Selon Mondaq, une agence juridique américaine, la loi-cadre n° 69-19 relative à la réforme fiscale, adoptée en Conseil des ministres en juillet 2021 et votée lors de la législature précédente, est prête à entrer en vigueur. « Cette réforme fiscale se caractérise par dix thèmes phares et prioritaires dont la mise en oeuvre est prévue d'ici cinq ans. Dans ce qui suit, nous aborderons les priorités à prendre en considération dans le cadre de cette réforme fiscale, les objectifs fondamentaux à atteindre, les modalités de mise en oeuvre et la date d'entrée en vigueur de cette loi-cadre », souligne Mondaq dans une analyse intitulée : « Nouvelle réforme fiscale au Maroc : orientations, objectifs et méthodes à utiliser », publiée durant ce mois de novembre. Afin d'actualiser la politique fiscale du pays, rappelle l'agence juridique américaine, le Maroc s'est fixé comme priorité l'incitation aux investissements productifs, porteurs de valeur ajoutée et de création d'emplois de qualité. Le but est de faire du Maroc un véritable hub d'investissement et en même temps d'assurer l'employabilité de la population active et formée. Le Royaume s'est fixé aussi comme priorités : le développement territorial et la consolidation de la justice spatiale pour favoriser la mise en place d'une régionalisation avancée comme choix politique optimal, la réduction des inégalités géographiques et sociales, l'ouverture aux meilleures pratiques internationales, et la consolidation de la confiance des contribuables... Objectifs fondamentaux à atteindre Sur la base de ces priorités, Mondaq, dont le siège est basé à New York, avance que cette réforme, longtemps attendue, vise à atteindre un certain nombre d'objectifs jugés fondamentaux. D'abord, renforcer la contribution de l'Etat et des collectivités territoriales au financement des politiques de développement économique et social. Ensuite, diminuer la charge fiscale des contribuables au fur et à mesure de l'élargissement de l'assiette de cotisation, et renforcer le principe de neutralité fiscale en matière de TVA par l'inclusion d'activités considérées, à ce jour, hors du champ de la TVA, telle que l'agriculture. La nouvelle réforme fiscale a pour ambition également de converger les régimes préférentiels avec les normes et standards internationaux, et les bonnes pratiques fiscales telles que les normes de l'OCDE et les meilleures pratiques de l'Union Européenne, d'encourager les entreprises à consolider leur compétitivité nationale et internationale, de mobiliser l'épargne et l'orienter vers les secteurs productifs, de mettre en oeuvre progressivement le principe de l'imposition globale des revenus des particuliers, et de simplifier et rationaliser les impôts pour les collectivités locales... « En effet, la nouvelle réforme fiscale vise à réduire le nombre de taxes locales, qui sont actuellement au nombre de 17 telles que la taxe d'habitation et la taxe sur les permis de chasse, et à rendre la fiscalité locale plus adéquate et unifiée », avance l'agence juridique américaine. Autre objectifs fondamental à atteindre : intégrer le secteur informel dans l'économie structurée à travers la mise en place d'une fiscalité simplifiée et accessible, l'élaboration et la mise en oeuvre d'un programme de sensibilisation et d'accompagnement, simplification et adaptation du régime fiscal applicable aux activités locales générant des revenus modestes, et renforcement des mécanismes de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales... Méthodes de mise en oeuvre D'après Mondaq, la mise en oeuvre des objectifs et mesures prioritaires susmentionnés sera concrétisée à travers plusieurs mécanismes. D'abord, la consécration du principe de neutralité fiscale, notamment en matière de TVA, étant subordonnée au maintien de l'exonération des produits de base, qui incluent, à notre avis, ceux considérés par le Code général des impôts marocain comme des produits de première nécessité, comme la farine, le sucre, le beurre. Cette consécration de la neutralité se fera par trois mesures. La première a trait à l'élargissement du champ de la neutralité TVA pour intégrer d'autres activités qui n'étaient auparavant pas concernées par cette taxe. Pour la seconde mesure, il s'agit de réduire le nombre de taux de TVA. Mondaq rappelle dans ce cadre que les taux de TVA en vigueur sont de 7 % (produits pharmaceutiques, fournitures scolaires et conserves de sardines, etc.), 10 % (honoraires d'avocats et de notaires, opérations bancaires, etc.), 14 % (opérations de transport et énergie électrique, etc.), et 20 % (activités/opérations auxquelles les autres taux ne sont pas applicables). La troisième mesure porte, quant à elle, sur la généralisation du droit au remboursement de la TVA. Un mécanisme qui permet aux entreprises ayant des crédits de TVA et qui obéissent à certaines règles de demander un remboursement auprès de l'administration fiscale. D'après Mondaq, d'autres mécanismes seront déployés pour mettre en oeuvre les objectifs et mesures prioritaires de la nouvelle réforme fiscale. Parmi ces mécanises : - Convergence progressive vers un taux unifié d'impôt sur les sociétés, notamment pour les activités industrielles ; - Diminution progressive des taux de cotisation minimale en diminuant continuellement le taux afin de supprimer à terme la cotisation minimale ; - Mise en place d'incitations pour favoriser le développement d'entreprises innovantes, notamment les start-up et les structures d'accompagnement (incubateurs et accélérateurs) et agrégateurs d'auto-entrepreneurs ; - Réorganisation du barème progressif de l'impôt sur le revenu applicable aux personnes physiques et élargissement de l'assiette de cet impôt. De cette façon, une certaine équité fiscale est recherchée à travers l'allègement de la classe moyenne, qui a généralement les salaires comme revenu principal, et qui peut être imposée jusqu'à 38 % ; - Convergence des tarifs prévus par les régimes préférentiels, applicables aux zones de service et d'accélération industrielle vers un tarif unifié ; - Prévoir des mesures fiscales appropriées pour développer le secteur culturel, promouvoir l'économie sociale, et protéger l'environnement, notamment par la mise en place d'une taxe carbone. Pour conclure, Mondaq estime que la réforme fiscale devrait permettre au Maroc d'avoir une politique fiscale plus conforme à son statut de puissance économique africaine, « à conditions qu'elle soit aussi juste et efficace favorisant la création de valeur ajoutée et la réduction des inégalités, et qui faciliterait la pression sur certains contribuables, notamment les salariés ». A. CHANNAJE Article 16 : fournir un service de qualité aux contribuables En vertu de l'article 16 de cette loi-cadre, l'administration fiscale doit fournir un service de qualité aux contribuables. A cet effet, l'Etat veille à poursuivre le processus de modernisation et de digitalisation des services de l'administration fiscale. L'Etat veille aussi à renforcer le professionnalisme et les capacités des ressources humaines chargées des métiers d'assiette, de recouvrement, du contrôle et du contentieux. L'Etat veille enfin, dans le but de fournir un service de qualité aux contribuables, à développer les relations de coopération avec les partenaires de l'administration fiscale et enrichir les bases de données, à travers le développement de l'interopérabilité entre les systèmes d'information, dans le respect de la législation en vigueur en matière de protection des données à caractère personnel.