Le secteur du BTP n'échappe pas au contexte économique national et international, généralement défavorable. En 2022, ce secteur continuera à faire face à plusieurs défis hors de contrôle par les opérateurs du secteur, prévoit CDG Capital Insight. L'industrie des matériaux de construction devrait bénéficier cette année d'un cycle de relance du secteur BTP, souligne la banque d'affaires dans une nouvelle analyse intitulée « 2022, le secteur BTP à l'épreuve de plusieurs défis ». « En effet, dans le but de relancer l'économie après les retombées liées à la Covid-19, le gouvernement marocain a fortement augmenté les dépenses d'investissement afin d'effectuer des mises à niveau importantes dans les infrastructures. Ainsi, lors de l'approbation de la Loi des Finances 2022, le gouvernement a annoncé son plan de promotion des investissements publics en allouant un montant de 245 Mrds de MAD pour cette année, soit une progression de 6,5% comparée à l'année d'avant », ajoute la même source. Plusieurs projets de grande envergure opérant dans différents secteurs seront lancés, en effet, cette année. Il est prévu, à titre d'exemple, l'ouverture de 9 Centres des métiers et compétences entre les rentrées scolaires 2022-2023 et 2023-2024, le lancement de la construction du nouveau centre hospitalier universitaire Ibn Sina, ainsi que du port de Dakhla Atlantique... Vers un essoufflement du marché immobilier L'année 2021 a battu tous les records en termes de statistiques immobilières : 459.766 transactions immobilières ont été enregistrées en 2021, soit une hausse de 51% comparée à 2020 et de 29% comparée à l'année 2019. CDG Capital Insight attribue ce boom sans précédent aux raisons suivantes: report des ventes de 2020 (année de confinement) sur 2021, prolongation de l'exonération et réduction des droits d'enregistrement relatifs à l'acquisition d'un bien immobilier, et enfin attrait des taux immobiliers. Toutefois, 2022 devrait marquer la fin de cet engouement, suite à des perspectives économiques moroses. Des perspectives négatives soutenues par une détérioration de déficits jumeaux, une hausse du niveau d'endettement, une forte appréciation des prix des matières premières et énergétiques, et une campagne agricole dans des conditions climatiques qui semblent globalement défavorables avec une très faible pluviométrie. Dans ce sens, CDG Capital Insight pense que 2022 devrait afficher un ralentissement au niveau de l'offre, en attestent les ventes de ciments et les crédits alloués aux promoteurs immobiliers. « Ainsi, à fin mai 2022, les ventes de ciments ont reculé de -3,1% en comparaison avec la même période de l'année 2021. Le repli des ventes de ciments a été plus accentué dans les segments « Distribution » et « Bâtiments » qui ont affiché des baisses respectives de 8,3% et 4,1% à fin mai 2022 », indique la banque d'affaires. En parallèle, les crédits aux promoteurs immobiliers ont baissé de 2,3% à fin mars 2022 en comparaison avec la même période en 2021, atteignant ainsi un montant de 54,4 milliards de dirhams. Par ailleurs, bien que les taux immobiliers demeurent bas par rapport à leurs niveaux historiques, le pouvoir d'achat des acquéreurs pourrait freiner la demande en immobilier pour l'année 2022, prévoit la même source. « En effet, le repli des revenus agricoles et les tensions inflationnistes devraient peser sur le pouvoir d'achat des ménages. Ainsi, selon le HCP, le pouvoir d'achat s'améliorerait de seulement 0,7% en 2022 », argumente la banque. Les tensions géopolitiques impactent les coûts de l'énergie pour le secteur Au Maroc, les cimenteries et sidérurgistes utilisent du coke de pétrole et du fuel importé comme combustible dans les fours pour la production de clinker et du rond à béton. En raison des tensions géopolitiques dans le monde, les prix des intrants ont fortement augmenté durant l'année 2022. En effet, les prix des principaux intrants comme le coke de pétrole et le fuel ont connu une hausse sans précédent au courant de cette année. « Nous avons pris en compte l'inflation des coûts à hauteur de 52,8% pour le pet coke et 42,8% pour le fuel », précise CDG Capital Insight. Globalement, les charges d'exploitation devraient augmenter de 3% pour les cimenteries cotées. Par ailleurs, la parité dollar/ dirham a atteint sur les six premiers mois de l'année 2022 une moyenne de 9,65, soit une baisse de 8,2% comparée à la même période en 2021. De ce fait, vu que les prix des combustibles et du fret sont libellés en dollars, la hausse des coûts des matières premières devrait être alourdie par la hausse de la parité dollar/dirham. Une hausse générale des prix de vente des matériaux de construction CDG Capital Insight note, par ailleurs, que la hausse des prix de vente de ciment et celle du rond à béton a souvent été tirée, durant les dernières années, soit par une baisse des taux d'utilisation, ou par une forte inflation des coûts de l'énergie, principalement le pet coke. En effet, les cimenteries et les sidérurgistes compensent généralement la forte inflation des coûts par une hausse des prix. En 2022, tous les producteurs de matériaux de construction devraient être confrontés à une forte hausse des coûts des intrants en raison du fort renchérissement du pet coke, de la ferraille, du fuel et du diesel. Pour cette année, CDG Capital Insight pense que les producteurs de ciment devraient augmenter leurs prix de près de 4% afin de compenser l'inflation des coûts et la baisse des volumes. Par ailleurs, les prix d'acier devraient continuer sur la même tendance que celle entamée en 2021. En effet, alors que l'attention s'est tournée vers le conflit entre la Russie et l'Ukraine, les prix de l'acier européens, chinois et américains ont fortement augmenté cette année. Les prix du rond à béton ont affiché une tendance haussière dans l'ensemble des régions et ont même réussi à franchir les prix records atteints en 2008, poursuit la même source. Après avoir atteint des niveaux historiquement élevés durant les premiers mois de l'année 2022 avec environ 1100 $/tonne pour le rond à béton en Europe du Sud, 1365 $/ tonne pour le rond à béton en Europe du Nord et 930 $/tonne pour le rond à béton turc, les prix de l'acier ont baissé d'environ 15% par rapport à leur niveau actuel. Malgré cette baisse, CDG Capital Insight, citant les données de Bloomberg, fait remarquer que les prix de l'acier semblent toujours élevés et restent au-dessus des moyennes des 3 dernières années de 531,2 $/tonne pour le RAB turc, 583 $/tonne pour le RAB en Europe du Nord, et 494,6 $/tonne pour le RAB en Europe du Sud. « Nos perspectives concernant les prix d'acier long restent favorables cette année. Nous prévoyons que ces prix continueront de rester au-dessus des niveaux moyens mentionnés précédemment et contribueront à la rentabilité opérationnelle des sidérurgistes marocains en 2022 », note la même source. A. CHANNAJE L'acier, le ciment... confrontés à des pressions inflationnistes
Les principaux matériaux de construction, notamment l'acier, le ciment, l'aluminium et la céramique, sont confrontés à des pressions inflationnistes. Ce qui est, d'après les analystes de CDG Capital Insight, largement attribué à la pénurie croissante de matières premières et aux prix mondiaux des matériaux, en sus des défis logistiques et de l'augmentation des prix du carburant. En effet, le début de la pandémie a entraîné un ralentissement soudain des activités économiques à l'échelle mondiale, impactant fortement le prix et le niveau de stocks des matières premières. Ainsi, depuis janvier 2020, les prix de l'acier ont augmenté de 72% à 489,2 USD la tonne métrique, l'aluminium a connu une hausse de 55,5% à 2864,8$ la tonne métrique, suivi d'une hausse de 92,4% des prix du carburant (principalement du diesel) pour atteindre environ 1906,3$ la tonne.