Victime de chutes et autres blessures, l'oiseau emblématique de la capitale du Gharb est au cœur d'une forte mobilisation citoyenne. Par Hayat Kamal Idrissi
« La cigogne est l'oiseau emblématique de Kénitra. Ses grands nids sont partout. Il est devenu l'un des « habitants » de la ville. Si on se mobilise aujourd'hui pour sa protection, c'est aussi une action pour sauvegarder une composante culturelle de la cité », nous explique d'emblée Dr Mustapha Abidi, vétérinaire retraité. Lui, c'est le meneur volontaire de cette large opération de sauvetage des cigognes de Kénitra. Véhément défenseur de la cause écologique, Abidi découvre un jour, en 2016, une cigogne blessée dans l'une des rues du centre ville. « Je l'ai récupéré aussitôt, soigné et pris soin d'elle jusqu'à ce qu'elle a pu se remettre sur ses pieds. Je l'ai relâché ensuite dans la réserve naturelle de Sidi Boughaba », nous raconte le vétérinaire. Un premier sauvetage qui donnera suite à plusieurs autres tout en mobilisant les autres citoyens. « Les réseaux sociaux nous ont beaucoup aidé. Les pages d'information de la ville, les partages sur Facebook ont joué également un rôle primordial dans la sensibilisation de la population locale », ajoute-t-il.
Mystère
Une sensibilisation qui a donné ses fruits surtout ces derniers mois. « S'il est assez fréquent que des cigognes se blessent, chutent ou tombent malades, nous avons constaté toutefois une certaine hausse du nombre de cas signalés ces derniers temps. Sans pour autant en connaitre les véritables raisons », nous affirme Abidi. En attestent d'ailleurs les nombreuses annonces relatées par les pages consacrées à la ville sur Facebook. Des explications à ce phénomène mystérieux ? « Ce ne sont que des hypothèses vu qu'aucune étude scientifique n'a été mené. La forte urbanisation de la ville et les hautes bâtisses limitent l'espace vital des cigognes et freinent leur entrain », explique le volontaire en creusant une autre piste. « Il y a aussi une hypothèse liée au confinement. Après l'allègement des restrictions, le nombre de cas augmente. Je suppose que les cigognes se sont trop habituées à avoir la ville pour elles seules pendant le confinement. Le retour à la normale, le mouvement et la circulation ont causé peut être leur stress », analyse le sauveur de cigognes.
Mobilisation citoyenne
Enrôlant d'autres vétérinaires et d'autres influenceurs de la ville dans son action, Abidi est profondément reconnaissant. « L'aide des citoyens dans le repérage et la récupération des oiseaux blessés est si précieuse. Même les enfants sont de plus en plus sensibles. Nous les impliquons davantage pour une meilleure éducation écologique », ajoute-t-il. Une fois les oiseaux soignés et remis sur pied, ils sont aussitôt « réintégrés » dans leur milieu naturel. « En concertation et avec la permission des responsables de la réserve naturelle de Sidi Boughaba, toutes les cigognes sauvées sont relâchées dans ce milieu propice à leur convalescence. Par expérience, nous avons constaté que cette « réintégration » accélère en effet leur rémission », affirme le vétérinaire. Rappelons que le lac de Sidi Boughaba est une destination privilégiée des oiseaux migrateurs. Si certaines cigognes s'y sont sédentarisées, d'autres espèces y arrivent chaque année pour passer la saison froide. Véritable refuge, la réserve serait également un centre de convalescence pour les oiseaux souffrants.