Profondément impactées par les mutations démographiques, climatiques et socio-économiques, les oasis souffrent particulièrement de l'insuffisance des ressources en eau. L'AESVT-Maroc se penche sur les mécanismes de mise en place de solutions durables pour assurer la pérennité de ces écosystèmes. -L'Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre (AESVT-MAROC), organisera du 24 au 26 juillet, l'Université d'été internationale, sous le thème « crise de l'eau et du climat : mise en oeuvre de solutions durables de gestion locale de la rareté et limitation des effets de la pollution ». Pouvez-vous nous détailler ce programme ? -L'Université internationale d'été sur la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (GIRE), qui se décline comme un processus favorisant le développement et la gestion coordonnée de l'eau, des territoires et des ressources qui s'y rapportent, va avoir lieu à Aguinane et Agadir. Cet événement représentera, d'une part, une occasion de partager les premiers résultats du projet « ProGIRE : réalisations et défis » et les multiples expériences et projets démonstratifs menés au Maroc et dans des pays du pourtour méditerranéen et, d'autre part, un moment de débat entre décideurs, planificateurs, gestionnaires, acteurs et experts nationaux et internationaux sur les mécanismes de mise en place des Solutions durables basées sur le savoir-faire ancestral oasien de gestion participative et intégrée, l'innovation et l'économie circulaire, afin d'appuyer les projets étatiques de mobilisation et de gestion de l'eau. L'université d'été internationale rendra hommage aux femmes, aux jeunes et aux hommes des communautés oasiennes qui ont une riche culture ancestrale de gestion intégrée des ressources rares, en mettant en valeur leur approche de GIRE local. Une sortie est programmée le 24 juillet à Aguinane pour découvrir cette belle oasis, les efforts et attentes de ses habitants, des jeunes et des femmes en particulier, et des visites seront organisées, les 25 et 26 juillet, aux sites de production, de traitement et de distribution de l'eau à Agadir. C'est autant une occasion de montrer le rôle joué par la population de ces zones oasiennes pour remédier au manque d'eau, notamment le rôle d'arbitrage et de la police de l'eau pour se partager cette matière vitale équitablement et sans problème. Je tiens à noter que les agences des bassins disposent de dix policiers pour 40.000 km carrés alors que dans ces oasis, toute la population veille sur la bonne gestion de cette eau, avec une approche participative. -Quelles sont vos attentes de ce projet ? -L'AESVT a travaillé sur le projet de valoriser cette participation citoyenne de la population, qui est l'une des solutions durables du problème de l'eau. On a engagé les meilleurs experts qui existent grâce à des professeurs universitaires de la région et de doctorants. L'Université d'été favorisera également la réflexion sur les mécanismes à mettre en place pour soutenir la duplication de l'approche GIRE dans les différentes oasis du bassin hydraulique. En effet, la solution locale doit être étendue à l'échelle nationale afin de préserver l'ensemble des bassins. Cette approche pourrait être généralisée à l'ensemble des territoires fragiles du pays, avec pour objectif de garantir leur développement durable. L'Université d'été sera un point de rencontre et de débat sur les mécanismes de mise en place des solutions durables basées notamment sur l'économie circulaire. C'est une économie qui consiste à produire des biens et des services de manière durable en limitant la consommation et le gaspillage des ressources et la production des déchets. Il s'agit de passer d'une société à économie linéaire, c'est-à-dire du tout-jetable, à un modèle économique circulaire. On s'attend à ce que cette approche que nous avons adoptée soit connue et partagée avec tout le monde et surtout qu'elle soit développée par l'ensemble des acteurs. Nous considérons qu'il faut exploiter les centaines de recherches scientifiques menées par les 5.000 doctorants qui obtiennent leurs doctorats chaque année et les centaines d'études faites au niveau des Masters et de licences, dans le cadre d'un système dynamique et actualisé. L'information est la source de toute intervention. -L'AESVT-MAROC mène depuis plus de deux ans le projet « ProGIRE », de « promotion de la gestion intégrée des ressources en eau, en milieu oasien », soutenu par l'Union Européenne, au niveau de deux écosystèmes extrêmement vulnérables « l'oasis de Aguinane » et « l'Oasis de Ferkla » à Errachidia. Parlez-nous des tenants et aboutissants du projet « ProGire » ? -Le projet de « Promotion de la gestion intégrée des ressources en eau en milieu oasien (ProGIRE) », mené par l'AESVT et soutenu par l'Union Européenne, sur une durée de 3 ans, contribue à la sauvegarde des oasis du sud Maroc. C'est un projet mené aussi bien au Maroc que dans d'autres pays du sud méditerranéen. On a constaté que les solutions étatiques ont montré leurs limites et qu'il fallait une approche de gestion intégrée des ressources de l'eau. -Pourquoi le choix de ces deux oasis comme cas d'étude ? -Ce sont deux écosystèmes extrêmement vulnérables qui ont connu une déstabilisation de l'équilibre de leurs milieux oasiens, surtout à cause de l'aggravation de l'aridité du climat, la rareté des ressources hydriques, l'ensablement, la sécheresse. Aux transformations démographiques, climatiques, sociales et économiques rapides, s'ajoutent le manque de ressources en eau et le changement climatique, les problèmes de pollution et d'exploitation excessive des eaux sous-terraines, de telle sorte que le risque de contamination des puits servant à l'approvisionnement en eau potable de la population constitue une source de grande préoccupation pour les citoyens et les associations locales et nationales. -Quelles leçons tirez-vous de la « survie » des oasis ? -L'importance de l'eau n'est pas à démontrer pour toute oasis. Sans ce facteur vital, aucune vie n'est possible, qui plus est, dans un milieu désertique. Les oasis sont des écosystèmes extrêmement vulnérables et menacés de disparition. Leur sauvegarde et le renforcement de leur résilience face au changement climatique sont un enjeu majeur pour le Royaume. Afin de préserver les oasis et sauver ce qui peut l'être, tous les acteurs étatiques et non étatiques locaux, nationaux et partenaires internationaux, sont appelés à accompagner la population, par des mesures urgentes, pour mener un travail complexe et de longue haleine, capable de renforcer le processus d'adaptation au changement climatique et de gestion durable et efficace des territoires oasiens, et des ressources hydriques en priorité. Les oasis nous rappellent à quel point on a délaissé un important système, et à quel point certains volets de la gestion de l'eau ont aggravé la situation. L'oasis est le meilleur moyen de relire le passé et l'avenir du Maroc en reconsidérant ce capital matériel et immatériel des Marocains. Les habitants ont instauré un modèle de gestion mais les nouvelles technologies, les nouveaux systèmes d'information, de recherche, d'appui et d'innovation financière n'ont pas été intégrés pour les accompagner.