Privées de leur période de repos biologique, pendant laquelle elles se reproduisent, les sardines se font de plus en plus rares sur les marchés. Les férus de cette espèce des clupéidés constatent de plus en plus que les bateaux reviennent à quai avec de maigres prises. Une vingtaine de caisses à peine, liquidées avant l'aube. Au point où même les mouettes, éternelles rieuses, ne sont plus de la fête. L'époque où la sardine était le poisson du pauvre et le Maroc son port mondial semble, selon un grand nombre de pêcheurs, révolue.
Le non-respect de la période du repos biologique et les nouvelles technologies de pêche introduites à la fin des années 1980 – sonars, sondeurs, radars et augmentation de la capacité des sardiniers – seraient la cause majeure de cette régression. De véritables machines de destruction des réserves pélagiques, relèvent certains professionnels avertis.
La population de la sardine n'a fait que diminuer au fil des ans. Le secteur de la pêche de la sardine, précise une source responsable, emploie un grand nombre de marins, et à titre d'exemple, l'effectif des travailleurs dans un bateau de pêche traditionnel varie entre 30 et 50 personnes, en plus des commerçants en gros et des vendeurs au détail.
Procédant à une comparaison entre les revenus de la pêche de la sardine des bateaux de pêche côtière pour les années 2019 et 2020, le délégué provincial à la pêche maritime a pour sa part indiqué qu'en dépit de la propagation de l'épidémie du Coronavirus qui a touché 2.135 marins, la production se chiffrait en 2019 à 13.564 tonnes de sardines générant un revenu net estimé à 43,61 millions de dirhams, alors qu'en 2020, la production a atteint 12.558 tonnes et un revenu net de 40.88 millions de dirhams.
Pour sa part, Mohamed Ghazouani, propriétaire d'un bateau de pêche traditionnel, a souligné que la sardine est abondante sur les côtes d'El Jadida tout au long de l'année, néanmoins cette abondance accuse une baisse durant les quatre premiers mois de l'année car cette espèce entame le processus de reproduction et préfère donc vivre aux profondeurs de la mer.
Mettant l'accent sur l'importance du repos biologique pour la reproduction des poissons, M. Ghazouani a également indiqué que les anciens marins arrêtaient la pêche en janvier, février, mars et avril de chaque année et partaient en congé durant cette période, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui malheureusement.
Il a, à cette occasion, rappelé les atouts nutritionnels de la sardine qui est très riche en protéines, ajoutant que les prix sont à la portée de toutes les classes sociales et « plus la capture est abondante, plus le prix est bas et vice versa».
C'est pourquoi une prise de conscience nationale semble on ne peut plus aujourd'hui impérative, pour assurer la continuité de la sardine marocaine dans un contexte mondial caractérisé par une insécurité alimentaire, conclut la même source.