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Taxation des YouTubeurs : Le fisc en quête de modus operandi [INTEGRAL]
Publié dans L'opinion le 19 - 06 - 2023

Taxer les créateurs de contenu sur Internet est une mission difficile que s'est assignée l'Administration fiscale, qui cherche des formules adéquates. Une mission pleine de défis, selon des experts interrogés par « L'Opinion ».
Cela fait des années que les youtubers sont sous les radars du fisc. Le gouvernement a, depuis des semaines, dissipé les doutes sur sa volonté de chercher des sous chez cette catégorie d'influenceurs qui gagnent leur vie au-delà de tout encadrement juridique ou fiscal. Grâce aux audiences spectaculaires sur la plateforme et aux contrats publicitaires juteux, certains d'entre eux s'enrichissent rapidement et se remplissent les poches de façon telle que les internautes, comme les citoyens ordinaires, commencent à se poser des questions.

Le fisc à la recherche d'une formule magique !
Actuellement, le fisc est en train d'examiner le modus operandi, apprend-on d'une source de la DGI. Le chemin est pourtant jonché d'épines vu les nombreuses difficultés techniques auxquelles il faut trouver des solutions minutieuses. D'où les innombrables doutes sur la faisabilité d'imposition des détenteurs de chaînes YouTube, dont le statut économique est difficilement définissable, de même que leurs revenus sont également difficiles à évaluer.
Une taxe faisable mais complexe !
Ces difficultés techniques ne sauraient cependant dissuader le fisc d'élaborer cette fameuse taxe, selon Mohamadi Rachdi El Yacoubi, président du Cercle des Fiscalistes du Maroc, qui juge cette taxe faisable sur les plans fiscal et comptable. « Elle est tout à fait faisable. Il s'agit d'un prestataire comme les autres qui réalise un chiffre d'affaires et qui supporte des charges », insiste notre interlocuteur, ajoutant que la taxation permet d'assurer au profit du Trésor une contribution fiscale de cette catégorie de contribuables compte tenu du résultat qu'elle réalise.
Jusqu'à présent, les revenus des youtubers ne sont pas tout à fait connus des autorités fiscales puisque les paiements proviennent souvent de l'étranger via les comptes « adsense », mode par lequel la plateforme américaine rémunère les propriétaires des chaînes en fonction des abonnés et du nombre de vues.
En plus, les virements se font par voie bancaire, à l'aide du Paypal, ce qui fait qu'il est difficile de savoir l'objet et la raison du paiement. Cela dit, le premier défi est de déterminer le revenu imposable de cette catégorie.
Sur ce point, M. El Yacoubi juge que les youtubers doivent, à l'instar des autres catégories de contribuables, « déclarer leurs revenus et payer en conséquence un impôt sur le bénéfice réalisé ». « Il leur est demandé d'abord de s'identifier et de choisir la forme juridique appropriée », poursuit l'expert.
Même si la déclaration est importante, il existe aussi d'autres outils pour évaluer le revenu, bien qu'ils soient complexes, nous expliquent Abdelbasset Mohandis, Expert-comptable et Commissaire aux comptes. « Le revenu imposable devrait être calculé en soustrayant les dépenses liées à la production des vidéos, telles que l'équipement, les frais de tournage, les frais de montage, etc., des revenus bruts générés par le créateur de contenu », explique-t-il, soulignant l'importance de prendre en compte les obligations fiscales dans les pays où les créateurs de contenu sur le web génèrent des revenus, afin d'éviter une double imposition le cas échéant.
En plus de mesurer minutieusement le revenu imposable, les autorités fiscales ont le grand défi de tracer les revenus des youtubers, pour éviter le risque de sous-déclaration ou d'évasion. « Qu'ils soient sur Instagram, Tik-Tok ou YouTube, les créateurs de contenu sont repérables par le fisc », estime le président du Cercle des fiscalistes. De son côté, M. Mohandis pense que le traçage peut paraître parfois compliqué sur le plan pratique, pour la simple raison que « les sources de revenus proviennent de différentes plateformes et de diverses transactions ». « Néanmoins, les agents de l'administration fiscale peuvent utiliser des outils de collecte de données et de surveillance pour suivre les revenus générés par les créateurs de contenu », reprend l'expert-comptable, ajoutant que le traçage serait plus facile s'il y avait une collaboration entre le fisc marocain, les réseaux sociaux et les prestataires de services de paiement.

Youtubers : Auto-entrepreneur ou profession libérale ?
Au-delà des techniques d'imposition, il est important de définir même ce que c'est qu'un Youtubeur et lui trouver un statut pour mieux le taxer. D'aucuns peuvent le voir comme un entrepreneur, d'autres y voient une société s'il y a emploi d'équipe, tandis que d'autres peuvent le percevoir comme exerçant une profession libérale. Au milieu de ce débat, les experts ont des avis différents. Au regard de Rachdi El Yacoubi, les possibilités sont multiples. « On peut opter soit pour le statut d'auto-entrepreneur ou pour celui de la contribution professionnelle unique (CPU), pour la personne physique soumise au résultat net réel (RNR) ou encore choisir une forme sociétaire comme la SARL à associé unique », précise-t-il.
M. El Yacoubi trouve qu'une fois la forme juridique arrêtée, les youtubers « doivent se conformer aux obligations fiscales déclaratives, comme tous les autres contribuables, afin de s'acquitter de leurs obligations fiscales ».
M. Mohandis va dans le même sens en estimant que ce sujet reste ouvert au débat. Notre interlocuteur pense qu'il est possible de percevoir l'activité des youtubers comme « une forme d'entrepreneuriat », car, selon lui, « ils gèrent souvent leur propre entreprise en créant du contenu, en négociant des partenariats et en gérant leurs revenus. Cependant, le Commissaire aux comptes juge plus judicieux de faire du cas par cas. « Il convient d'examiner attentivement les spécificités de chaque cas pour déterminer si le créateur de contenu relève d'un statut professionnel particulier, comme celui des professions libérales », reprend-il.
En gros, le modus operandi ne fait pas l'unanimité chez les experts, qui voient plusieurs façons de faire pour encadrer l'activité des personnes qui gagnent leur vie sur YouTube. En tout cas, leur taxation est faisable, bien qu'elle soit complexe. Il n'en demeure pas moins qu'elle reste tributaire d'un cadre juridique et fiscal adapté à ce type d'activités, selon Abdelhadi Bouazzaoui, comptable et auditeur. Il convient donc d'encadrer cette activité juridiquement avant de penser au côté fiscal.

Anass MACHLOUKH

Trois questions à Abdelbasset Mohandis « Les Youtubers peuvent être soumis à la CPU s'ils sont considérés comme des travailleurs indépendants »
La taxation des personnes qui réalisent des profits sur YouTube est-elle faisable sur les plans fiscal et comptable ?

- La question de la faisabilité fiscale et comptable de la taxation des personnes qui réalisent des profits sur le web est délicate. Etant donné la nature mondiale des plateformes et la diversité des sources de revenus des créateurs de contenu sur le web (publicités, partenariats, dons, etc.), il peut être difficile pour l'administration fiscale de suivre et d'évaluer précisément ces revenus. Cependant, avec les avancées technologiques et l'accès à des données de plus en plus détaillées, il devrait être possible de mettre en place des mécanismes permettant de recueillir les informations nécessaires pour établir une taxation équitable.
Y a-t-il des risques de sous-déclaration dans le cas des Youtubers ?
- Comme pour tout système fiscal, il existe des risques de sous-déclaration des revenus, et les créateurs de contenu sur le web ne font pas exception. Certains d'entre eux pourraient être tentés de minimiser leurs revenus afin de réduire leur charge fiscale. Les revenus provenant de partenariats publicitaires, de parrainages et d'autres sources peuvent être difficiles à suivre de manière précise. Cependant, il convient de souligner que l'administration fiscale marocaine dispose de moyens pour détecter la sous-déclaration des revenus. Elle peut utiliser des outils de collecte de données, des audits et des vérifications de l'exactitude des informations fournies par les créateurs de contenu. De plus, la collaboration avec les plateformes de médias sociaux et les prestataires de services de paiement peut également aider à obtenir des informations plus détaillées sur les transactions financières liées aux activités des Youtubers.
En cas de taxation des Youtubers, faut-il leur imposer de cotiser au régime de couverture sociale et payer donc la CPU pour bénéficier de l'AMO ?
- A mon avis, si les créateurs de contenu sur le web sont considérés comme des travailleurs indépendants, il serait logique qu'ils cotisent au régime de couverture sociale pour bénéficier des avantages sociaux correspondants.
Propos recueillis par A. M.
Trois questions à Mohamadi Rachdi El Yaâcoubi « Le fisc peut s'appuyer sur l'article 220 du Code général des impôts »
Pratiquement parlant, comment le fisc peut-il procéder pour identifier les Youtubers ?

- Le fisc a la possibilité d'entamer la procédure de rectification normale des impositions conformément à l'article 220 du Code général des impôts. Une disposition qui s'applique aux contribuables déjà identifiés auprès des services des Impôts et qui consiste à les inviter à rectifier leur déclaration fiscale sur la base des informations détenues par l'administration fiscale. En cas de défaut de déclaration fiscale, c'est l'article 228 sur la taxation d'office qui s'applique. Deux options se présentent aux contribuables alors : soit ils procèdent à une déclaration de tous les encaissements constatés par l'administration et négocient une réduction des majorations et pénalités, soit ils refusent de déclarer ces revenus. Dans ce cas précis, l'administration procédera à leur taxation d'office en s'appuyant sur les chiffres dont elle dispose. Ce qui implique le paiement de l'impôt sur le revenu et de la TVA.

Idéalement, quel est, selon vous, le régime fiscal qui peut s'appliquer aux Youtubers... ?

- A mon avis, le régime fiscal dépend du statut juridique choisi et du chiffre d'affaires réalisé. En cas d'auto-entrepreneur, la taxation de ces prestataires de services est subordonnée à la condition que le montant du chiffre d'affaires annuel encaissé ne dépasse pas la limite de 200.000 DH.

Si on applique l'Impôt sur le revenu, quelle sera la formule ?

- En matière d'Impôt sur le revenu (IR), les auto-entrepreneurs prestataires de services sont soumis à un impôt sur le revenu égal à 1% sur le montant du chiffre d'affaires qui ne dépasse pas 200.000 DH. L'auto-entrepreneur est hors champ d'application de la TVA puisque son chiffre d'affaires ne dépasse pas le seuil d'assujettissement de la TVA fixé à 500.000 DH. Il est également exonéré de la taxe professionnelle pendant une période de 5 ans à compter de la date du début d'activité. Le contribuable est tenu d'adhérer au régime de sécurité sociale prévu par la législation en vigueur. Les droits complémentaires annuels destinés à la couverture médicale des autoentrepreneurs varient de 1.200 DH à 14.400 DH, selon le barème prévu à cet effet en fonction de la tranche de droits. Les droits relatifs à la couverture AMO s'appliquent aux contribuables ayant opté pour la Contribution professionnelle unique (CPU). Pour les prestataires qui ont choisi le régime du RNR et qui dépassent 500.00 DH de chiffre d'affaires, ils seront soumis à la TVA de 20% et à un taux de l'IR progressif pouvant atteindre 38%.
Influenceurs sur YouTube : Des écarts importants, des revenus disparates !
Sur YouTube, les influenceurs gagnent des sommes très disparates. Il y en a ceux qui en raflent des fortunes comme il y en a des personnes connues et moins performantes qui gagnent moins. Actuellement, il n'existe pas de chiffres qui font l'unanimité en ce qui concerne leurs revenus mensuels.
On dit parfois que certains parmi eux peuvent engranger jusqu'à 100.000 dirhams par mois. Ce qui n'est pas le cas de tout le monde hormis les grandes célébrités qui ont des millions d'abonnées et des millions de vues par vidéo.
Nous avons interrogé plusieurs influenceurs qui ont un public important mais qui ne parviennent pas à gagner leur vie par YouTube. En effet, 1000 « vues » sur une vidéo sont rémunérées de 0,5 à 6 dollars. Cela dépend des régions. Au Maroc, c'est moins rémunéré que dans d'autres régions comme l'Europe, le Golfe et les Etats Unis. Là, 1000 vues peuvent rapporter en moyenne 5 dollars. En réalité, tout se joue au niveau du CPM et du RPM, c'est-à-dire les indicateurs qui déterminent le degré de monétisation des vidéos à partir de la publicité, parce que YouTube, rappelons-le, paye lesYoutubers sous forme de commissions sur les spots publicitaires.
Ces deux indicateurs varient selon les pays. Au Maroc, le CPM est faible (0,34 dollars). « Pour cette raison, certains youtubeurs préfèrent cibler le public étranger pour gagner plus », nous explique Soufiane, propriétaire d'une chaîne YouTube qui fait des vidéos sur le football. Avec des moyennes de 100.000 vues par vidéo, il est difficile d'engranger des sommes importantes sur la plateforme. Raison pour laquelle certains youtubeurs préfèrent se concentrer plus sur d'autres plateformes plus généreuses, comme Facebook.


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