Après le succès du livre « Les territoires de Dieu », l'écrivain et journaliste, Abdelhak Najib, vient de publier un nouveau roman. Véritable chronique noire d'un hiver arabe, il s'agit d'une plongée sans concessions dans les réalités des printemps arabes dans une histoire qui porte un titre très significatif : « Le printemps des feuilles qui tombent ». Dés les premières pages, le ton est donné. Humour noir, ironie et description au vitriol d'un Casablanca qui prend des allures de monstre dévorant ses propres enfants. Si dans « Les territoires de Dieu » le décor est planté dans le quartier mythique de Hay Mohammadi, dans « Le printemps des feuilles qui tombent », c'est l'ancienne médina de Casablanca, une autre place forte de l'imaginaire marocain, qui sert d'espace narratif pour ce roman où l'auteur règle ses comptes avec sa ville natale et ses horribles visages d'aujourd'hui. Le roman raconte le périple de deux jeunes amis, Si Mohamed et Khalid. Le premier est un vendeur de poisson bardé de diplômes. Le second un révolutionnaire convaincu. Si Mohamed passe la journée à nager derrière la grande mosquée Hassan II. Il veut passer un concours de traversée du détroit de Gibraltar pour gagner un billet d'entrée en Espagne. Khalid veut changer le monde. Rien que cela. Chacun son rêve, chacun ses désillusions. Les événements s'enchainent et finissent dans un réquisitoire contre la politique, les idéologies obscurantistes, les magouilles et autres calculs d'intérêts pour museler une jeunesse aux abois. Abdelhak Najib nous gratifie de quelques passages drôles, cyniques sur l'ivresse du pouvoir, les manipulations et l'hypocrisie ambiante. Le propos est toujours mordant, incisif, avec des envolées lyriques sur l'amour, la passion et le désir dans cette belle idylle entre Si Mohamed et la belle Selma, une riche jeune bourgeoise révoltée, qui paie un lourd tribut à sa volonté de changer de vie. Ce qui frappe aussi dans ce texte très nerveux, écrit de manière cinématographique, c'est ce rythme effréné, cette vitesse des séquences, comme si les événements devaient s'enchaîner pour aboutir à ce final terrible qui se déroule dans un cimetière : comme une fin du monde. Le style est clair, limpide, sans trop d'effets, mais juste une fluidité dans le propos qui rend ces 132 pages très aisées à lire et d'une traite. Il s'agit donc d'un roman très actuel sur les printemps arabes, leurs illusions et leurs désillusions, sur la mort du rêve dans un monde arabe sans repères. C'est là le second volet de la trilogie de Abdelhak Najib consacrée à Casablanca. Après « Les territoires de Dieu », le second volet ferme un chapitre noir avant de nous livrer le troisième volet dont le titre annoncé par l'auteur donne déjà une idée sur le contenu : « Meurtre parfait à Anfa ». Et la boucle sera bouclée dans un récit dont Casablanca devient le véritable personnage des écrits de Abdelhak Najib. Le Printemps des feuilles qui tombent. Editions Les Infréquentables. 132 pages. 80 dhs. Actuellement en librairie.