Abbas El Fassi vient de présenter le bilan gouvernemental du mi-mandat législatif devant les Conseillers de la deuxième Chambre après l'avoir présenté à l'appréciation des parlementaires. En lisant sa copie, le Premier ministre a qualifié de «positif» le bilan du gouvernement, notamment dans son volet social, «en dépit d'une conjoncture économique mondiale difficile», a-t-il souligné. Il a en outre souligné que le gouvernement a poursuivi la mise en œuvre des grands chantiers structurants visant à consolider les infrastructures, tout en accordant une grande importance aux secteurs sociaux qui ont un impact direct sur la vie quotidienne des citoyens. Dans ce cadre, il a évoqué notamment le Plan Maroc vert, le programme «Iqlaâ», outre les projets sociaux concernant entre autres les secteurs de la santé, de l'éducation et de la formation. El Fassi a aussi mis l'accent sur «le soutien» apporté par son gouvernement aux investissements publics et aux initiatives d'emploi indépendant. C'est ce qui avait permis, d'après lui, de faire passer le taux de chômage de 9,8% en 2007 à 9,1% en 2009. Il a, en outre, fait remarquer que le gouvernement a développé de nouveaux mécanismes de solidarité ciblant les catégories les plus démunies et les plus vulnérables, à travers l'amélioration de l'accès des citoyens aux soins. S'agissant de l'inflation, El Fassi a souligné que pour la maîtriser, le gouvernement a réussi à la contenir en investissant 50 millions de dirhams dans la Caisse de compensation. Selon lui, le taux d'inflation n'a pas dépassé 1%, tandis que la dette a été contenue à 47% du PIB. Cependant, El Fassi a rappelé que le gouvernement a augmenté les salaires des fonctionnaires et des employés de 10 à 22%, et de 40% pour les basses échelles, permettant ainsi aux bénéficiaires de faire face à l'inflation, dont le taux moyen lors deux dernières années n'a pas dépassé 2,5%, et de préserver leur pouvoir d'achat. En ce qui concerne l'économie, il a déclaré que le gouvernement a pu transcender les difficultés rencontrées dans divers secteurs, poursuivre le processus de développement et préserver la compétitivité de l'économie nationale sur le marché mondial. Evoquant la justice comme étant un facteur d'attractivité des investisseurs, le Premier ministre n'a pas vraiment pu défendre une quelconque avancée dans ce domaine. Du reste, il a souligné que le gouvernement n'a ménagé aucun effort pour lutter contre la corruption, moraliser la vie publique, soutenir la transparence de la gestion économique et l'évaluation des politiques publiques, réviser le système des agréments et avantages, la mise en place de la loi sur la concurrence et la création du Comité national chargé de l'amélioration du climat des affaires. Mais ces bonnes paroles n'ont pas été prises pour argent comptant par l'assistance. Abbas El Fassi attaqué de toutes parts L'opposition est montée tout de suite au créneau pour relever les points négatifs de ce bilan à mi-parcours. Ses membres ne se sont pas laissé impressionner par les chiffres avancés. Ils estiment que le bilan gouvernemental reste en deçà des attentes de la population notamment dans le domaine économique et du développement. Pour Ahmed Touhami, président du groupe du Parti authenticité et modernité (PAM) à la première chambre, l'inexactitude des indicateurs sur lesquels le Premier ministre avait fondé son discours au début de son mandat est avérée, notamment la réalisation d'un taux de croissance de 6%, la création de plus de 250.000 postes d'emploi par an, la formation de 3.300 médecins par an à l'horizon 2020, la hausse du rythme de réalisation de logements économiques pour les porter à 150.000 unités/an à l'horizon 2010. D'après lui, la déclaration gouvernementale manque de vision prospective. Elle manque également d'une vision stratégique et de la solidarité qui devrait marquer, en permanence, l'action du gouvernement. Ce constat est dû, selon Touhami, au manque d'homogénéité politique du gouvernement qui est l'une des principales causes des dysfonctionnements relevés en matière de gouvernance et d'efficience. On reproche aussi à Abbas El Fassi d'avoir présenté un rapport d'activité plutôt qu'un bilan d'étape. En matière de compétitivité et de productivité, Abdellah Baha, du groupe de la lampe, a estimé que le pays rencontre une difficulté réelle l'empêchant à renforcer ses capacités productives et à améliorer sa compétitivité en matière d'exportations, relevant le déficit accru de la balance commerciale vis-à-vis des pays avec lesquels le Maroc a passé des accords de libre échange. Il ajoute que le Maroc doit faire preuve de compétitivité, en prévision du démantèlement des barrières douanières avec l'UE en 2012 pour être à la hauteur des attentes des citoyens et pour ne pas régresser dans le classement du développement humain et de la compétitivité commerciale et économique. Le PJD relève aussi que les investissements extérieurs ont reculé de près de 27% en 2009 et de 14% en 2008, ajoutant que le Maroc ne dispose pas encore d'un code d'investissement et d'une loi régissant ce secteur. A. El Fassi est brocardé également pour s'être contenté de présenter un rapport sans avoir passé en revue les réalisations qui restent encore à faire. On lui reproche également de s'approprier des chantiers qui ne rentrent pas dans l'action gouvernementale. Des usfpéistes parmi les déçus Salwa Kerkri, membre du groupe socialiste de la Chambre des représentants, exprime sa déception. «Le bilan El Fassi est une simple déclaration plutôt qu'un bilan», regrette-t-elle. Et d'ajouter : «J'aurais aimé qu'on présente à mi-mandat un bilan plus structuré par rapport aux objectifs qu'on s'est donnés malgré les aléas de la crise. L'exercice est de pouvoir montrer ce qui a marché le plus, mais aussi ce qui a connu un retard». La députée de l'USFP reproche au Premier ministre d'omettre quelques chiffres importants qui sont pourtant éloquents. Elle cite à titre d'exemple le déficit de la balance commerciale. «On remarque que ce gouvernement s'est inscrit dans la continuité des chantiers principaux entamés déjà en 2002. On aurait aimé qu'il puisse avancer sur certains dossiers comme la réforme de la Caisse de compensation qui est malheureusement encore au stade du diagnostic», ajoute-t-elle. En plus du volet économique, le social n'a pas échappé non plus aux critiques. A. Touhami a indiqué que le taux de chômage a augmenté en 2010, selon les données du Haut commissariat au plan. Abdelkader Zair, secrétaire général adjoint de la CDT, a déclaré, lors d'une rencontre à la CGEM, que l'augmentation du coût de la vie constaté par les Marocains signifie que les mesures gouvernementales ne se sont pas réellement fait sentir dans leur vie quotidienne. Il ajoute que l'impôt sur le revenu a certes diminué de quatre points et que certaines tranches de salaires ont augmenté, mais aucun effet n'est ressenti parce que les prix des produits de première nécessité, notamment les légumes, ont connu une hausse vertigineuse.