Dans la foulée des débats en cours visant à donner sens aux horribles événements de Nador la semaine dernière, qui ont entraîné la mort de 23 migrants subsahariens, l'agence espagnole EFE éclaircit les faits, notant qu'il s'agit d'un crime organisé des mafias migratoires. Une reconstruction riche d'enseignements et braquant sous les projecteurs une mafia internationale organisée, avec une importante base logistique en Algérie, à Maghnia, près de la frontière algérienne, apprend-on des extraits des témoignages publiés par EFE. L'assaut du 24 juin n'a fait que confirmer les pires craintes des forces de l'ordre marocaines et espagnoles, à savoir que les gangs organisés soient davantage entraînés dans les violents combats de rue, la guérilla et la fabrication d'armes de fortune. Malheureusement, ces hypothèses se confirment. Organisation paramilitaire, beaucoup de logistique et hiérarchie, la base algérienne, dirigée par un nommé président malien de 35 ans, est si organisée qu'il a été difficile pour les autorités algériennes de la découvrir. 64 prévenus comparaîtront en deux groupes, dans deux procès séparés, les 4 et 13 juillet. Certains griefs sont graves, comme la séquestration des forces de l'ordre, la violence, l'organisation criminelle, la traite des êtres humains, et la possession d'armes, indique l'agence espagnole, citant des déclarations recueillies par le parquet de Nador dans le cadre de l'enquête portant sur les événements survenus au point de passage Barrio Chino, entre Nador et Mellilia. Les propos rapportés par EFE mettent en lumière les réseaux criminels opérant sur plus de 5 000 km et coordonnant via des organisations légales et des groupes fermés sur Facebook, ce qui explique les attaques contre la clôture à la frontière entre l'Espagne et le Maroc qui sont devenues plus brutales, coordonnées et dévastatrices ces dernières années. Bien que le Maroc se soit avéré un obstacle important aux flux migratoires illicites vers l'Europe, le Royaume n'a pas été en mesure d'empêcher la dernière tragédie. Ce qui souligne la nécessité du renforcement des ressources et de véritables partenariats pour la lutte contre la migration illégale, d'autant plus que le Maroc utilise ses propres ressources pour garder 3500 kilomètres de mer et 3400 kilomètres de frontières terrestres. Dans ce sens, l'Agence a fait savoir que les Soudanais interrogés sont originaires du Soudan, du Darfour ou du Soudan du Sud, révélant que pour quitter leurs régions, ils ont payé 50 à 70 euros chacun, pour se retrouver en territoire libyen. A partir de là, deux routes sont empruntées : soit Libye-Algérie-Maroc, ou Tchad-Niger-Mali-Algérie- Maroc. Pour passer de l'Algérie au Maroc, il fallait débourser 300- 500 euros par personne. Les deux routes aboutissent donc en Algérie. Selon les migrants eux-mêmes, dès qu'ils atteignent les montagnes près de Nador, le territoire marocain limitrophe de Mellilia, ils s'organisent en campements forestiers en attendant un moment pour sauter par-dessus la clôture, dans une structure hiérarchisée avec un chef et des sous-groupes commandés par une dizaine de patrons. Kawtar CHAAT