Presque deux mois avant la tenue des 3ème assises de la fiscalité, les travaux préparatoires vont bon train afin de déterminer les grandes orientations de la future réforme fiscale. Ministère de finances, CGEM, DGI, chambres de commerce et d'industrie, experts comptables… ont du pain sur la planche. Par Mounia Kabiri Kettani
Si les recettes fiscales constituent l'essentiel des recettes de l'état, seul 57 MMDH sur les 246 MMDH part à l'investissement », lance d'emblée Mohamadi Rachdi El Yacoubi comptable agrée DG de Marrakech Consulting Group. Et d'ajouter « Nous sommes en compétition avec des pays où chacun essaie d'avoir le système fiscal le plus attractif. Il nous faut aujourd'hui, un système incitatif qui nous permettra d'avoir le maximum d'investissements, capable de générer le maximum d'emplois ». Les experts sont unanimes : le système fiscal actuel tel qu'il est conçu ne peut permettre d'atteindre l'objectif d'équité fiscale, thème choisi pour les prochaines assises de la fiscalité qui seront tenues les 4 et 5 mai 2019. D'après Mohamed Hdid, président de la commission fiscalité à la CGEM, « Nous avons aujourd'hui besoin d'un régime fiscal attractif et inclusif appliqués à tous grâce à l'élargissement de l'assiette fiscale, la lutte contre la fraude et une meilleure intégration du secteur informel. La CGEM enchaine les réunions régionales pour débattre sur le sujet et définir les contours d'une future politique fiscale qui doit prendre en considération, entre autres, les nouvelles attentes et exigences des acteurs économiques, la dimension territoriale, la correction des dysfonctionnements constatés et le nécessaire élargissement de l'assiette fiscale pour soutenir la croissance de l'économie et la création de richesses et de la valeur ajoutée », explique le patron des patrons Salaheddine Mezouar. La DGI et les chambres de commerces s'associent aussi au processus. L'objectif n'est pas de présenter des doléances ou des mesures spécifiques, comme la baisse d'un taux ou la recherche d'une exonération. Il s'agit plutôt de déterminer les grandes orientations du système fiscal qui seront adoptées dans une loi cadre qui tracera la feuille de route pour les cinq prochaines années (à partir de 2020). Le président de la CGEM Marrakech/ Safi, Youssef Mouhyi tire la sonnette d'alarme. Selon lui, les TPE et les PME n'arrivent plus à résister à la concurrence déloyale et l'informel qui est en train de proliférer et qu'on n'a pas eu le courage politique de juguler. « Il faut rétablir la confiance à travers une fiscalité juste et sur tout le territoire national et éradiquer toutes les propositions fiscales qui créent la distorsion, nuisent à notre économie, condamnent nos entreprises et encouragent la fraude et la concurrence déloyale », insiste t-il. Concrètement, Youssef Mouhyi appelle à la révision de certaines taxes et exonérations sectorielles et la suppression du paiement de l'impôt forfaitaire. Ce dernier est, selon lui, une distorsion qui encourage certains qui engrangent des bénéfices très importants à cacher leurs achats et chiffre d'affaires réel pour ne pas dépasser le seuil les obligeant à avoir une comptabilité et déclarer leurs revenus. « On assiste aujourd'hui à une réelle fuite vers le forfaitaire et l'auto entrepreneuriat pour payer moins », regrette Mohamadi Rachdi El Yacoubi. Autre point qui soulève la polémique, la fiscalité locale. Le vice président de la région de Marrakech-Safi est catégorique. « La fiscalité locale manque de cohérence. Elle est composée d'un nombre important de taxes et de prélèvements difficiles à calculer et recouvrer. En plus, c'est une taxe qui paralyse l'investissement. Comment voulons nous encourager l'industrie alors qu'on taxe l'investissement », déclare t-il. Un autre expert de la fiscalité ajoute la problématique de l'impôt cédulaire. Il recommande ainsi de nouer avec le système d'une fiscalité globale sur tous les revenus plutôt que de taxer chaque revenu à part et réfléchir à l'adoption d'un impôt foyer comme c'est le cas dans de nombreux pays