Au moment où le Code pénal continue d'être débattu au sein du gouvernement et des institutions concernées, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, s'est prononcé sur les questions qui fâchent. Libertés individuelles, pudeur publique, enrichissement illicite... le ministre a clarifié sa pensée lors d'une récente interview. Détails. Jusqu'à présent, le ministère de la Justice n'a pas encore levé le voile sur la réforme du Code pénal qui continue de susciter le débat au sein du gouvernement. Le ministre de tutelle, Abdellatif Ouahbi, a dit avoir finalisé le texte qui, actuellement, est soumis à l'ensemble des départements ministériels et des institutions concernées. Bien que le flou continue d'entourer la mouture finale de texte très attendu, le ministre a montré le bout du nez, en donnant des indices de ce à quoi ressembleront les nouveaux ajustements de la loi pénale.
Dans une interview accordée à la chaîne « Al Arabia », le ministre, qui se dit libéral et progressiste, s'est épanché au sujet de cette réforme qui suscite l'attention publique tant les sujets mis sur la table sont sensibles.
Concernant l'épineuse question des libertés individuelles et leur place au sein du nouveau corpus pénal, Abdellatif Ouahbi, a fait clairement savoir que quelques actes qui relèvent des libertés des individuelles seront décriminalisés, sans préciser lesquels. C'est cet aspect-là de la réforme qui suscite le plus de débat, et parfois de polémiques. Jusqu'à présent, le débat continue et rien n'indique qu'il y a un consensus entre les partis de la majorité à ce sujet. Dans une interview accordée à nos confrères de Hespress, le ministre de l'Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour a suscité plusieurs réactions lorsqu'il a indiqué que la réforme du Code pénal ne doit pas se faire à l'encontre des « constantes de la Nation ».
Libertés individuelles : que faire ?
Le ministre a saisi son passage sur le plateau de la chaîne arabe pour clarifier sa pensée. « Il faut contrôler les libertés individuelles dans l'espace public et non pas dans l'espace privé », a -t-il tranché, sans laisser échapper cette occasion pour adresser une piqûre de rappel à ses opposants conservateurs. « Contrairement à ce que préconisent certains qui veulent entrer au sein des domiciles des gens et violer leur intimité, je suis contre cette façon de voir les choses », a-t-il poursuivi, rappelant, en revanche, qu'il est important de fixer des règles dans l'espace public en ce qui concerne les outrages à la pudeur.
En effet, la réforme du code pénal suscite depuis des années la question des relations extra-conjugales et les rapports librement consentis. Aujourd'hui, le débat est focalisé surtout sur l'article 490 qui sanctionne les relations sexuelles hors mariage.
Au-delà des libertés individuelles, plusieurs actes criminalisés dans le Code pénal actuel devront être supprimés dans la nouvelle loi, a fait savoir le ministre. Il n'en a pas cité d'exemples précis, préférant les dévoiler le moment opportun.
Et l'enrichissement illicite ?
Par ailleurs, la question de l'enrichissement illicite constitue toujours une pomme de discorde. Depuis sa prise de fonction, le ministre de la Justice s'est montré réticent à intégrer cette peine dans le Code pénal sous prétexte qu'elle va à l'encontre des garanties de la protection de la présomption d'innocence. Interrogé sur ce sujet, Ouahbi a expliqué que cette peine est susceptible d'être exploitée pour des règlements de compte et pourrait aboutir à l'emprisonnement de personnes innocentes. « Il faut qu'il y ait des garanties solides pour prouver l'enrichissement illicite. Il est risqué de donner plus de prérogatives aux autorités dans ce domaine parce que cela peut nous conduire vers des abus de la présomption d'innocence que la Constitution garantit pour tous les citoyens », a-t-il plaidé.
Pour rappel, le gouvernement a d'ores et déjà adopté la loi relative aux peines alternatives qui a été élaborée indépendamment de la réforme du Code pénal, même si les ajustements qui ont été introduits seront ensuite réintégrés dans le Code pénal. Le ministère de tutelle, qui est en cours de révision de plusieurs textes judiciaires, tels que la procédure pénale, n'a pas encore défini un calendrier clair concernant l'annonce de ces textes très attendus.