L'absence d'une réglementation dans le monde virtuel ouvre la voie à des dérives. Dans le milieu de vide-dressing, nombreux sont les dépassements des vendeurs (contrefaçon, arnaque...). Instagram (IG) est bien plus qu'un espace pour prendre et publier de superbes photos de voyages et de selfies, de suivre les célébrités préférées et de publier des mises à jour de son «story IG». Aujourd'hui, plusieurs personnes utilisent ce réseau social pour gagner de l'argent. Oui, il y a tout un monde de commerce dans «Insta-land», et plusieurs personnes arrivent à gagner de l'argent en vendant des vêtements déjà portés. Même les personnes qui ne sont pas familières avec le concept, ont forcément déjà entendu le terme «vide-dressing». Avec une recherche rapide qui inclut des hashtags comme «#Instashop», «#ShopMyCloset», «#InstaSale», «Vide-dressing», il est possible de trouver des millions de publications de personnes ou de «comptes Instagram» qui cherchent à tout vider, allant des rares sacs à main Chanel aux robes maxi vintage, tout en passant par J.Crew pré-portées. Vide-dressing : un phénomène mondial qui ne cesse de se développer Auparavant, les gens achetaient leurs vêtements, les suspendaient dans leurs placards, les portant plusieurs fois (ou ne les portant jamais). Finalement, ces vêtements ont été soit donnés à une organisation caritative ou à une personne dans le besoin, soit jetés à la poubelle. Mais les choses changent rapidement, car le «re-commerce» de la mode - location, revente, etc. - devient une partie plus importante du secteur de la vente. Le vide-dressing va bon train, avec plusieurs commerces, «pionniers» dans ce domaine, aujourd'hui âgé de 10 ans. Le marché mondial du vide-dressing en ligne devrait croître au cours des quatre prochaines années de plus de 10%, chaque année, selon MarketWatch. Et le marché de la revente de mode s'est développé 21 fois plus vite que le commerce de détail traditionnel au cours des trois dernières années, rapporte Fortune. Les milléniaux et la génération Z, en particulier, aiment fréquenter les magasins d'aubaines, dénicher les derniers vestiges des dernières destinations shopping à la mode. Une recherche menée entre 2013 et 2019 sur la pratique en ligne du vide-dressing montre que le développement des plates-formes spécialisées dans l'achat et la vente de vêtements d'occasion modifie les manières d'échanger entre particuliers. Ces plates-formes digitales font disparaître de nombreuses interactions qui, jadis, se déroulaient en face à face et contribuent à produire de nouvelles formes de socialités entre les individus. L'objectif est avant tout de «shopper» la bonne affaire et de vendre plus et plus vite pour «booster» le budget. Une meilleure réglementation s'impose dans le Royaume Au Maroc, le concept du vide-dressing est très populaire. Plusieurs comptes sur Instagram proposent des vêtements de luxe, déjà portés, aux internautes marocains. En revanche, contrairement à d'autres pays où le milieu du commerce en ligne est réglementé, l'absence de réglementation dans le Royaume laisse place à plusieurs dérives. Entre contrefaçon, arnaque et concurrence déloyale, nombreux sont les dépassements des vendeuses et des «instagrameuses». Alors que d'autres business du même registre se battent pour payer leurs taxes et déclarer leurs employés, d'autres «vide-dresseurs» préfèrent exercer loin de tout fondement juridique ou légal. Les premières victimes demeurent sans aucun doute les clients, qui sont toujours sous le risque de faire l'objet d'arnaques. Cela peut aller d'un tarif élevé à la contrefaçon. En l'absence d'une réglementation stricte, ces victimes portent rarement plainte et plusieurs d'entre eux ignorent qui sont les véritables vendeurs. Ceci dit, ces mêmes clients ont leur part de responsabilité car ils encouragent des business qui opérent dans l'économie parallèle, au lieu de se contenter de ceux qui choisissent de pratiquer en toute légalité. Sans oublier qu'une approche pourrait inciter plus de personnes à sortir de l'ombre du «commerce clandestin» vers le chemin d'un commerce entièrement légal. Hajar LEBABI Repères Vers une mode écologique Alors que le monde de la mode évolue vers un modèle plus durable et que les préférences en matière de dépenses de la génération Y obligent les marques à être plus responsables, l'économie fait la transition de quelque chose que quelques valeurs aberrantes ont fait pour économiser de l'argent à être positionné la prochaine grande tendance de la mode. En effet, plus de marques commencent à opter pour un mode de production plus durable, que ce soit dans le tissu des vêtements ou dans le packaging utilisé. Porter le luxe même en pandémie La crise du coronavirus ne semble pas freiner les amoureux de la mode et du luxe. Alors que le Royaume, comme le reste du monde, sombre dans une crise pandémique inédite, les «vide-dressing» semblent se maintenir. Il suffit d'une petite recherche sur internet, pour voir les différents «showroom» qui se tiennent dans quelques villes du Maroc, comme Rabat, Casablanca et Marrakech. Alors que certains trouve cela complètement aberrant, notamment en cette période d'incertitude, d'autres pensent que c'est une pratique tout à fait normale, comme les autres commerces qui reprennent vie petit à petit. 3 questions à Narjiss Mossadak : «Un cadre légal nous offre une ouverture que les autres n'ont pas» Femme de l'administration et fondatrice de «jeshop.ma», l'unique plateforme de vide-dressing au Maroc qui opère dans un cadre légal, Narjiss Mossadak nous parle de son expérience. -Vous vendez des produits de luxe qui sont normalement destinés aux personnes aisées. Qu'est ce qui caractérise votre clientèle ? La vocation première des vide-dressings de part le monde demeure la démocratisation du luxe en le rendant plus accessible. Vous me posez la question quant au profil type de notre clientèle ...il n'y en a pas réellement. En effet, cela va des clientes les plus aisées aux serial shoppeuses qui ont simplement et littéralement besoin de vider leur dressing pour avoir de l'espace pour des nouvelles pièces qu'elles achètent régulièrement. En passant par les fashionistas toujours à l'affût de la IT pièce tendance aux chineuses amoureuses de vintage et/ou de pièces rares ou uniques, à la personne qui n'aurait pas nécessairement les moyens de s'acheter un article de luxe neuf en boutique. La particularité et la force des vide-dressings qui se respectent c'est que même une personne en vide-dressing bénéficie d'un traitement égal ou similaire à celui d'une grande enseigne. En Occident, ce métier se fait de manière assez chirurgicale ; à savoir complètement virtuel. En revanche au Maroc, c'est différent car l'humain prime et c'est ce qui fait toute la beauté de ce métier. De belles rencontres se font et de belles amitiés se tissent. -Vous êtes le seul business de vide-dressing qui se base sur un cadre juridique légal. Parlez-nous un peu de cela ? Tous nos employés sont déclarés à la CNSS, nous payons la TVA et la taxe professionnel et nous sommes inscrits au registre du commerce de Rabat. Toutes nos transactions sont bancarisées, afin de garantir une traçabilité. En même temps, j'estime qu'il est normal de redistribuer même à son petit niveau car il est trop facile de se plaindre du manque d'infrastructure dans ce pays quand on ne contribue pas. J'avoue que ça été très dur avec un investissement très lourd dans un écosystème sans pitié mais je crois dur comme fer que l'intégrité, la persévérance, le sérieux finissent toujours pas payer. -Quels sont les défis d'opérer dans un tel secteur, où la contrefaçon et l'informel sont monnaie courante? La contrefaçon est inhérente à tous les domaines. Afin de pouvoir offrir un service 360 à nos clientes, nous avons signé un contrat avec une grande entité française spécialisée dans l'authentification. Pour conclure aucun business n'est facile, je crois au système et c'est la seule manière de pouvoir évoluer de manière structurée. D'ailleurs avec si peu de temps d'existence, nous avons pu collaborer avec de grandes enseignes comme le festival international du film de Marrakech et le festival Mawazine-Rythmes du Monde, ainsi qu'avec des créateurs et des personnalités comme Albert Oiknine et Said Mahrouf. De nouvelles choses sont en cours et de nouveaux projets verront le jour d'ici quelques mois. Un cadre légal nous donne une ouverture que les autres n'ont pas. Sur le long terme, cela nous permet de rayonner et d'aller plus loin. «Instagrammers» : le nouvel outil incontournable de marketing Elles sont connues, cool et branchées. Leurs abonnés sur Instragram se comptent par milliers et leur succès ravit les marques qui n'hésitent pas à les solliciter pour profiter de leur visibilité. Mannequin et actrice, très active sur les réseaux sociaux, Tafukt (qui signifie soleil en Amazigh), fait partie de ces personnalités fortement sollicitées par plusieurs marques. «Je ne me considère pas comme étant une personnalité publique. La principale raison pour laquelle les marques sont attirées par ma personne est basée sur mon contenu et mon apparence. Dans l'ensemble, ils s'intéressent à mon image de marque. Si leur produit ou contenu s'allie à mes valeurs et à mon thème, il fait un beau résultat», nous déclare Tafukt, qui vient de faire son apparition dans la célèbre publicité de «Raibi Jamila». Pour accepter ses collaborations, Tafukt doit être convaincue du produit en question ou de son contenu. « Je dois avoir le sentiment de pouvoir contribuer correctement à la manière dont il doit être montré au public. Le produit lui-même n'a pas à être contre ou lié à des entreprises, des sujets ou des mouvements auxquels je suis personnellement contre», insiste-t-elle. En effet, Tafukt participe dans deux types de collaborations. «Si c'est une marque qui me réserve pour tourner un produit et un modèle spécifiques pour elle, la collaboration doit être payée impérativement. Le produit est vendu, donc la marque en profite et ma présence ou mon interprétation n'est pas gratuite. D'un autre côté, il y a la possibilité de recevoir des produits (que ce soit des vêtements ou des bijoux ..) qui m'ont été envoyés afin que je puisse proposer du contenu et être moi-même créatif puisque je fais aussi de la photographie, ce qui nous amène à une situation gagnant-gagnant», déclare-t-elle. «Sur le plan personnel, cela m'a permis de découvrir le plaisir du travail, de la patience et de l'énergie payante. Inutile de dire que cela m'a également permis de créer de nombreuses relations et d'amitiés et d'avoir un environnement qui accepte et soutient tout ce qui concerne l'art ou la création», conclut Tafukt. Vide-dressing solidaire : offrir une deuxième vie à ses tenues Bien qu'il ne soit pas aussi connu que son homologue au Maroc, le vide-dressing solidaire est un concept aussi populaire et pratiqué. Partout dans le monde, et rarement dans le Royaume, des vide-dressings sont organisés pour venir en aide aux personnes dans le besoin. En effet, l'objectif est d'aider les personnes en situation difficile, qu'elle soit sociale, financière ou autres, à remplir leur dressing de tenues. Ceci dit, les articles proposés ne proviennent pas forcément de marques de luxe. Ces vêtements peuvent aider la personne dans son quotidien ou pour d'autres occasions, comme le fait de se rendre à un entretien ou pour faire son premier pas en entreprise. Le vide-dressing solidaire peut être pratiqué en ligne ou sur place, par des personnes qui souhaitent offrir une deuxième vie solidaire à leurs tenues.