, de présenter à SM le Roi Mohammed VI qu'Allah le glorifie, au nom du Parti de l'Istiqlal et de la Fondation Abou Bakr Kadiri pour la culture et la pensée, notre sincère et profonde gratitude pour la grande sollicitude de Sa Majesté envers le défunt, de son vivant et après sa mort. Nous renouvelons également nos sincères remerciements et notre fierté pour la teneur du message royal de condoléances à la famille et aux proches du défunt ainsi qu'à ses compagnons de lutte et, en particulier, à sa famille politique représentée par le Parti de l'Istiqlal dont il fut ( rappelle le message royal) « l'un des fondateurs, un des dirigeants pionniers, un pilier solide et un sage averti ». Ce geste royal est, en fait, la consécration de ce que Sa Majesté a l'habitude de faire et de l'intérêt qu'Elle porte aux militants du Mouvement national, en général, et aux signataires du Manifeste de l'Indépendance, plus spécialement, et que Sa Majesté entoure d'une sollicitude particulière, les vivants parmi eux comme les morts, en les décorant de hauts Wissams royaux, ce qui prouve que Sa Majesté est fortement imprégnée de l'esprit et des valeurs du Mouvement national au sein duquel le Souverain a grandi. Je voudrais, par la même occasion, saluer les dirigeants arabes et musulmans qui ont fait part à Sa Majesté et au peuple marocain de leurs condoléances et exprimer notre fierté au président de l'Etat palestinien, le combattant Mahmoud Abbas, pour avoir dépêché une délégation conduite par le combattant Abbas Zakye, membre du Comité central de Fath. Mesdames et messieurs, La disparition du grand combattant Abou Bakr Kadiri a été une grande perte, non seulement pour le Parti de l'Istiqlal et pour le Maroc, mais aussi pour la Oumma islamique et arabe et tous les défenseurs des principes, valeurs et éthique nobles et ceux attachés à l'unité et à la propagation de la paix et de l'entente entre les peuples. Il a eu une vie pleine de don de soi parmi la génération des pionniers du Mouvement national qui ont voué leur vie à la défense des causes de leur Nation et de leur patrie et supporté les rigueurs de l'exil et des prisons afin de libérer leur pays et préserver la dignité humaine ; il fut véritablement parmi les premières sommités ayant laissé une empreinte indélébile et marqué l'Histoire contemporaine de notre Nation pour avoir fait vœu de poursuivre la lutte jusqu'à ce que se réalisent les aspirations du peuple marocain à l'indépendance, au recouvrement de sa souveraineté, de son intégrité territoriale et de son unité et pour avoir fondé le Mouvement national depuis 1930. Le combattant Abou Bakr Kadiri aura ainsi été de tous les combats qui se sont poursuivis depuis lors, tant au sein du bloc de l'action nationale, que du Parti national puis au Parti de l'Istiqlal, ce qui lui valut de subir les affres des geôles puisqu'il fut emprisonné plusieurs fois et exilé à Aghbalou Takerdous, sans que cela n'entame sa volonté et sa foi, jusqu'à ce que le pays accède à l'indépendance ; après quoi il orienta ses efforts vers la construction du Maroc indépendant, poursuivant ainsi son combat sur un autre front et multipliant son œuvre intellectuelle variée et couvrant divers domaines. Vu donc les multiples dimensions de sa personnalité et de son apport et afin de permettre aux autres intervenants d'apporter leur témoignage, je me contenterais d'évoquer brièvement quelques aspects de son apport et de ses préoccupations. Le combattant Abou Bakr Kadiri était, en effet, un excellent éducateur et pédagogue et fut parmi les premiers à œuvrer à créer des écoles d'enseignement libre afin de propager le savoir parmi le peuple, hommes et femmes et toutes couches sociales confondues, veillant en particulier à ce que les filles accèdent aussi au savoir et à ce que la femme marocaine soit apte à contribuer, aux côtés de l'homme, à la libération et l'édification de la patrie. Il créa ainsi l'école Princesse Lalla Aïcha réservée aux filles, en plus de l'école Nahda qui fut le premier collège de la ville combattante de Salé et qui a grandement contribué à la formation de nombre de cadres nationaux des deux sexes. Ce fut là l'une des premières pierres angulaires de l'enseignement libre dont le Mouvement national a tôt fait de saisir l'importance pour la préservation de la langue arabe, l'ancrage de l'éducation civique parmi les générations montantes et la lutte contre l'occupant en usant du savoir et de la pensée en plus de la résistance politique et armée. L'intérêt des précurseurs se porta ainsi sur la création d'écoles libres dans diverses villes et régions du Royaume afin de faire sortir les citoyens de l'ignorance et de pallier la faible scolarisation du fait de la politique coloniale à travers l'alphabétisation et l'éducation des petits et des grands et leur familiarisation avec leurs Histoire, culture, civilisation et identité pour leur épargner l'acculturation intellectuelle et spirituelle à laquelle l'occupant oeuvrait par divers moyens. Les lauréats des écoles comme Annahda et Mohammed V à Rabat se dirigeaient ensuite vers le Moyen-Orient en particulier pour poursuivre leurs études et, en même temps, constituer un pont avec nos frères arabes et partager leurs souffrances et espoirs, principalement avec le peuple palestinien, victime de l'occupation sioniste. Et à ce sujet, le combattant Abou Bakr Kadiri était entièrement préoccupé par les événements dans le monde arabe et musulman et essentiellement par le drame palestinien et les dangers qui pesaient sur la mosquée Al-Aqsa et sur le peuple palestinien, victime de déportations et de massacres massifs. Conscient du grand intérêt que le défunt portait à la question palestinienne, feu SM Hassan II le dépêcha à la tête d'une importante délégation en 1967 dans divers pays africains et musulmans afin de leur exposer la nature du conflit de la Palestine et d'attirer leur attention sur les dangers de l'infiltration sioniste. Puis, en 1968, il fut élu à l'unanimité des partis et syndicats du Mouvement national, président de l'Association marocaine de soutien à la lutte palestinienne, poste qu'il occupa 20 années durant, sans jamais cesser de suivre de près l'évolution de la situation, de soutenir la lutte du peuple palestinien et d'appeler à l'unification de ses rangs dans divers forums et rencontres, ce qui a permis de raffermir ses relations avec les divers dirigeants palestiniens et, spécialement, avec les martyrs Abou Ammar et Abou Jihad ainsi qu'avec le président de l'Etat de Palestine, le combattant Mahmoud Abbas, et bien d'autres symboles de la lutte palestinienne. Concernant la consolidation des relations du Maroc avec les pays frères et amis, le défunt croyait fermement en la nécessité d'édifier le Maghreb arabe qu'il considérait comme indispensable à la préservation de l'Indépendance des pays de la région tout en insistant constamment sur la coopération avec les pays subsahariens en tant qu'espace stratégique de notre pays. SM Hassan II l'avait également envoyé en mission dans plusieurs pays africains en vue de leur expliquer la position du Maroc au sujet du conflit artificiel autour du Sahara alors sous occupation espagnole avant sa libération grâce à la Marche verte à laquelle il a tenu à être aux premiers rangs avec d'autres dirigeants du Parti de l'Istiqlal, événement dont il se souvenait toujours avec émotion, regrettant seulement que son compagnon de route, le leader Allal El Fassi, n'ait pas pu vivre ce moment historique et assister à la récupération du Sahara marocain pour lequel il avait consacré l'essentiel de son combat. Le défunt était, d'autre part, assoiffé de savoir et de recherche, fréquentant les forums intellectuels, contribuant aux rencontres culturelles, rédigeant des livres et articles pour divers journaux et périodiques… Il a ainsi écrit une soixantaine de livres qui ont enrichi les bibliothèques nationale, arabe et islamique et préservé, à travers nombre de ses ouvrages, la mémoire nationale collective aidant, par la même occasion, étudiants et chercheurs en Histoire contemporaine du Maroc et faisant connaître plusieurs personnalités nationalistes marocaines, arabes et musulmanes ; outre son action en tant que propagateur de la foi islamique, rôle dans lequel il a excellé grâce à son ouverture d'esprit et à sa capacité de dialogue, de persuasion, d'adaptation et de communication avec divers courants de pensée et différentes tranches d'âge, principalement avec les jeunes dont il disait que cela lui permettait de parfaire sa formation. Je me souviens que lorsque j'ai été élu membre du Comité exécutif en 1974, je suivais attentivement ses interventions et ses analyses sereines et profondes, grâce à son style attachant et sa propension à souvent rechercher le consensus, sauf lorsqu'il s'agit des principes et valeurs fondamentales ou des constantes ; alors il était intraitable car il s'agit là de lignes rouges à ne pas franchir. Il importe aussi de souligner que ses facultés de dialogue et de persuasion lui ont permis de contribuer efficacement à enrichir le débat au sujet de la création de la Koutla, de même qu'il joua un grand rôle en convainquant feu SM Hassan II de modifier la Constitution à deux reprises, en 1992 et 1996. Mesdames et messieurs, Parmi les autres aspects du combattant Abou Bakr Kadiri que je voudrais souligner aussi, il y a lieu de retenir son rôle dans l'encadrement et l'organisation de l'action du parti, car c'était un militant engagé et soucieux de la bonne organisation partisane depuis le temps où il assumait des responsabilités au sein du Bloc d'action nationale, puis inspecteur général du parti au lendemain de l'Indépendance en supervisant la création et l'organisation de ses sections et du secteur féminin. Ce qui lui valut de demeurer un dirigeant distingué au sein du Comité exécutif puis comme membre du Conseil de la présidence, veillant constamment à suivre les activités du parti avec la vision du dirigeant avisé et ouvert sur ses différentes générations, structures et organisations parallèles, si bien que ses interventions accaparaient l'attention des militants en raison de leur charge intellectuelle habituelle, surtout lorsqu'il lui paraissait indispensable de rappeler les nécessaires respect de l'éthique partisane et des institutions légitimes et défense de l'unité du parti et de ses nobles principes et valeurs grâce auxquelles l'Istiqlal a pu continuer à accomplir sa mission et contribuer au développement durable et multisectoriel du pays, dans le cadre de l'Etat de droit, tout en consolidant la position du Maroc parmi les Nations et en préservant la dignité de ses citoyens. Mesdames et messieurs, Excusez-moi de m'être limité à ces quelques aspects de la personnalité de ce grand témoin de son temps, formateur et éducateur de plusieurs générations, le combattant Abou Bakr Kadiri dont le souvenir indélébile continuera à inspirer aux générations les valeurs de citoyenneté, de sacrifice et d'attachement aux principes. Je voudrais, enfin, remercier le comité d'organisation et tous ceux qui ont contribué à la tenue et au succès de cette imposante cérémonie d'hommage tout en renouvelant mes condoléances à la veuve, enfants, petits-enfants, proches et alliés du défunt ainsi qu'à l'ensemble des istiqlaliens et à tous ceux qui sont reconnaissants de ses bienfaits et en implorant le Très Haut de l'accueillir en Sa Sainte et Infinie Miséricorde, parmi Ses Messagers, les martyrs et les saints. « Nous sommes à Allah et à Lui nous retournons ».