Les Guinéens et le monde entier s'apprêtent à vivre un moment historique dans l'action judiciaire dans ce pays. Il s'agit du méga procès du massacre du 28 septembre 2009 survenu au stade portant le même nom à Conakry. La date du 28 septembre 2022 a été donc officiellement retenue pour la tenue du procès de cet événement douloureux. Il a fallu attendre 13 ans, jour pour jour, pour qu'enfin les présumés auteurs de ces crimes soient entendus, avec plus de 150 meurtres et 100 viols selon l'ONU. « Ce procès va revisiter notre histoire et faire en sorte que nous (en) sortions tous avec une nouvelle vision de la Guinée, où l'impunité n'aura plus désormais sa place », a déclaré le ministre de la Justice Alphonse Charles Wright, au sortir d'une réunion du comité de pilotage du procès. Pourquoi tant de temps perdu alors que les victimes attendent réparations ? Le conseiller du ministre et porte-parole de la chancellerie, Kairaba Kaba, a la réponse toute trouvée. Pour lui, les précédents gouvernements n'ont rien fait pour les victimes. « Depuis la commission de ce crime de masse, il y a treize ans, qu'est-ce qui avait manqué pour que ce qui se prépare maintenant, ce qui est prêt à se tenir maintenant, se réalise ? Un seul élément : la volonté politique. À la faveur des changements intervenus, on a eu à la tête de ce pays un homme qui a de l'énergie, qui a de la volonté, qui veut faire avancer les choses. Je veux parler du colonel Mamadi Doubouya », déclare-t-il dans un média de la place. Dans le fil des événements, tout a commencé ce 28 septembre 2009 quand un regroupement d'ONG et de partis d'opposition organise un rassemblement dans le principal stade de la capitale guinéenne. Des milliers de personnes protestent contre une possible candidature du chef de la junte militaire d'alors, Moussa Dadis Camara, à la présidentielle prévue en janvier 2010. Sanglante répression Celui-ci avait pris le pouvoir en décembre 2008 à la faveur d'un putsch et s'était autoproclamé président. Pour réprimander les manifestants, le pouvoir envoie l'armée qui se livre à une sanglante répression dans et autour de l'enceinte aboutissant à des morts et des viols en masse. L'instruction judiciaire s'est achevée en décembre 2017, avec le renvoi d'une douzaine de prévenus devant un tribunal, dont Moussa Dadis Camara. Aujourd'hui, avec cette annonce, c'est un ouf de soulagement pour qu'enfin s'ouvre ce procès pour que les Guinéens puissent se réconcilier entre eux dans la paix et la concorde. Et la présence à Conakry du procureur général de la Cour pénale internationale, Karim Khan, devrait contribuer à l'instauration de ce climat. Cependant, personne ne peut prédire la fin de ce gigantesque procès aux ramifications multiples. Enfin, du côté des victimes, on ne cache pas sa joie même circonspecte. Comme c'est le cas d'Asmaou Diallo, présidente de l'association des victimes, parents et amis du 28 septembre 2009 et qui a qui a perdu son fils au stade. « Aujourd'hui, je ne peux pas dire que je me sens bien, mais je peux dire que je me sens mieux, car je dois attendre l'ouverture effective de ce procès, voir les accusés dans le box et ensuite dire un mot ». On comprend dès l'enjeu de ce procès.