Lors de son passage en séance plénière du Parlement, consacrée à l'évaluation de la politique du gouvernement dans l'enseignement supérieur, le Chef du gouvernement a fait le diagnostic de l'Université marocaine, tout en mettant en lumière sa vision pour orienter la transformation du système de l'enseignement supérieur à l'horizon 2030. Longtemps attendue, la séance plénière mensuelle consacrée à l'évaluation de la politique générale du gouvernement autour de l'enseignement supérieur a constitué l'occasion idoine pour mettre le point sur les tenants et aboutissants de la stratégie gouvernementale pour l'amélioration du système de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique. A la Chambre des Représentants, le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, s'est présenté, lundi 12 juin, devant les députés pour répondre aux questions mais aussi aux critiques des groupes parlementaires sur la stratégie au moyen de laquelle l'Exécutif compte remédier à la situation peu enviable qui règne dans les institutions universitaires, une problématique qui ne cesse de faire couler beaucoup d'encre. L'occasion aussi de clarifier davantage les premières réformes entreprises dans ce sens. Il est à noter qu'en 2020-2021, l'effectif des diplômés en doctorat a atteint 3358 doctorants dont 2677 sont lauréats des établissements universitaires à accès ouvert et 681 appartenant aux établissements à accès régulé. Par études, la plupart d'entre eux sont diplômés en sciences juridiques, économiques et sociales. Sans hésitation, Aziz Akhannouch a rejoint les observations de la majorité parlementaire sur la persistance de plusieurs manifestations de fragilité et de déclin dans le système universitaire depuis plus de deux décennies. Ainsi, il a reconnu les problèmes auxquels font face les institutions universitaires, liés principalement au rendement, au manque de ressources humaines, sans pour autant négliger la persistance de certains défis stratégiques et structurels. Sur un ton optimiste, cette fois ci, le Chef de l'Exécutif a souligné que « l'université marocaine est placée au cœur du développement dynamique de notre pays, et focalise toute l'attention des pouvoirs publics pour assurer son redressement ». Pour ce faire, « une remise en question des différents aspects y afférents est indispensable», a-t-il martelé en réponse aux objections des groupes parlementaires qui plaident pour un système capable de relever les défis d'aujourd'hui et de demain, mais surtout d'accompagner le train de développement dans les nouveaux secteurs prioritaires.
Des maux à l'origine du retard Le système universitaire souffre de plusieurs maux qui impactent de manière directe le bilan en termes de capital humain. C'est en tout cas le constat dressé par le Chef du gouvernement lors de ladite séance plénière, lorsqu'il a jugé que la qualité de la recherche scientifique a notoirement baissé. Il a attribué cette réalité au budget « très limité » qui y est consacré, soit à peine 1.6% du budget général entre 2021 et 2022. Ce budget devrait cependant être substantiellement amélioré, selon le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Abdellatif Miraoui, qui avait annoncé dans ce sens l'allocation d'une enveloppe de 600 millions de dirhams en soutien aux activités de recherche scientifique. Cet effet s'accompagnera de la création de trois instituts nationaux de recherches thématiques. En effet, les carences dans ce domaine sont inquiétantes, parce que le taux d'encadrement pédagogique a enregistré un score inférieur aux indicateurs reconnus à l'échelle internationale, soit un professeur pour 120 étudiants dans les universités à accès ouvert, notamment les universités pluridisciplinaires. Un modèle largement critiqué à l'international, d'où les appels à sa révision, lancés par le Conseil supérieur de l'Education, de la Formation et de la Recherche scientifique. Dans le même registre, le taux d'abandon des études universitaires sans obtention de diplôme a aussi atteint les 49% ces dernières années, a-t-il souligné, notant que le taux de chômage a dépassé les 18.07% parmi les lauréats des universités à accès ouvert, et 8.5% parmi ceux titulaires des diplômes auprès des universités à accès limité. L'Exécutif, a assuré Akhannouch, a décidé de prendre à bras le corps ces problèmes, « dans le cadre de la vision stratégique préparée par le gouvernement au cours de sa première année, qui définit les étapes nécessaires pour construire une université marocaine intégrée qui soit conforme aux orientations nationales, une vision qui entend placer le Maroc parmi les pays leaders dans le domaine de l'innovation et de l'excellence technologique », ce qui se traduit pleinement dans la teneur du Plan d'accélération de la transformation de l'écosystème de l'enseignement supérieur PACTE ESRI. La réforme mise en œuvre, souligne Aziz Akhannouch, s'appuie sur la révision des priorités de la formation, de l'organisation universitaire dans les secteurs privé et public, ainsi que celle des institutions étrangères. Sur le volet de l'innovation, la réforme porte sur la redéfinition des priorités des offres de recherches scientifiques et le renforcement des laboratoires de recherche, à travers la révision du système des brevets scientifiques. Il s'agit également d'assurer le renouvellement des sujets d'innovation et le développement de nouvelles ingénieries pour les acteurs concernés, notamment à travers un rôle renforcé des incubateurs et des centres de transformation technologique. Sur le plan de la transformation digitale, la réforme porte sur l'amélioration du parcours universitaire, tant pour l'étudiant, l'enseignant-chercheur que pour l'ensemble des cadres administratifs et techniques, outre l'encouragement des parcours des projets en herbe, des investisseurs et autres partenaires.
Qui prendra la place des futurs retraités de l'université publique ? L'université marocaine perdra près de 2200 de ses cadres enseignants, qui seront mis à la retraite début 2026. Pour pallier au manque de professeurs qui se ressentira dans les années à venir, la relève sera assurée par les doctorants. C'est ainsi que l'Exécutif s'apprête à lancer un programme de formation à part entière, avec pour objectif de former un total de 1000 doctorants annuellement. Selon Aziz Akhannouch, cette mesure « permettra de fournir une pépinière de compétences en mesure d'aider au renouvellement du corps enseignant ». D'ailleurs, malgré l'obtention de l'un des plus hauts diplômes du Royaume et la maîtrise de plusieurs langues, cette catégorie se plaint de manière récurrente qu'elle a du mal à trouver un travail digne de sa formation. Raison pour laquelle les doctorants ne cessent d'appeler, via des sit-in, les gouvernements successifs à assurer leur intégration dans la Fonction publique. Mais est-ce pour autant l'alternative la plus viable et la plus fonctionnelle pour les intégrer dans le marché de l'emploi ? Les propos avancés par Aziz Akhannouch promettent, en tout cas, aux doctorants un avenir bien meilleur au sein de l'université publique.
Mina ELKHODARI 100.000 ingénieurs et techniciens formés d'ici 2026 A l'heure où les secteurs de l'automobile et de l'aviation avancent à grands pas, l'Exécutif s'apprête à relever le défi lié aux ressources humaines. Pour ce faire, de nouvelles filières de formation dans le domaine de l'aéronautique et de la construction automobile seront lancées prochainement, a annoncé Aziz Akhannouch, relevant que l'objectif consiste à former 100.000 ingénieurs, cadres moyens et techniciens à l'horizon 2026. Le tout dans un cadre de partenariat entre l'université et l'entreprise. Cette mesure intervient, selon lui, pour fournir des cadres qualifiés et des compétences spécialisées pour soutenir la compétitivité des secteurs productifs et accroître la capacité d'attirer les investissements étrangers. S'agissant du volet lié à la transition numérique, le responsable gouvernemental a fait état de la préparation d'un nouveau programme de formation. Ce programme servira, selon lui, à doubler le nombre de diplômés et de répondre aux besoins en matière de ressources humaines, pour atteindre 22.000 diplômés en 2026 et 50.000 à l'horizon 2030.