Le mérite des rapports périodiques publiés par Bank Al-Maghrib est qu'ils permettent à l'institution de la banque centrale de «secouer le cocotier» lorsqu'ils tombent en période de crise ou, du moins, de stagnation. En l'occurrence, le document produit récemment par l'autorité financière du Royaume est une vraie sonnette d'alarme. Et elle est d'autant plus énergiquement tirée par le Wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, que ce dernier multiplie les mises en garde contre les risques de mauvaise gouvernance et l'effet induit dans la structure des crédits à l'économie. Le dernier rapport sur l'activité des établissements de crédit au titre de l'exercice 2010, récemment publié, pointe en détail les postes à surveiller de près à cause de leur caractère névralgique : chèques en bois, marges des banques, créances en souffrance… Si le document donne, et c'est normal, de la matière grasse aux médias, c'est auprès des banquiers qu'il est intéressant de diagnostiquer les attitudes. A leurs yeux, en effet, le problème le plus crucial a trait au ralentissement du rythme de distribution des crédits à l'économie. Un rythme qui était déjà de deux chiffres en 2009 mais qui ne dépasse guère les 6% aujourd'hui, selon Bank Al-Maghrib. Indicateurs éloquents Contexte de morosité oblige, les établissements bancaires sont de plus en plus réticents à traiter favorablement des dossiers de crédit, privilégiant souvent une approche qualitative pour des dossiers au contenu plus pertinent, mais évidemment de plus en plus difficiles à trouver. De leur côté, les entreprises semblent tirer un peu moins sur la corde des crédits à cause, entre autres, d'un ralentissement des commandes et donc du trend d'activité. D'où l'idée (excellente, du reste) de Bank Al-Maghrib qui a organisé récemment des tournées régionales pour promouvoir le financement des PME. Le ralentissement de l'économie, unanimement constaté, est aisé à appréhender par les chiffres, et ces derniers incitent à l'inquiétude. En effet, la principale activité des banques, la distribution de crédits, n'a progressé que de 2,6% entre les mois de mars 2010 et 2011. Le ralentissement concerne presque l'ensemble des segments de crédits. Pire encore : au titre du premier trimestre 2011, l'encours des crédits à l'équipement a enregistré une chute de 0,83% par rapport à fin décembre 2010. Or, ce type de crédits est un excellent indicateur du dynamisme d'investissement produit par le secteur privé. Les crédits aux promoteurs immobiliers sont, pour leur part, en stagnation par rapport au début de l'exercice (+0,57%) et même en baisse sur douze mois (-0,68%). Quant aux crédits à la trésorerie, ils accusent une régression de 4,5% sur le premier trimestre de l'année en cours. Enfin, un autre signe d'inquiétude interpelle : celui des dépenses des ménages. En effet, les crédits à la consommation n'ont connu qu'une très légère hausse (+1,03%) au titre du premier trimestre de l'année en cours. Ce qui fait dire aux analystes que l'exercice 2011 finira très probablement sous le signe de l'austérité…